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Indy 500's 100th : la saga Unser (Part 2)

bobby unser,al unser
Indy 1963. Bobby Unser, Kurtis Novi « Hotel Tropicana »

 A l'instar des frères Dalton, les Unser brothers étaient quatre... Bobby, né en 1934 est le troisième de la fratrie, Al plus jeune de cinq ans le quatrième. Simple fait du talent ou héritage de leur lointaine ascendance helvétique, ces deux-là sont partis pour atteindre des sommets.

Dans l’armoire familiale il y a déjà beaucoup de trophées, mais il manque encore un visage Unser sur le Borg-Warner Trophy. Cependant la conquête est d’ores et déjà en marche, « Indy 500 » n’a plus qu’à bien se tenir !

par Francis Rainaut

 

Voir également : Indy 500's 100th : la saga Unser (Part 1)

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Pike's Peak 1956. Victoire de Bobby Unser

 

Air Force « One » : Bobby Unser 

C’est Bobby qui le premier, va reprendre le flambeau. Bobby n’a pas le temps pour les études, il préfère les courses de voitures. A 15 ans il dispute sa première épreuve puis remporte ses premières victoires trois ans plus tard. Le premier objectif est la course de Pike’s Peak, objectif atteint dès l’âge de 22 ans. Ensuite il s’engage dans la « United States Air Force » où il restera deux ans.

1963 voit le retour d’un Unser à Indianapolis. Au volant de la Kurtis jaune #6 à moteur avant, Bobby termine… 33e, mais il termine quand même. Enfin un Unser à l’arrivée.

 

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 Indy 1968. Bobby Unser, Eagle-Offy

 

La victoire se fera attendre cinq ans. 1968, comme 1967, est l’année des occasions manquées pour la Turbine. La victoire n’aurait pas du échapper à la Lotus 56, celle-là même qui était promise à Jim Clark puis à Mike Spence.[1] Bobby aura quand même mené 127 tours sur les 200 que compte l'épreuve. Une vraie victoire, la première aussi pour l'Eagle de son ami de la West Coast Dan Gurney, le grand Dan terminant lui-même à la seconde place.

Un second succès allait suivre en 1975 toujours sur une Eagle-Offy.

En 1981 il est au volant d’une Penske-Ford, 81 c’est aussi l’année de « la » controverse avec la légende Mario Andretti.

Bobby domine les qualifications et décroche la pole à près de 318 km/h. Mario, qui dispute la saison de formule 1 chez Alfa Romeo, est retenu en Europe par le grand prix de Belgique. Il revient se qualifier in extremis et obtient l’avant-dernière place sur la grille.

Les qualifications sont une chose, la course en est une autre. En tête de la course, ces deux là ne se lâcheront pas jusqu’à la neutralisation du 146e tour. Les positions sont alors Andretti-Unser. Les deux pilotes ravitaillent et ressortent dans l’ordre Unser-Andretti. Sous régime de pace car, les deux leaders reprennent leur place, doublant respectivement huit et deux voitures.

Ensuite ce fut la confusion. Andretti classé 2e porta réclamation pour dépassement sous drapeaux jaunes. Initialement déclaré vainqueur, Unser fut pénalisé d’une place le lendemain. Les commentateurs officiels Jim McKay et Jackie Stewart furent eux aussi mêlés à la controverse. « The Captain » Penske ne pouvait pas bien entendu accepter cette décision, il porta immédiatement réclamation puis fit appel auprès des instances compétentes de l’USAC. Il dut attendre le mois d’octobre pour obtenir gain de cause, assorti d’une amende de $40.000. Dans cette affaire on peut considérer que la Cour rendit un peu un jugement de Salomon.

Tel fut sans doute l’opinion de Bobby Unser; toute cette affaire l’écœura et l’amènera à prendre ses distances avec le sport automobile. Il allait officiellement tirer un trait sur sa carrière deux ans plus tard. Et si vous voulez créer un début de polémique, parlez un peu de cette histoire à deux fans de sport auto américains, vous pouvez être certains du résultat !

 

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Watkins Glen 1968. Bobby Unser, BRM P138

 

On verra même Bobby en formule 1. Lui et son « copain » Mario Andretti obtiennent leur premier engagement au Grand Prix D'Italie en 1968. Les deux yankees effectuent les premiers essais, puis s'envolent vers les USA disputer le le Hoosier 100, une prestigieuse course USAC dans l’Indiana. A leur retour l’organiseur italien refuse leur engagement, s’appuyant sur un point de règlement interdisant des disputer deux courses en moins de vingt-quatre heures. Débuts reportés un mois plus tard à Watkins-Glen où la B.R.M. ne fit guère d’étincelles - surtout en comparaison des débuts fracassants effectués par Andretti - mais ce serait oublier que la veille, Bobby s’était fracturé la cheville dans un match de basket de bienfaisance.

Lou Stanley le pressa alors de participer à la course aussi Bobby demanda-t-il au médecin local une piqûre de Novocaïne au lieu de quoi le toubib lui prescrivit des pilules antidouleurs avec lesquelles il ne sentait plus rien mais qui eurent un effet désastreux sur sa conduite. Mais en essayant la monoplace de son coéquipier Rodriguez, Bobby eut le temps de constater que le moteur de Pedro avait environ 30% de puissance en plus, alors qu’ils étaient censés disposer d’un matériel équivalent. Ce genre de situation ne convenait pas à sa mentalité américaine[2] et dès lors on n'était pas près de revoir un Unser en formule 1.[3]



 

« Big Al », le petit frère :

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Al Senior, « Big Al », commence à courir en 1957. Probablement par atavisme familial, il remporte la course de Pike’s Peak en 1964 puis en 65.

Il débute la même année sur l’ovale d’Indy et termine 5e au volant d’une Lola à moteur Ford.

Il est victorieux en 1970 et égalise avec Bobby avant de récidiver en 71 et de prendre ainsi l’avantage.

Indy 500 devient peu à peu la chasse gardée de la famille Unser. Big Al gagnera encore en 1978, avant d’être rejoint au palmarès par son aîné Bobby.

 

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Indy 1971. Al Unser Sr., Colt-Ford

 

Mais 1987 allait les départager…

On se demande encore quel diable de scénariste a bien pu échafauder un pareil final pour l’édition 1987 de l’ « Indy 500 ».

Tout débute par le terrible accident de Danny « On the gas » Ongais lors des essais, accident qui se solde pour le pilote hawaïen par une commotion cérébrale qui le met ainsi « out » pour la course.

« The Captain » Roger Penske se met alors en quête d’un remplaçant et sollicite Al Unser Sr., triple vainqueur de l’épreuve et ancien pilote de son écurie.

 

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Indy 1987. Al Unser, March-Cosworth

 

Al est O.K., mais Penske ne peut lui proposer que le volant de la voiture de réserve, pour la simple et bonne raison que la nouvelle Penske PC16 est totalement hors d’état. Pour le moment cette voiture de réserve, une March-Cosworth de 1986, est exposée au Sheraton Hôtel de Reading, en Pennsylvannie.

L’écurie s’empresse alors de récupérer la March et de la préparer pour la course. Parti 20e, Unser trace son chemin vers le peloton de tête pour prendre le commandement au 183e tour. Il remporte son quatrième « Indy 500 » et rejoint ainsi A.J. Foyt dans l'Olympe des quadruples vainqueurs des 500 miles d’Indianapolis.[4]

 

Les 3e et 4e générations Unser :

A ce stade on commence tous à être un peu perdus dans toute la smala Unser, alors en ce qui concerne les générations suivantes un petit schéma synthétique peut nous aider à nous y retrouver, surtout si on se limite à ceux et celles qui tiennent un volant. Mais bien que cela reste intéressant, nous ne nous étendrons pas trop sur cette époque moderne, ceci n'étant pas la vocation première de ce site.

 

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Jeri Unser

Jerry Sr.

  • Johnny  (5 participations à Indy 500, meilleur résultat 18e)

Bobby Sr.

  • Bobby Jr.  (2 participations à Indy 500, batteur dans un groupe de rock, éleveur de pur-sang arabes)
  • Robby  (5e Indy 500 1998, 8e en 99)
  • ♀Jeri  (maintient la tradition familiale à Pike’s Peak)

Al Sr.

  • ♀Mary
    • Jason Tanner  (peu d'information disponible, carrière en Sprint Car)
  • Al Jr.
    • Al III  (beaucoup de flou autour de la carrière de « Just Al », qui réitère assez régulièrement son intention de disputer l’Indy 500)

 

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Indy 1992. Al Unser Jr.

Parlons un peu d'Al Junior.

C’est le propre fil de Big Al , « Little Al », qui allait se charger de perpétuer les bonnes habitudes de la tribu Unser. Placé très tôt derrière un volant, Junior remporte le championnat de formule V en 1981, débute en Indycar l’année suivante, et sur l’ovale d’Indy un an plus tard. Non sans avoir remporté Pike's Peak auparavant, en bon Unser qu'il est.

Il frôle la victoire en 1989 - éjecté par Emerson Fittipaldi - pour finalement  l’emporter en 1992 avec 0,043 s de marge sur son poursuivant, le plus faible écart jamais enregistré à Indianapolis.

Il remettra ça en 1994, au volant d’une Penske à moteur Chevrolet. Auparavant il aura pris soin de remporter deux fois les 24 Heures de Daytona.

La suite sera moins glorieuse pour Little Al. Un temps confronté à des problèmes d’alcool - dont il se remettra -, sa carrière commencera ensuite lentement à décliner.

Al Junior est aussi connu pour avoir lâché sa célèbre formule :

 

"you just don't know what Indy means" 

bobby unser,al unser

 

Des visages, des figures :

Depuis la seconde victoire d’Al Junior à Indianapolis, ce ne sont pas moins de 9 figures Unser[5] qui ornent ce chef d’œuvre Art Déco qu’est le Borg-Warner Trophy. On mesure ainsi le chemin parcouru par les descendants de Louis et Marie Unser, vous savez ces émigrants partis de leur Jura suisse natal pour aller chercher fortune par-delà l’Atlantique.

 

bobby unser,al unser,mario andretti

Postface :

Une dernière anecdote sur Bobby. En 1996, Bobby et un copain faillirent y rester lors d’une virée en motoneige. Une des deux motoneiges lâche, ils l’abandonnent puis se retrouvent en pleine tempête. Puis le deuxième véhicule cesse à son tour de fonctionner.  Les deux hommes en sont alors réduits à passer deux jours et deux nuits dehors par des températures au-dessous de zéro avant de pouvoir s’abriter dans une grange. Lorsqu’ils furent enfin retrouvés, les deux hommes vont mal, Bobby vomit du sang, son copain souffre d’hypothermie.

Pour finir ils s’en sortent de justesse, mais la Justice Fédérale n’omettra pas de condamner Bobby pour « usage illégal d’un véhicule à moteur dans un périmètre protégé », comme quoi il n’y a pas qu’à Bruxelles qu’on trouve des ayatollahs verts !

 

 

Notes et références

  1. voir sur le même thème 1er Janvier 1966: le réveil de la puissance.
     
  2. Pour l’anecdote, c’est un peu les mêmes raisons qui m’ont fait quitter Classic Courses début 2014, une question de parole non respectée.
     
  3. Si l'on excepte les essais Williams effectués par Al Unser Jr. fin 1991.
     
  4. Rick Mears rejoindra ce groupe très fermé en 1991.
     
  5. en 74 participations.
     

 - Illustrations ©gettyimages, ©DR

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Al Unser Jr. Essais Williams 1991

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04 mai 2021 | Lien permanent

Belles d'un jour

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S'il en est beaucoup que l’on aura fait que désirer, il en est d’autres, plus rares, que l’on a brièvement connues. Mais ne vous méprenez pas, il ne sera pas question ici des « passantes », celles qui ont été mises en musique par un grand poète.

Je vous parlerai plutôt de ces pilotes qui ont tous en commun d’avoir débuté en Grand Prix, ou presque, au volant de montures éphémères qui le plus souvent, n’avaient pas vraiment des profils de gagnantes…

par Francis Rainaut

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Le phénomène Ickx

Cette saison 1967, on ne parle que de lui. Lui c’est Jacky Ickx, un jeune prodige belge d’à peine 22 ans qui domine le tout premier championnat d’Europe de F2 réservé aux pilotes non gradés. Mais ce qui marqua surtout les esprits, ce fut sa prestation phénoménale au Grand Prix d'Allemagne au volant d'une modeste Matra F2. Le Nürburgring, Ickx connaît, le jeune pilote belge se permet le luxe de s'inviter à la bataille en tête au milieu des cadors: 4e temps des essais, un moment 3e en course avant que la suspension de sa MS7 ne finisse par rendre l'âme ! Il faut vous dire qu'à cette époque, quand il était question de suspension, ça n'était que purement mécanique...

C’est peu dire que le jeune Jacky a fait forte impression. le Commendatore ne s’y est d’ailleurs pas trompé, lui faisant  prestement signer un contrat en formule 1 pour 1968.

Mais entre-temps, « Uncle Ken » Tyrrell l’a orienté vers la petite équipe Cooper en mal de pilotes après que Pedro Rodriguez se fut cassé le pied – mais aussi le nez – dans son crash d'Enna.

Et Jacky de débuter ainsi en F1 à Monza au volant de la lourde Cooper-Maserati. Dans ce parcours semé d’embûches, Ickx évite tous les pièges… pour terminer à la sixième place.

 

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D'où viens-tu Johnny ?

Intéressons-nous à Johnny Servoz-Gavin, à qui tout semble réussir en 1968.

Au sujet du Grenoblois, j’admets avoir un tout petit peu triché. Si tout le monde se rappelle ses brillants débuts à Monaco sur la MS10 de Jackie, peu se souviennent de sa prestation de Rouen... qui n’était donc pas sa première apparition en formule 1.

Johnny ne le sait pas encore, mais la Cooper est un piège. L’écurie déjà agonisante traverse alors une période noire, elle perd l’un après l’autre ses pilotes titulaires. C’est d’abord Ludovico Scarfiotti qui se tue en course de côte, puis c’est au tour de Brian Redman de connaître à son tour un grave accident à Spa, qui va le rendre indisponible pour le reste de la saison. Au moins sauve-t-il son bras, mais c’était tout juste. Et c’est comme ça que l’écurie Cooper va proposer à Servoz-Gavin un volant pour Rouen. Lors de cette course maudite, le Français manque à son tour de se faire très mal. Inutile de dire que Johnny ne renouvellera pas l’expérience…

 

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L'ainé des Schumacher

Nous sommes à Londres, en décembre 1990. Après un banal accrochage, Bertrand Gachot, pilote de la toute jeune équipe Jordan, a une altercation avec un chauffeur de taxi ; il utilise pour se défendre un spray anti-agression. L’histoire, somme toute banale, se termine mal et en août 1991 Gachot finit en prison.

Eddie Jordan se met alors à la recherche d’un pilote. Il pense d'abord à Stefan Johansson. Mais Mercedes, par l’entremise de Peter Sauber, pose un chèque de 160.000 dollars sur la table pour placer son poulain Michael Schumacher : le rusé Eddie rit sous cape. La voiture est magnifique, la prestation du prodige allemand sera mémorable. Pour l’anecdote, Schumacher, né à 80 km de Spa, a reconnu le circuit, qu’il ne connait pas, à vélo. C’est aussi la première fois qu’il pilote une formule 1.

Si Eddie est rusé, Flavio l'est encore plus. Michael n'aura conduit la belle Jordan qu'une seule fois. Briatore aurait vendu sa mère pour signer la perle rare, le contrat de "Pupo" Moreno ne représentait qu'un infime détail, Schumacher continuera sa carrière en F1 chez Benetton.

 

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Un Champion sans couronne


Revenons un peu plus tôt en 1951. L'ouverture de la saison de formule 1 a lieu en Suisse à Bremgarten. Stirling Moss est déjà là, au volant d'une monoplace britannique, "of course". Cette H.W.M.(1) ne pouvait décemment pas lui offrir de grands espoirs, mais il faut bien débuter un jour. Il renouvellera la même expérience l'année suivante, puis s'en sera terminé de Moss sur H.W.M. Son histoire avec les F1 britanniques, elle, ne faisait que commencer.

- (1) Hersham & Walton Motors.

 

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Villeneuve, le petit Prince

Septembre 1976. Nous voici au Québec où est organisé le Grand Prix des Trois Rivières, le GP3R pour les initiés, qui se court en Formule Atlantic. Cette épreuve réunit un grand nombre de pointures, entre autres James Hunt, Patrick Tambay ou encore Alan Jones. Villeneuve le funambule va littéralement survoler la course, collant 10 secondes à Jones qui termine juste devant Hunt.

Très impressionné, James Hunt s’empresse de recommander le pilote québécois à son boss Teddy Mayer. Gilles, de son coté, a gagné un volant de F1 pour trois GP en 1977.

Villeneuve débarque donc à Silverstone pour le Grand Prix sans avoir jamais fait d’essai en formule 1. Il signe le meilleur temps des pré-qualifications non sans avoir effectué quelques tête-à-queue en cherchant d'emblée à cerner les limites de sa monoplace. Il termine les essais en 11e position, les aficionados commencent à s’intéresser à ce petit diable de Québécois.

La suite, c’est l’échange en coulisse des contrats Tambay / Villeneuve entre la Scuderia Ferrari et le Team McLaren, rien de moins les deux écuries phares du moment, mais ceci est une autre histoire.

Il ya un peu de Gilles Villeneuve chez Max Verstappen...

 

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Le grand blond

1974. Franck Williams a besoin d’argent. Jabouille, lui, a besoin de conduire des monoplaces un peu plus musclées que les Alpine A367, oups ! que les Elf2... Ce vieux dealer de Frank est toujours partant pour louer une des ses merveilles à qui lui signe un chèque. Le deal est conclu, mais l’essai n’est pas transformé par « le grand ». Cette Iso-Marlboro, en réalité une Polytoys FX3 reloockée, avait pourtant été dessinée par Len Bailey, autant dire pas n’importe qui, mais c’était en vue de disputer la saison 71. Force est de constater que les années ont fait leur ravage. Jabouille essaiera un plus tard de qualifier une Surtees TS19 à Zeltweg, sans plus de réussite.

 

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Durex, sed Lex

Juillet 1977, circuit de Dijon-Prenois. Le jeune Patrick Tambay aurait logiquement dû faire ses débuts en formule 1 au volant d'une deuxième Ensign, engagée par le Théodore Racing. Teddy Yip a en effet apprécié à sa juste valeur la prestation effectuée par Patrick pour son équipe en F5000 l’année d’avant. Mais l’Ensign n'est finalement pas prête à temps. Le samedi, John Surtees lui propose alors d’essayer de qualifier sa deuxième TS19 en remplacement de Larry Perkins. En bref, John Surtees en a assez du pilote australien. Et vice versa...

Le jeune Français ne peut sérieusement défendre ses chances au volant d'une Surtees équipée d'un moteur malade. « Avec un peu plus de maturité, » racontera plus tard Patrick, « je n’aurais sans doute pas accepté ce genre de deal. Mais j’étais alors un jeune chien fou, et j’avais besoin de rentrer suffisamment d’argent pour m'en sortir, alors j’ai dit oui. »

 

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Nelson Souto Maior

Nelson Souto Maior est ambitieux. Sa famille ne manque pas de moyens, tant mieux pour lui. Il rêvait de devenir tennisman professionnel, mais se reconvertit en cachette dans le sport automobile à l’insu de son père, mais non à celui de sa mère d’origine française, née Clotilde Piquet.

Il arrive tardivement en Europe en 1977, à déjà 25 ans. Il lui faut alors rattraper le temps perdu, il va survoler le championnat britannique de F3 1978.

« Mo » Nunn – disparu cette année – est de la même race que le Franck Williams des débuts. Il a alors autant besoin que Franck de pilotes payants. Et c’est comme ça que Nelson effectue ses débuts en Allemagne au volant de la modeste Ensign. Qu’il troquera rapidement pour une McLaren privée du team de Bob Sparshott(2). La suite, on la connait.

- (2) ancien ingénieur de Jim Clark et Graham Hill chez Lotus, fondateur de l’écurie privée B.S. Fabrications, qui engagera notamment la Surtees d’Henri Pescarolo en 1976 grâce à l'aide de Norev.

 

ickx,villeneuve,piquet,tambay

 

Me & Mr Jones

Son nom ? Jones. Non, pas Brian Jones, ni même John Paul Jones. Encore moins Indiana Jones… Bref, peu de gens savent en 1975 d’où sort cet Australien, et encore moins que cet Aussie ne porte pas vraiment les Français dans son cœur. Quoi qu'il en soit, Alan débute tardivement au GP d'Espagne au volant d'une Hesketh privée engagée par Harry Stiller.

Mais d’assez quelconque à ses débuts, Alan Stanley Jones saura saisir la chance que vont lui offrir Franck Williams et Patrick Head. A défaut de la sympathie, il gagnera le respect de ses pairs.

 

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Baby Schumi

Bien avant d’avoir le cœur tatoué en rouge, le jeune Vettel y avait plutôt une hélice, une hélice B.M.W.

Et c’est dans ce contexte que Vettel, déjà pilote-essayeur pour l’écurie Sauber-BMW, trouve l’opportunité de débuter en Grand Prix en remplacement du titulaire Robert Kubica. Le Polonais n’est en effet pas encore remis de son impressionnante cabriole au Canada.

« Baby Schumi », qui n’aime pas trop qu’on l’appelle comme cela, tiendra plus que son rang en terminant ce Grand Prix des Etats-Unis 2007 dans les points à la septième place.

Et on se souvient alors qu’il bataillait deux ans avant en Formule 3 Euro Series avec un certain Lewis Hamilton...

 

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Master Streiff

Comparé aux autres pilotes français de sa génération, Philippe Streiff a suivi  un parcours plutôt atypique, débutant en sport automobile par la Coupe de l’Avenir (3) avant de remporter le Volant Motul.

A force de talent et de détermination, Streiff parvient à s’attirer le soutien d’Henri Julien d’A.G.S., puis de Blanchet-Locatop, 1er distributeur en France des produits Hewlett-Packard et sponsor très impliqué dans le sport automobile français des années 80.

Philippe va ensuite obtenir des résultats convaincants en formule 2 avant que l’équipe Renault Elf ne lui propose un volant de pilote d’essai pour l’année 1984. Arrive la fin de saison. Pour le remercier de son implication, Gérard Larousse engage une 3e Renault au Grand Prix d’Estoril au Portugal. La prestation s’arrêtera au 48e tour sur panne de transmission mais qu’importe, Philippe a pris pied chez les grands.

La suite est malheureusement connue, la logistique sur les circuits de F1 en 1989 n’était pas ce qu’elle est aujourd’hui, et Philippe va en payer le prix fort. Tout en gardant intactes son énergie et sa détermination…

- (3) à base de mécanique Simca 1000 Rallye II.

 

- Illustrations ©D.R.

 

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« A celles qu'on connaît à peine
Qu'un destin différent entraîne
Et qu'on ne retrouve jamais... »

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22 novembre 2018 | Lien permanent | Commentaires (8)

George, Rikky, Brett et les autres ...

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Mon premier est canadien, descendant d'immigrants écossais. Son arrière grand-père a fondé la chaîne de grands magasins Eaton's. Mon second vient officiellement du Liechtenstein mais c'est en Allemagne que sa famille a créé la firme automobile Opel, avant de la céder à General Motors. Mon troisième, lui, est d'ascendance française, sa mère est née Dupont de Nemours, de ces Huguenots partis chercher fortune au Nouveau Monde.

Outre la particularité de n'avoir que fort peu de soucis financiers, ces trois-là ont en commun d'avoir garni les plateaux de formule 1 à une époque où ces derniers laissaient encore un petit peu de place aux « privés ».

Francis Rainaut

brett lunger,george eaton,von opel

George Ross Eaton

Sous sa crinière blonde et son casque blanc, on aurait pu le confondre avec un autre Georges, grenoblois celui-là. Les pilotes venus du nouveau continent gardaient leur mystère, G.R. Eaton n’échappait pas à la règle. On savait peu de choses sur lui, sinon que sa famille était fortunée, et qu’il avait un bon coup de volant.

Il faut savoir que la chaîne de magasin Eaton’s était un peu une institution au Canada. Elle avait été fondée par Timothy Eaton, l’arrière grand-père de George, et allait devenir un empire dans le commerce de détail, empire employant pas moins de 70.000 personnes à son apogée avec comme devise, « satisfait ou remboursé ».

Piqué par le virus du sport automobile le jeune Eaton se lance donc dans la série Canam en achetant en 1968 une McLaren M1C grâce aux subsides de sa famille.

Laquelle McLaren est remplacée l’année suivante par une M12 pour la Canam et une M10 pour la formule A. George y fait mieux que figurer, il commence à se faire un nom dans le milieu. Une particularité, les montures de George ne portent pratiquement pas de noms de sponsors sur leurs flancs ; probablement pas nécessaire… George se fait remarquer dans les deux séries en obtenant des résultats probants. Alors, pourquoi ne pas viser plus haut, quoi de plus classe que la formule 1, surtout sur le Glen avec sa cohorte de hippies accros au bruit et à la fumée, c’était ça après tout  la fin des sixties !

 

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USA 1969. Eaton, BRM P138

 

En 69, rappelons-le, le plateau F1 était squelettique. Par contre le système Rent-a-drive marchait à fond, surtout sur le continent américain. En ce qui concerne les Canadiens, on retrouvait ainsi sur les grilles les deux acolytes Bill Brack et Al Pease, ce dernier étant le seul et unique pilote de F1 à avoir été disqualifié pour lenteur excessive… Or donc George Eaton est engagé au Grand Prix des USA 1969 sur une monture que l’on qualifiera gentiment de second choix, à savoir une BRM P138. George fait ce qu’il peut avec, le moteur casse au Glen et la boîte de vitesses au Mexique.

On s’étonne alors un peu de l’engagement à plein temps du pilote canadien pour toute la saison 70. « Big Lou » Stanley avait probablement besoin de quelques subsides, mais George Ross Eaton tarde à montrer son talent. Son 8e temps aux essais de « son » Grand Prix à Saint-Jovite représentant le seul fait d’arme de toute sa saison, saison effectuée sur la BRM P153 qui a par ailleurs montré toutes ses qualités aux mains de Pedro Rodriguez. Encore un engagement au Canada sur BRM l’année suivante, et s’en sera terminé du parcours de George en formule 1.

 

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George Eaton, BRM P154

 

En Canam ce sera un peu plus brillant, Eaton se faisant remarquer en 70 au volant de la splendide mais terrifiante BRM P154. En 72, George prends sa retraite après les six heures de Daytona pour réintégrer le business familial. Mais là encore, les résultats ne furent pas vraiment à la hauteur. Resté dix ans à la présidence du groupe Eaton’s, George réussira tout simplement à couler l’entreprise !

 

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Rikky von Opel

Dans la famille Opel, devenue von Opel, on connaissait l’ancêtre, Adam Opel, fondateur de la firme automobile éponyme. On connaissait aussi sans doute son petit-fils Fritz von Opel, surnommé « Rocket Fritz » à cause de ses démonstrations effectuées au volant d’engins propulsés par des fusées. Et puis pendant les seventies on va entendre parler des enfants de Fritz : de Christina, qui fait la une des faits divers avec son entourage de blousons dorés plus ou moins fréquentables et à coup sûr trop enfumés aux yeux de ces braves gendarmes de Saint-Tropez.

Et puis également de son frère Frederick, dit « Rikky », peut-être bien avant Christina, mais peu importe. Allemand – officiellement liechtensteinois - par son père, colombien par sa mère, Rikky semble avoir hérité d’un tempérament de feu. Passant sa jeunesse entre Saint-Moritz et les collèges anglais, Rikky s’éclate en bobsleigh avec ses « riches » copains puis effectue dès ses vingt ans passés ses débuts en Formule Ford. Rikky ? Non, Antonio Bronco. Car il tient à une certaine discrétion et ne veut pas offusquer sa très riche famille. Car si la firme a été vendue depuis des lustres, l’argent, lui, coule à flots chez les von Opel.

 

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Forts de débuts somme toutes honorables, Rikky franchît le pas et s’engage en formule 3 sous son propre nom. Après une première année correcte, il rejoint en 72 le team Ensign de Morris Nunn. 72 est sa grande année, il remporte le championnat Lombard et termine second du Forward Trust derrière Roger Williamson !

Convaincu de son talent et pourvu d’arguments financiers disons, solides, von Opel va alors faire une proposition diabolique au patron d’Ensign, une proposition que personne, surtout pas « Mo » Nunn, ne peut refuser. En bref, il s'agit de financer la construction d’une formule 1 dont Rikky serait le pilote attitré.

 

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Et c’est comme ça qu’en 1973 sur le circuit du Castellet on voit apparaître pour la 1re fois une Ensign de formule 1 avec à son volant, Rikky von Opel. Les débuts sont juste corrects, Rikky termine à trois tours des hommes de tête. La suite ne vaut guère mieux. A Silverstone, von Opel laisse huit pilotes derrière lui en qualifications, mais finit à six tours. Ça commence à jaser dans le paddock, beaucoup pensent que l’héritier von Opel passe trop de temps dans les soirées glamour ou encore à s’occuper de son portefeuille d’affaires. En dépit de promesses faites à Nunn de considérer son activité de pilote un peu plus au sérieux, la saison ne se termine pas mieux qu’elle n’avait commencée. Rikky assistera en outre en spectateur aux disparitions horribles de Roger Williamson à Zandvoort et de François Cevert à Watkins-Glen.

Et rebelote en 1974, avec une Ensign N174 redessinée. Mais l’affaire tourne vite au désastre, et le team retire la voiture en Argentine. Von Opel réalise soudain que le team Ensign ne deviendra jamais un top team, et quitte alors l’équipe, emportant avec lui tous ses millions.

 

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L’affaire aurait pu en rester là. Mais il va encore croiser sur son chemin un fieffé renard nommé Bernie Ecclestone. Ce dernier est habile à flairer les bons plans, et s’en va dare-dare proposer le second volant Brabham à notre joyeux playboy. Cette fois-ci, la voiture est dans le coup ! Mais pas notre Rikky, qui touchera le fond à Monaco en échouant lors des qualifications, là où son coéquipier Reutemann décroche le 8e temps. Idem au Castellet… Cette fois Bernie a compris. En dépit des millions que lui amène l’héritier von Opel, il le vire de son équipe pour prendre à sa place le prometteur Carlos Pace qui lui amènera podiums et victoire avant que la saison ne se termine.

Pour le pilote du Liechtenstein, la course auto c’est terminé ; il vient tout juste de fêter ses 27 ans.

Depuis, les bruits les plus mystérieux circulent sur le compte de Rikky. Certains le croient en Thaïlande, dirigeant ses affaires à distance. D’autres pensent qu’il gère la fortune familiale depuis son bureau de New-York. D’autres encore sont certains que converti au bouddhisme il est devenu moine et qu’il distribue sa fortune pour vivre en accord avec ses convictions religieuses.

 

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Le casque, au dessin un peu  ésotérique, de Rikky von Opel

 

Quant à sa sœur Christina, elle disparut tragiquement en 2006, noyée à l'arrière de sa voiture emportée par une rivière en crue. Pauvre petite fille riche, aurait commenté Valéry, à moins que ce ne fût le fantôme de Cloclo...

 

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'Captain' Brett Lunger

Il est l’homme qui a sorti Niki Lauda de l'épave de sa Ferrari en feu, a combattu au Vietnam et pilote maintenant des vols humanitaires pour des enfants gravement malades. Pas mal pour un foutu « gosse de riche » !

Regardez bien la photo de la 312 T2 de Niki en flammes au Nürburgring. Non loin de sa Surtees accidentée, on y voit le pilote américain avec son casque blanc penché sur la Ferrari pour en extraire son pilote. Ce que l’on ne savait pas, c’est que le père de Brett était mort la veille de l’accident.

Mais un aussi chic type que Brett aurait certainement préféré faire la une des médias par ses performances en course.

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- Brett Lunger ? Connais pas trop.

- DuPont de Nemours, pour vous ça vous évoque quoi ?

Fabricant à l’origine de la poudre à canons, la firme américaine est aujourd’hui l’un des plus grands groupes industriels spécialisé dans la chimie. La firme a été fondée par un descendant de huguenots français et a bâti sa prospérité grâce à la révolution des « matières plastiques », avec la découverte du nylon et le développement du Néoprène, du Teflon, du Kevlar et autres Lycra. Or il se trouve que la mère de Brett est née Dupont de Nemours.

Brett a 20 ans quand il est mordu par le virus du sport automobile. Il débute sur Corvette, puis s’engage rapidement en Canam sur une Lola. Il part ensuite combattre treize mois au Vietnam dans les corps des Marines, assurant notamment des missions de reconnaissance en terrain Viet-Cong.

A ce propos, la légende voudrait qu’il ait sauvé au Vietnam un congénère de la famille des dirigeants de Liggett & Myers, ce qui lui aurait assuré le soutien financier des marques de cigarettes du groupe, L&M et Chesterfield pour ne pas les nommer. Légende invérifiable, comme tout conte et légende...

Revenu du bout de l’enfer, il va disputer une partie de la saison US 1971 de formule 5000, terminant plusieurs fois sur le podium et remportant sa 1ère victoire. Il attire ainsi l'attention de Rod Campbell, le Public Relation de L&M qui le soutiendra plus tard dans sa carrière. Direction l’Europe l’année suivante où il s’essaie en formule 2 sur une March de Bob Sparshott, sans trop de succès.

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Retour à la formule 5000 en 1973, où il est présent à la fois aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne, avec une moisson de podiums et même deux victoires, à Snetterton puis à Mallory Park. Il se cantonne aux épreuves américaines en 1974, puis ce sont les débuts en formule 1 fin 1975, en tant que lieutenant de James Hunt dans l’écurie Hesketh. Des débuts plus discrets que les frasques de l'équipe Hesketh, il faut bien l'admettre.

Pour 1976, Campbell et son frère David se sont démenés pour lui trouver des budgets. Brett est ainsi titularisé dans l’équipe Surtees, mais les résultats restent assez mitigés. Une équipe Surtees qu’il quitte en fin d’année pour s’engager dans des teams privés, Chesterfield Racing puis B&S Fabrications de Bob Sparshott, avec respectivement une March puis une McLaren. Cependant les places sont chères et Brett ne réussira qu’à frôler la porte des points à Zolder en 1978. Ce dont personne ne lui tiendra rigueur, tant le personnage est sympathique. Ce que l’on sait moins, c’est que Brett n’a pu disposer d’une partie de la fortune familiale qu’à l’âge de 55 ans.

 

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S’en sera alors fini de la formule 1, mais pas du sport en général. Brett disputera encore quelques épreuves de voitures de sport avant de plaquer le sport automobile. Il s’occupera alors de la firme DuPont, tout en participant à des marathons ainsi qu’à des épreuves cyclistes.

Il s’est ensuite trouvé une nouvelle passion dans le pilotage d’avions de tourisme, passion partagée avec sa femme Caroline. Mais il ne s’agit pas seulement d’un loisir pour gens fortunés. Caroline lui a suggéré de voler pour le réseau « Angel Flight » et aujourd’hui, Brett a déjà effectué pas moins de deux cents vols humanitaires financés sur ses propres fonds. Il véhicule ainsi des enfants gravement malades qui ont besoin d’interventions urgentes ou encore des vétérans en sale état de leur domicile jusqu’aux hôpitaux appropriés.

Brett Lunger est par ailleurs l’initiateur du projet « I am Responsible » visant à promouvoir l’initiative individuelle et la responsabilité de chaque individu. http://iamresponsiblebook.com/

 

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« Captain » Lunger n’a peut-être pas atteint tous ses objectifs, mais si on se retourne sur son parcours, on peut estimer qu’il est tout sauf ordinaire et qu'il inspire rien moins que le respect.

 

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Nürburgring 76. Harald Ertl, Brett Lunger, Guy Edwards

 

- Images ©DR

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24 février 2020 | Lien permanent | Commentaires (6)

Robin Herd (part 2) : la planète March

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Zandvoort 1970: Les March en escadrille (click to enlarge)

On poursuit la saga Robin Herd en reprenant le fil au tout début des seventies, quelque part en Afrique du Sud encore sous régime d’apartheid.

Où l'on en apprend de belles sur le GP de Belgique à Spa en 1970, sur la mystérieuse disparition d'une porte en acier à Watkins Glen, sur les dessous du couple Peterson-Chapman et sur les exploits, réels ou enjolivés,  du « Gorilla ».

Sans parler de la March 2-4-0 2WD ...

traduit et adapté par Francis Rainaut

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Amon la Marchance

Les premières formule 1 de la jeune firme March sont finalement terminées à temps pour participer au 1er Grand Prix de la saison 1970 à Kyalami.

« Robin Herd : ... La 701 m'a déçu, car elle ne ressemblait en rien à la voiture que je voulais construire. Nous avons dû faire tellement de compromis. Elle a fait le job, s’est qualifiée 1 et 2 pour son premier Grand Prix et a remporté trois de ses quatre premières courses. Mais elle était tellement rudimentaire. C’était comme ça : nous n'avions ni l'argent, ni le temps, pour faire autre chose. Si j'avais été avec Bernie et Jochen, j'aurais tout de suite fait une 711, avec de vrais sidepods à effet de sol. La 701 avait besoin de réservoirs latéraux supplémentaires pour certains circuits et Peter Wright de Specialized Mouldings les avait dessinés comme des sections de profilés aérodynamiques. Dans un communiqué de presse, j'ai dit qu'ils allaient ajouter de la stabilité, mais c'était du battage publicitaire. Dans l'air turbulent entre les roues avant et arrière, ils n'auraient pas fait grand chose. Mais Peter cherchait des appuis. Il mérite vraiment d'être crédité pour ses travaux sur l'effet de sol, pour ce qu'il a fait quand il est allé à Lotus. »

« Max a calculé que les 701 coûtaient 3.000 £ à produire, il les a donc facturés à 6.000 £, ce qui nous a semblé être une bonne marge bénéficiaire. Walter Hayes de Ford - qui payait pour les voitures Tyrrell - nous a avertis que cela ne suffisait pas et nous a demandé de lui facturer à 9.000 £. Mais toutes les allusions que Max a faites au lancement sur les grands sponsors secrets n'étaient de la poudre aux yeux. Le manque d’argent signifiait que les moteurs des voitures de l'équipe restaient plus longtemps entre deux révisions et que tout, y compris les amortisseurs, devait durer plus longtemps. »

« Je connaissais très bien Chris [Amon] chez McLaren - un gars adorable, un pilote très, très rapide et très sensible aussi. Peut-être ne lui manquait-il que de la confiance en soi. Mais lui et Max ne se sont jamais entendus, il y avait toujours de l'antagonisme. Chris croyait que toute l'équipe allait être montée autour de lui. Mais, après qu'il ait signé, Porsche nous a offert 30.000 £ pour mettre Seppi [Siffert] dans une voiture, de façon à le tenir à l'écart de Ferrari. Rétrospectivement, Max aurait aimé Seppi en tant que N°1 et Ronnie en tant que N°2, ce qui aurait permis d'économiser beaucoup d'argent. »

Jackie Stewart a remporté le deuxième Grand Prix disputé par March, l'Espagne en avril, et les 701 ont obtenu quatre secondes places – Stewart à Zandvoort et Monza, Amon à Spa et Clermont-Ferrand. À la fin de la saison, March était troisième au championnat des constructeurs, à quatre points de Ferrari. Amon aurait pu gagner Watkins Glen sans crevaison, mais la victoire qui aurait dû être la sienne était celle de Spa, une course qu’il avait menée avant de constater que la BRM de Pedro Rodriguez avait une vitesse étonnante en ligne droite.

« Il est généralement admis maintenant que Pedro avait un moteur de 3,3 litres ce jour-là. Nous le savions tout de suite après la course, mais poser une réclamation n'était pas le genre de chose que l'on faisait à cette époque. »

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Dans l'intervalle, les voitures des clients pour les autres formules devaient être conçues et fabriquées - F2, F3, Formula Ford, voire Can Am : Chris a conduit l'énorme 707 dans plusieurs manches américaines, dominant la puissante McLaren à Donnybrooke jusqu'à ce qu'il soit ralenti par des problèmes de carburant.

Graham Coaker, mécontent de l'opération de la F1 qui utilise des fonds prélevés sur la production, est parti en septembre. Il a emporté avec lui un châssis 712. À Pâques, il s’est blessé à Silverstone : une jambe cassée dégénére en septicémie et il décède de façon tragique deux mois plus tard. À la fin de 1971, Alan Rees décide de partir pour Shadow, puis enfin pour Arrows avec Jackie Oliver.

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Le thé est servi (sur un plateau)

Alors que la 701 était conventionnelle, la 711 était radicalement différente. La carrosserie avait été façonnée par l'aérodynamicien Frank Costin, avec un nez arrondi portant une aile sur une jambe de force centrale. 

« Frank était un gars adorable. Nous avons suggéré une rémunération forfaitaire, mais il a insisté pour que le paiement soit effectué en fonction des résultats - une augmentation considérable de la vitesse en ligne droite / mph -. Au premier Grand Prix à Kyalami, Ronnie suivait la 701 de John Love dans la ligne droite et ne pouvait pas le dépasser. Frank n’a donc jamais été payé. »

Le moteur de Ronnie, convenant parfaitement à l’équipe de Bicester à court d’argent, devait être un peu en manque de puissance ce jour-là.

« En fait, la 711 était une excellente voiture, avec un passage d’air très dégagé à travers les suspensions et un effet de sol. »

Peterson - lors de sa première année complète en F1 - a terminé deuxième du Championnat du monde derrière Stewart. Mais, après avoir perdu plus d’argent au cours de l’année, March n’a survécu à l’hiver que parce qu’un ambitieux petit gars de 23 ans avec les dents en avant, Niki Lauda,  est arrivé avec de l’argent d’une banque autrichienne, 35.000 £ pour un volant F1 et 8.000 £ pour un volant F2. Il a intégré l’équipe de 1972 aux côtés de Peterson.

« Ronnie était l'un de mes meilleurs amis. Un conducteur fabuleux et un être humain charmant. Il pouvait se tromper, tout comme moi. Comme avec la première voiture de 1972, la 721X, qui était terrible. C'était la voiture avec une boîte de vitesses positionnée en avant de l'essieu arrière, pour obtenir un moment d'inertie polaire plus favorable. Mais la première chose à faire avec une voiture de course est de ménager ses pneus, avec la 721X on était loin du compte. Dés que cela tournait un peu, le sous-virage se déchaînait de manière imprévisible. Nous voulions tous les deux que cela fonctionne, et Ronnie a tellement insisté que Niki s'est lancé dans l'aventure. Niki a toujours parlé comme il le sentait, et aussitôt il a dit: "C'est de la merde." Il avait absolument raison. Nous l'avons remplacée par la voiture basée sur la F2, que nous appelions la 721G. G pour Guinness, parce qu’en plein désespoir nous l’avons sortie en neuf jours, ce qui nous paraissait suffisant pour entrer dans le Guinness Book of Records »

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Charade 1972. Lauda, March 721G

 

Le meilleur résultat de Ronnie avec la 721G fut une troisième place au Nürburgring derrière les Ferrari, malgré une tête à queue, mais il garda la seconde place pendant la majeure partie du Grand Prix du Canada. Puis il s’est crashé lourdement lors des essais à Watkins Glen. 

« Pour réparer, nous avions besoin d’acier et nous n’en avions pas. Ainsi, cette nuit-là, nous sommes entrés dans la ville, avons fouillé les alentours jusqu'à trouver une maison avec une porte en acier, l'avons otée de ses gonds et avons fabriqué une nouvelle cloison. Ronnie a commencé 26e et a bataillé pour finir quatrième. »

En 1973, Peterson est parti chez Lotus, Lauda chez BRM, mais March a continué à jouer un rôle prolifique en F1, en partie parce qu'il vendait ses voitures à tous ceux qui pouvaient payer. Cette saison-là, ses voitures ont été engagées par cinq team différents, dont celui de Lord Alexander Hesketh. Il a acheté une voiture pour son protégé James Hunt, qui a pris une brillante seconde place à Watkins Glen, à moins d'une seconde de la Lotus de Peterson. Il y a eu beaucoup de succès en F2, mais ce n'est qu'en 1975 que l'Autriche, avec Vittorio Brambilla, a donné à l’équipe officielle sa première victoire en Grand Prix. Mais auparavant, Robin a une petite anecdote à raconter à propos de la pole position du GP de Suède.

Look out for The Cheater

« Je n’avais jamais pensé tricher en F1 et je n’ai jamais entendu parler que quelqu'un trichait - à part peut-être le moteur BRM de Spa en 1970 -. Certes de temps en temps, une ou deux personnes utilisaient de gros moteurs au moment où ils devaient renouveler leurs contrats de sponsoring. Ou il pouvait y avoir des histoires de poids ici ou là. Oh, et puis aussi le pit board en Suède. En qualifications, je me suis vu confier la tâche vitale de tenir le tableau. Notre stand se trouvait juste à côté du faisceau lumineux de la ligne d’arrivée, et j’ai peut-être bien fait basculer le tableau des stands lorsque Vittorio se trouvait encore à 50 mètres de la ligne. Pole ! Mais Vittorio marchait quand même assez fort. Il a mené la course pendant 15 tours, jusqu'à ce qu'il soit obligé de s'arrêter pour changer ses gommes. »

 

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Vittorio Brambilla. Zeltweg 1975

 

En Autriche, la course a commencé dans des conditions humides mais le temps était clair et la plupart des équipes avait donc opté pour des réglages de compromis. Max avait réglé la voiture de Brambilla pour la pluie. Le temps a empiré et la course a été arrêtée peu après la demi-distance.

« Vittorio prenait tous les risques, rejoint par l’Hesketh de James Hunt alors qu'ils doublaient tous les deux les voitures plus lentes et menait la course. Chaque fois qu'il passait dans un jet de fumée, nous disions : "C'est la dernière fois que nous le voyons." Puis ils ont brandi le drapeau à damiers. Il a jeté ses mains en l'air et, bien sûr, foncé directement dans les barrières. Ce qui a conduit à toutes sortes de théories du complot - il avait dû écraser la voiture pour cacher certaines preuves comme quoi elle était illégale, des absurdités comme ça. »

Le second pilote March cette saison était Lella Lombardi, soutenue par l'argent de son mécène, le comte italien Gughi Zanon.

« Lella était bien meilleure qu'on ne le supposait. Mais Ronnie était mécontent chez Lotus – le courant n’est jamais vraiment passé entre lui et Chapman - et au premier tour de la saison 1976, au Brésil, Ronnie me dit: "Je veux revenir." Nous avons convenu avec Zanon de transférer l'argent de Lella sur Ronnie, et après un deuxième entraînement, je suis allé dans sa chambre d'hôtel à São Paulo pour en parler. Puis on frappa à la porte et une voix dit: "C'est Colin". J'ai plongé derrière le lit. Chapman est entré et s'est assis sur le lit, j’étais juste derrière. Il avait découvert que Ronnie nous avait parlé et, pendant une heure, il nous a décrit comme étant des escrocs, a évoqué notre manque d'argent - il avait raison à ce sujet - et tout ce qui concernait les grands projets de Lotus pour l'année. Au bout d’un moment, j'avais vraiment envie de pisser. Je me demande ce qui se serait passé si je m'étais levé et que j'étais allé dans la salle de bains. Quoi qu'il en soit, j'ai réussi à m'accrocher et Chapman est finalement parti. Pour la course suivante, à Kyalami, Ronnie était à nouveau pilote March. »

« Pour économiser de l’argent, nous utilisions des freins de F2 pour la F1, et ils n’ont jamais été à la hauteur. Mais après avoir pris la pole et mené à Zandvoort, Ronnie fut brillant à Monza. Placé en huitième position sur la grille, il était en tête au 10e tour. Comme d'habitude, ses freins ont commencé à fatiguer, mais heureusement, des averses de pluie intermittentes leur ont donné un peu de répit. A l’aspiration de Regazzoni sur Ferrari, il établit un nouveau record de tour à deux boucles de l’arrivée et a gagné avec 2,3 secondes d’avance. Nous savions qu'il s’en allait chez Tyrrell, mais après la course, il m'a remis le trophée du vainqueur. Il a dit: "Ceci est pour vous jusqu'à ce que je revienne." Quelques années plus tard, quand il était à nouveau avec Lotus et suivait docilement Andretti dans toutes les courses, il a appelé pour nous voir à Bicester juste avant Monza. Il a dit: "Robin, s'il te plaît, fabrique-moi une voiture décente pour que je puisse revenir. Je sais que tu peux le faire. Aller chez March, c'est un peu comme rentrer à la maison." Une semaine plus tard, il était mort. »

 

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Slot Racing

En 1976, Tyrrell sortit sa P34 à six roues, mais Robin estimait que le concept était erroné. « Avec ses grandes roues arrière, il n'y avait pas d'économie de surface frontale efficace. » En réponse, il proposa la March 2-4-0, avec quatre petites roues motrices à l'arrière.

« Cela ressemblait un peu à une torpille en ligne droite, avec beaucoup moins de traînée en raison de sa plus petite surface frontale, et une traction phénoménale. Mais c'était plus lourd, et le problème était de faire fonctionner la transmission. Nous avons fait des tests à Silverstone, et bien sûr Max a invité la presse à venir regarder. La transmission a cédé au premier tour. Howden Ganley, qui la conduisait, s'est approché et nous avons raconté que nous avions un problème électrique. Ensuite, nous avons déconnecté l’entraînement des deux roues arrière et l’avons renvoyé  en piste. C'était humide, alors avec seulement deux petites roues motrices, nous l'implorions de faire preuve de souplesse en matière de puissance en sortie de virage. Howden a fait du bon travail, car les journalistes ont tous déclaré que la traction était incroyable, sans aucun patinage en sortie de Woodcote. La 2-4-0 n'a jamais couru, mais cela nous a rapporté beaucoup d'argent, car Scalextric a créé un modèle très populaire et a dû nous payer une redevance sur chacun d'entre eux. »

 

A Suivre...

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- Illustrations ©D.R., LAT IMAGES et GettyImages

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28 octobre 2019 | Lien permanent | Commentaires (3)

les 24h du Mans 1968

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Longtemps j'ai cru que les seules chances de victoire française au Mans reposaient sur les épaules de la valeureuse équipe Alpine. Mais il était sans doute écrit qu’en 68, certains événements allaient quelque peu bousculer l’ordre établi...

Et les vingt-quatre heures n’échappèrent pas à la règle. Ainsi en lieu et place de la bataille attendue entre les Porsche, les Alpine et les Ford, c’est à une domination de Ford, avec une Matra Sports à parement vert fluo comme invitée surprise, que l’on allait assister.

Cinquante ans après je me rappelle encore ce rendez-vous d'automne.

par Francis Rainaut

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Il est interdit d'interdire

L’édition 68 des vingt-quatre heures du Mans avait la lourde tâche de succéder à « la course du siècle », le fameux duel au sommet Ford-Ferrari. La course avait été reportée fin septembre pour cause d'événements que vous savez, donnant aux concurrents un délai supplémentaire pour peaufiner leur préparation.

Ferrari en était le grand absent, le « Commendatore » n'ayant pas toléré l'affront que lui avaient fait ses « amis » organisateurs de l'ACO. Mais derrière les réparties un brin théâtrales du « Drake » se cachait sans doute la fine analyse du stratège considérant que les Sports-prototypes 3 litres n'avaient aucune chance au Mans face à des Sports 5 litres telles que les GT40 4,9 litres à culasse Gurney-Weslake.

Ainsi reportées, les vingt-quatre heures allaient en plus désigner le vainqueur du championnat du monde des marques. Tout ceci n'empêcha pas le « Zec » (Claude le Guezec) de maintenir le suspense quant à la participation de la 630 V12 à la course, cependant personne n'eut misé un Voltaire - et encore moins un Pascal - sur les chances qu'avait ce moteur F1 d'aller au bout de la course, Matra était juste venue là pour faire un coup...

Les pronostics désignaient Porsche comme grand favori, certains pensaient même que le nouveau règlement limitant à 3 litres la cylindrée des protos avait un peu été fait pour eux.

Cette édition avait plutôt mal commencé en ce qui concerne les pilotes belges. Jacky Ickx, 1er pilote de l’équipe Wyer, se cassait la jambe en F1 une semaine avant au Canada. Et c’est un autre pilote belge, expérimenté, qui allait le remplacer, ceci compensant cela.

Le départ, type « le Mans » évidemment, est donné par Giovanni Agnelli sous une pluie de plus en plus dense. Comme prévu, quatre Porsche prennent aussitôt le commandement, suivies par les vaillantes Alpine-Renault, les Ford étant déjà un peu larguées. Johnny a pris un bon départ, mais la Matra va s’arrêter tout de suite à son stand, son essuie-glace balaie davantage le capot que le pare-brise.

Les prévisions étaient donc justes...

 

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Ford GT40 - Mairesse / « Beurlys »

Mémoires d’Ostende

Mais il y eut plus dramatique que les pépins de la Matra. Sur la GT40 belge qu’il partage avec « Beurlys », alias Jean Blaton, le fougueux Willy Mairesse (*) a pris un départ canon. Au Tertre Rouge, le Belge est dans l’aspiration des trois Porsche de tête. Il prend alors la courbe des Hunaudières un peu large, la Ford percute le talus avant de s’envoler puis de s’écraser, complètement disloquée.

Misant un peu trop sur le départ, le malheureux Willy a mal refermé sa portière et omis de s’attacher. Il va le payer très cher… Ejecté de la Ford, le pilote est sérieusement blessé à la tête et aux membres : il restera deux semaines dans le coma et en sortira fortement diminué. En proie à une grave dépression et conscient que sa carrière était définitivement terminée, Mairesse finira par se suicider dans un hôtel d’Ostende moins d’un an après l’accident, par overdose de médicaments. Il n’avait pas encore 40 ans, la course représentait tout pour lui.

Ce départ précipité devait forcément marquer un autre coureur d'outre-Quiévrain, tout le monde aura bien sûr reconnu Jacky Ickx qui s’en souviendra à sa manière un an après…

(*) ce qui relève un peu du pléonasme

 

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Rendez-vous d'Automne

Auparavant un petit tour dans le paddock nous a permis de détailler quelques unes des forces en présence. Profitant du report de la course en septembre, Alpine-Renault est arrivé en force dans la Sarthe. Pas moins de quatre prototypes A220 à moteur 3 litres Gordini candidats à la victoire sont de la partie, sans compter une escadrille d' A210 de plus faible cylindrée aux mains entre autres des jeunes Ethuin, Serpaggi, Wolleck et Andruet, Alpine visant comme de coutume les victoires à l'indice.

Au volant des « grosses » Alpine 3 litres, on retrouve les équipages M.Bianchi/Depailler, Grandsire/Larrousse, de Cortanze/Vinatier et Guichet/Jabouille.

 

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Alfa Romeo effectue son retour en force avec quatre « 33/2 » 2 litres pour l'écurie officielle AutoDelta et deux pour les privés belges du team V.D.S. On ne sait pas trop à quoi s'en tenir à leur sujet, en clair on ne s'attends pas à les voir jouer les premiers rôles, même si elles ont quand même beaucoup d'allure.

Se voient refuser le départ la Hrubon, la Marcos et à une Ferrari GTB du NART, trop lentes toutes les trois.

 

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Simca ou l’éternel retour…

Au 8e tour, l’élégante Simca-Moynet XS 68, née Moynet MH 68 (MH pour Moynet-Hubert), s’arrête à son stand pour une panne bénigne. En fait, l’arbre d’entrainement de la pompe à huile s’est cassé net. La voiture ne repartira pas, son abandon est officialisé trois heures plus tard.

C'est fort dommage, ce prototype construit sur la base d’un châssis Costin-Nathan dégageait un fort capital de sympathie. Jacques Hubert, ancien de D.B. et concepteur de l’Elina a produit un dessin superbe et Stéphane Seckler au parcours tout aussi dense s’est chargé de sa réalisation, sur les directives d’André Moynet, lequel n’a lancé son projet qu’en tout début d’année. Au dernier moment Simca, dont le moteur de 1200s équipe le proto, s’est associé au projet. Et c’est un équipage éminemment sympathique qui pilote au Mans la XS,  à savoir René Ligonnet le baroudeur associé au marseillais Jean Max – son pseudo de pilote – grand dominateur du tout nouveau championnat de Formule France.

Je ne détaillerai pas ici - Mille vies ne sont pas suffisantes - tout le parcours d’André Moynet, une note entière de Racing’ Memories n’y suffirait pas. Relevons simplement que c’est lui qui mit en relation Marcel Chassagny et René Bonnet en 1961, avec la suite que tout le monde connait.

 

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Les allemands dans la débâcle

18 heures, c’est l’instant où la mécanique allemande commence à s’enrayer, Siffert doit abandonner sur panne de transmission. Stommelen n’est pas beaucoup mieux loti, sa 908 connait de gros soucis d’embrayage, il perd un temps précieux au stand. Un peu plus tard, c’est au tour de la #34 d’être retardée par des ennuis d’alternateur.

Et c’est comme ça que l'on retrouve maintenant les deux Ford Wyer pointant en tête, Lucien Bianchi devançant Paul Hawkins. Las ! la GT40 de l’Australien abandonne à son tour après minuit, au moment même où la pluie se déchaîne. 

Mais l’attention du public, bientôt de la France entière, ou presque, se porte ailleurs. C’est désormais la Matra MS630 #24 pilotée par Servoz-Gavin qui chasse la Ford  de tête ! Sauf que l’essuie-glace, lui, ne veut plus rien savoir, et que Johnny n’est pas du tout chaud pour les Hunaudières à fond sans visibilité. (1)

 

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Je me suis bientôt trouvé en position pour doubler l'Alfa, j'aurais pu le faire dans la ligne droite, mais j'ai attendu les tribunes et l'effet a été formidable, les mains étaient tendues, les gens se levaient...

 

Pescarolo dans le sillage de Mermoz

Jean-Luc Lagardère propose alors le deal à Pescarolo qui lui, n’imagine pas une seconde abandonner en aussi bonne posture. Et voilà comment le grand Henri va, de manière indélébile, graver son nom dans la légende du Mans et faire du vert fluo son image de marque pour l'éternité. Tous les médias, essentiellement la radio, mettent alors  le paquet sur LA course. Le Général de Gaulle est parait-il sur le coup, on est en train de rejouer la bataille des Ardennes ! Aux premières lueurs de l'aube, la Matra est toujours là et bien là.

La journée du dimanche commence, beaucoup de jeunes ou de moins jeunes, vingt dieux, vont manquer la messe, tout ça pour rester scotchés à leur « transistor » en quête du dernier point de Tommy Franklin : « ... Ici le Mans, je prends l’antenne au moment même où la Matra de Johnny Servoz-Gavin vient de reprendre la deuxième place à l’Alfa Romeo des Italiens Nanni et Giunti, le public s’est levé dans les tribunes, l’ambiance ici est indescriptible,... à vous les studios ! » (2).

 

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Alpine A220 3L - de Cortanze/Vinatier

 

Exodos en bleu majeur

Un telle odyssée méritait une fin tragique, ou pour le moins théâtrale. Vers 11h30, Mauro Bianchi au volant de l'Alpine la mieux placée repart de son stand, plaquettes de freins neuves. Mauro est fatigué, un instant il ne pense plus à ses freins, il arrive dans les esses du Tertre Rouge. Au freinage l'Alpine est déséquilibrée et s'en va heurter les fascines. Le choc est violent, en un instant la voiture s'embrase, son pilote mets un peu de temps à sortir de la voiture en feu, il s'en tirera avec de sérieuses brûlures aux mains, malgré ses gants soi-disant « ignifugiés ». Exit la belle bleue, alors en 6e position.

Lucien Bianchi passe au ralenti le long du bolide calciné de son frère sans pouvoir connaitre dans quel état se trouve ce dernier...

Mais la dramaturgie n'a pas fini de nous réserver des surprises. En roulant probablement sur des débris de l'Alpine, la Matra #24 de l'héroïque Pescarolo crève à l'avant, le pilote rentre lentement au stand pour réparer les dégâts. La Porsche 907 suisse de Spoerry/Steinemann prends alors la seconde place, mais Pesca reparti en piste grignotte peu à peu son retard sur la Porsche, à ce stade rien n'est encore perdu !

Coup de massue peu de temps après, la Matra ne passe plus ! Cette fois c'est le pneu arrière qui s'est déchiqueté, entrainant un début d'incendie et des dégâts irréversibles sur la batterie, cela sans compter l'intervention d'un commissaire un peu trop zêlé. L'abandon de la #24 est annoncé dans la foulée.

La déception des spectateurs et de milliers de supporters fut à la mesure des espoirs placés depuis le crépuscule sur une possible victoire de la Matra V12 au numéro fétiche. Servoz-Gavin était déjà une star, Pesca devint ce jour là un véritable héros. La chevauchée fantatique de la #24 réconcilia nombre de français de tous bords. Lagardère en homme féru de communication comprit instantanément le formidable impact qu'avait eu sur le public l'incroyable course de la Matra MS630 à parement vert.

 

matra 630,servoz-gavin,pescarolo,le mans

 

Number nine, number nine...

La Ford GT40 #9 de Lucien Bianchi et Pedro Rodriguez n'eut plus qu'à se laisser glisser doucement vers l'arrivée. Des cinq GT40 engagées elle restait la seule survivante. Et même si le public eut manifestement préféré qu'elle soit teintée de bleu foncé, cette victoire de Lucien et de Pedro, eux qui n'eurent pas toujours la chance de leur coté, fit chaud au coeur. Ils furent fêtés et applaudis à la hauteur de leur mérite, eux qui n'étaient au départ que les deux « remplaçants ».

Les pilotes belges avaient laissé un lourd tribut à cette course. Il était juste qu'un des leurs recoive les lauriers du vainqueur.

 

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Giancarlo Picchinini (à gauche) et la Porsche 907 Squadra Tartaruga

 

Plus surprenante était la seconde place de la Porsche 907 des suisses Spoerry-Steinemann, résultat d'une excellente préparation ainsi que d'une régularité toute helvétique.

Les Alfa 33, grandes animatrices de la course, firent un triplé aux places d'honneur, avec les 4e, 5e et 6e places.

Les Alpine-Renault ne furent pas en reste, elles triomphèrent à l'indice de performance et à celui du rendement énergétique, placant également une 3L en une peu glorieuse 8e position derrière la vénérable Ferrari 250LM de David Piper et Richard Attwood. L'ami Christian Ethuin associé à Bob Wolleck termina ses premières vingt-quatre heures à la 11e place, Bravo !

Et nous les teenagers de 68, on eut soudain gravé au coeur une sorte de tatouage, un truc invisible. En cherchant bien on aurait certainement pu y lire :

- MATRA Sports, ou bien peut-être, EQUIPE MATRA-ELF

 

Ferodo's Le Mans movie


 

(1) "(...) C'était de la folie douce de rouler dans de telles conditions, seul un candidat au suicide aurait pu y trouver son plaisir ; je n'étais pas du bois dont on fait les cercueils.

Je stoppai près des stands et annonçai à tout le monde que si Henri voulait continuer, c'était son affaire mais que l'on ne compte plus sur moi. J'étais conscient de mes propres limites et je ne voulais pas m'amuser à les dépasser pour les honneurs publicitaires d'une marque de voiture."

"(...) Henri accepta de continuer. Cela me fit mal de le voir repartir mais il était imperturbable et dix mille fois plus calme que moi. Je ne pus que l'admirer et lui tirer un grand coup de chapeau pour les deux relais qu'il accomplit."

Servoz-Gavin "Mes excès de vitesse", ed. Balland.

 

(2) à la Maison de la Radio Paris XVIe et non rue Cognacq-Jay où se trouvaient les studios de TV. Merci Bruno.

 

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- Illustrations ©D.R. 

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29 septembre 2018 | Lien permanent | Commentaires (8)

Jochen Rindt & Co: 50 ans après les débuts de Jochen en GP (face B)

b.ecclestone,j.rindt,e.fittipaldi

... Les amis, les rivaux, les contemporains : ce qu’ils sont devenus

Remarques de Klaus Ewald, traduit de l'anglais par Francis Rainaut

 

A l’instar de l’allemand Bernd Rosemeyer dans les années trente et du canadien Gilles Villeneuve dans les années soixante-dix et quatre-vingt, Jochen Rindt dans la Lotus Ford 72 est considéré comme l’archétype du jeune et courageux héros de Grand Prix doté d’un charisme illimité et d’une popularité intemporelle...

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Le prédécesseur mais aussi le successeur de Jochen Rindt comme champion du monde fut son proche ami Jackie Stewart, qui remporta le titre en 1971 et en 1973 sur une Tyrrell Ford établissant un record - qui dura jusqu’en 1985 - de 27 victoires en Grand Prix avant de concrétiser fin 1973 son retrait en tant que pilote, retrait prévu de longue date. Après cela l’Ecossais travailla comme conseiller pour Ford, Goodyear et d’autres sociétés et aussi comme journaliste pour la chaine de télévision Nord-américaine ABC mais également pour d’autres medias. En 1997 il fonda une équipe à son nom avec le soutien de Ford pour remporter sa seule victoire comme constructeur avec Johnny Herbert au Nürburgring en 1999. Stewart Grand Prix est devenu Jaguar Racing à partir de 2000 et plus tard Red Bull. Entre-temps Jackie Stewart à reçu un titre de docteur honoris causa et a aussi été anobli par la Reine Elizabeth II. Il travaille aujourd’hui en tant que représentant de la Royal Bank of Scotland.

Maurice Phillippe le concepteur des révolutionnaires Lotus 49 et 72 quitta le Team Lotus au printemps 1971 ; à ce moment là la firme traversait une profonde crise morale, car beaucoup d’employés chevronnés avaient déserté après la mort de Rindt. Chapman semblait un peu désillusionné, pour ne pas dire dépressif, et le jeune Emerson Fittipaldi était encore trop inexpérimenté pour être un vrai numéro un d’une part, et d’autre part il était sérieusement confronté à des soucis d’ordre privé : il avait été impliqué – sans aucune responsabilité personnelle – dans un accident de voiture en France cette année-là et avait subi des blessures d’assez sérieuses ; sa femme Maria Helena qui occupait le siège passager attendait le premier bébé du couple, qui devint un enfant mort-né comme conséquence de l’accident. Phillippe avait accepté une offre de Rufus Parnell Jones en Californie.

 

b.ecclestone,j.rindt,e.fittipaldiLe team des Américains avait de gros moyens - merci aux super sponsors comme  Viceroy, Samsonite, etc... - un niveau de ressources financières jamais vu entièrement disponible pour leur projet Indy Car de 1972. L’audacieux Parnelli Jones, vainqueur aux 500 miles d’Indianapolis en 1963 et héros de la Baja 1000, et son partenaire Vel Miletich (ce qui explique la désignation VPJ) achetèrent tout ce qu’ils purent pour faire chauffer leurs cartes de crédit : Les pilotes vedettes Mario Andretti, Bobby Unser et Joe Leonard, des spécialistes de la NASA en travail du titane, des agents du FBI pour garder l’usine et le meilleur designer mondial du moment : Maurice Phillippe.

Ce dernier travailla derrière des murs épais de plusieurs mètres érigés comme protection contre l’espionnage industriel, cloîtré à l’intérieur de pièces anti-écoutes et se révéla être beaucoup plus créatif sans la supervision de Colin Chapman : Il inventa la monocoque au dessin trapézoïdal, presque parfaite au niveau aéodynamique (qui plus tard devint célèbre avec Gordon Murray chez Brabham) ainsi que les aérofoils en forme de V (à la place des ailerons conventionnels) partie intégrante du concept de ce chassis. La Viceroy Special avec le moteur quatre cylindres turbo Offenhauser avait une telle tenue de route qu'elle semblait littéralement rivée au tarmac, telle fut la description qu'en fit Mario Andretti après le tout premier test jamais effectué avec l’auto. Il est vraiment dommage que les officiels aient alors pris la décision d'interdire les ailerons en V, part essentielle du concept, pour des raisons de sécurité comme ils l'affirmèrent à ce moment là. En conséquence Phillippe dut improviser et faire des compromis, ce qui en définitive empêcha la voiture d’être un succès, il faut bien l'admettre.

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D’un autre coté ils avaient reçu suffisamment d’argent de Viceroy (une marque de cigarettes) pour construire une monoplace de Grand Prix par eux- mêmes. Philippe dessina tout simplement une version modernisée le la Lotus Ford 72. Quand la Parnelli Ford VPJ4 fit ses débuts au Canada 1974 avec Mario Andretti dans le cockpit, elle fut chaudement applaudie, non seulement par les hommes de Lotus, proches du désespoir avec leur Mk 76, mais également par le reste de la communauté de la course automobile. Mais il ne purent, et ce fut bien dommage, trouver les années suivantes aucuns sponsors internationaux pour la tellement prometteuse écurie de Grand Prix Américaine (Viceroy étant uniquement intéressée  par le marché US, où la F1 joue traditionnellement un rôle mineur); après Kyalami 1976 Parnelli F1 se trouva de facto en faillite, en conséquence Mario Andretti rejoignit immédiatement le Team Lotus après le Grand Prix des Etats-Unis Ouest qui s'était déroulé à Long Beach.

Maurice Phillippe retourna lui aussi en Europe où, après une courte apparition chez Copersucar Fittipaldi, il remplaça Derek  Gardner chez Tyrrell, ce dernier ayant été rendu responsable de l’échec de la monoplace P34 à six roues. Phillippe ramena la technologie Tyrrell sur la voie du succès, jusqu'à ce qu'au milieu des années quatre-vingt on ne place soudain devant lui un jeune ingénieur de course en tant que chef designer, ce malgré les bons résultats qu’il avait obtenus. Phillippe prit à nouveau un job en Indy Cars, mais designer senior chez MARCH Alfa Romeo était trop étriqué pour le pensif, sensitif et preneur de risques Phillippe, qui n’a jamais été une star pour les medias comme l’ont été des hommes tels que  John Barnard ou Gordon Murray malgré le fait qu'il était largement au même niveau qu’eux. Quand la dépression, dont il souffrait de manière évidente depuis longtemps, devint trop insupportable, Phillippe mit fin à ses jours dans un profond isolement.

Jacky Ickx fut le seul pilote encore capable de déposséder Jochen Rindt de son trône après Monza, mais dès l'instant où Fittipaldi rendit la chose impossible par son succès à Watkins Glen, le belge en fut visiblement soulagé. Remportant une victoire en Grand prix par an à la fois en 1971 et 1972, il ne fut pas un réel challenger pour les champions du monde de ces années-là. Après une dispute Ickx quitta Ferrari au milieu de la saison 1973 ; plus tard il allait quitter Lotus (1975) et Wolf (1976) dans des circonstances similaires puis fit des apparitions sporadiques pour Ensign jusqu’en 1978. Le belge fit sa dernière apparition en Grand Prix chez Ligier en remplacement de Patrick Depailler qui s’était blessé dans un accident de Deltaplane. A partir de ce moment-là Ickx se concentra sur son travail de pilote Porsche de développement pour les courses d’endurance et il eu alors beaucoup de réussite dans ce job. Le « Baby Face » des courses auto et l’Homme qui ne veut pas Grandir ont dû également traverser des moments de sérieuse maladie qui mit longtemps à guérir. Jacques Bernard Ickx, né en 1945, a eu dans sa carrière des succès extraordinaires : il a été deux fois vice- champion du monde (1969 & 1970), il est le vainqueur de huit Grand Prix et de six 24 Heures du Mans et il a aussi triomphé au Paris-Dakar et à la Canam. Sa fille Vanina, une biologiste, a pris part au DTM et court également dans de grandes courses automobiles aussi importantes que Le Mans.

Jochen Rindt eut deux copains d’école qui sont devenus plus tard pilotes de Grand Prix. Le juriste Dr Helmut Marko a également remporté Le Mans avant et il était pilote d’usine chez B.R.M. en 1971 et 1972, quand sa jeune carrière fut brutalement stoppée par la perte irréversible d’un œil causée par une pierre projetée par la March de Ronnie Peterson à Clermont Ferrand en 1972. En dépit du fait qu’il n’est officiellement qu’un conseiller en sport automobile pour le groupe Red Bull, Marko est aujourd’hui un des hommes les plus puissants dans le milieu des Grand Prix, car il est de facto le directeur de deux équipes de Formule Un : Red Bull Renault et Toro Rosso Ferrari. Un peu plus jeune que Rindt et Marko, Harald Ertl travaillait quant à lui comme journaliste en parallèle à sa carrière sportive. A partir de 1975 Ertl conduisit des Hesketh Ford privées puis de façon sporadique pour Ensign et ATS. En 1982 Ertl fut tué dans le crash d’un avion privé.

b.ecclestone,j.rindt,e.fittipaldiSir Jack Brabham, le vrai challenger de Rindt lors de la saison 1970 et aussi son patron dans l'équipe en 1968, décida de mettre fin à sa carrière à la fois de pilote et de constructeur à la fin de 1970 pour vendre ses parts dans l' écurie à son ingénieur mais aussi son compatriote Ron Tauranac (qui lui-même, ployant sous une charge excessive, vendit la firme un an plus tard à Bernie Ecclestone). Brabham ne voulait pas être seulement un directeur d’équipe. De retour en Australie son pays d’origine il travailla dans l’aviation et dans l’agriculture, des secteurs qui étaient familiers pour un ingénieur en aviation et fils d’un marchand de fruits et légumes. A partir de 1994 Sir Jack fut impliqué dans l’équipe de Formule Un Simtek avec son fils David et l’inoubliable Roland Ratzenberger dans le cockpit des voitures. Les fils de Brabham sont devenus pilotes de course tous les trois. Geoffrey, le plus âgé, a participé aux Indy Car Series, Gary et David sont parvenus jusqu’à la Formule Un, mais n'ont pas obtenu de résultats dignes d’être mentionnés. Sir Jack Brabham, né en 1926, évite les voyages dans les pays étrangers depuis plusieurs années, pour la simple raison qu’il est sous dialyse, mais au printemps 2010 il a assisté au Grand Prix de Bahreïn à l'occasion du 60e anniversaire de la Formule Un comme l'ont fait tous les autres champions du monde encore en vie.

Rob Walker, premier patron de Jochen Rindt lors de ses débuts en Grand Prix sur une Brabham B.R.M. à Zeltweg en 1964, dirigea sa propre équipe privée de Formule Un jusqu’à la fin de la saison 1970 puis s’associa avec le Team Surtees. Mais cette collaboration ne dura que trois ans. Pour 1974 Walker et son pilote Mike Hailwood changèrent pour l’équipe Yardley McLaren. Au début de l’année 1975, conjointement avec Harry Stiller et seulement pour quelques courses, il engagea pour la dernière fois de sa carrière une voiture de Grand Prix privée sous la livrée traditionnelle bleu nuit; il s'agissait d'une Hesketh Ford 308 pilotée par l’Australien Alan Jones novice en Grand Prix. Après cela il travailla comme journaliste pendant plusieurs années, le plus souvent pour le magazine Americain Road & Track. b.ecclestone,j.rindt,e.fittipaldiRobert Ramsay Campbell Walker mourut en 2002 à l’âge de 84 ans après un longue maladie. Aujourd’hui sa marque de whisky Johnny Walker appartient au groupe Diageo, un des sponsors de McLaren.

Dans les années cinquante le team de John Cooper était le team de Grand Prix le plus moderne en raison du concept du moteur central introduit par Alf Francis et Jack Brabham, mais Brabham et plus tard son pilote junior Bruce McLaren volèrent alors de leur propres ailes faisant ainsi évoluer de façon décisive leurs carrières à la fois en tant que pilotes et en tant que constructeurs. Ne restait chez Cooper, hormis la tradition, qu'une grande perte d’intérêt, un team manager dont on attendait trop en la personne de Roy Salvatori, un Maserati V12 aléatoire et avec John Surtees et Pedro Rodriguez deux pilotes utilisant les structures trop anciennes comme tremplin pour des tâches plus importantes. Rindt n’avait alors ni assez d’argent ni suffisamment d'opportunités pour une carrière plus brillante  pendant ces années extrêmement pénibles dues à la situation désespérée de l’équipe, mais il y avait en revanche beaucoup à apprendre non seulement en ce qui concerne la technique mais également au sujet des méthodes de business dans les courses de Grand Prix. A la fin de cette période Rindt reçu des offres de presque toutes les équipes et il choisit celle de Brabham, champion du monde des pilotes et des constructeurs pour 1966 et 1967. Dans l’ultime grande interview de sa vie avec la charmante Nisha Pillai de la BBC John Cooper affirma qu’il était très fier : vous savez, Ron Dennis fut mon apprenti. John Cooper mourut d’un cancer en 2000 à l’âge de 77 ans.

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Plus tard Ron Dennis ne fut pas franchement content lorsque les gens parlaient de cette période où il était mécanicien chez Cooper, car au début de années quatre-vingt dix il fut élu meilleur manager d’Angleterre devant tous les patrons de grands groupes. Dennis a fusionné McLaren avec son écurie Project 4 pendant la crise de la fin des années soixante-dix, il a amené en 1980 sur la grille la première voiture de course en fibre de carbone jamais construite et il a définitivement positionné McLaren comme le rival Britannique universel de Ferrari. Après s’être éloigné du mur des stands et avoir cédé son poste à Martin Whitmarsh depuis un bon moment, Dennis est le président du groupe McLaren tout entier.

Comparée à la mégalomanie actuelle dans le secteur du personnel, la structure des emplois dans les équipes de Grand Prix d’il y a quatre décennies était relativement évidente. En 1970 le Team Lotus avait seulement douze hommes sur un circuit. Dick Scammel en était le team manager, le chef mécanicien était Gordon Huckle, employé formé chez Rob Walker et sur la voiture de Jochen Rindt travaillait Eddie Dennis et aussi Herbie Blash âgé à ce moment-là de 21 ans, dont le vrai nom est Michael et qui est le fils d’un fermier et un fan du fameux club de football Manchester United. Plus tard Blash passa chez Brabham où il rencontra son patron Bernie Ecclestone. Quand Ecclestone vendit Brabham, fondée par Sir Jack, à des hommes d’affaire Suisses douteux, il fournit à son vieux copain Herbie un job à la F.I.A. Quand, obéissant aux règles strictes du protocole une fois le drapeau à damiers déployé, les trois premiers pilotes doivent amener leurs voitures au Parc Fermé, des millions de spectateurs devant leurs écrans de télévision peuvent découvrir à ce moment-là un petit gentleman rondouillard aux cheveux poivre et sel adepte d'une version modernisée de la coupe Beatles et portant une chemise bleu clair : Il s’agit d’Herbie Blash, qui organise la procédure  rituelle selon des règles précises tel un maitre de cérémonie à la Cour.

Au cours des années cinquante Bernie Ecclestone fut propriétaire d’une écurie une première fois. Il s'agissait de l’écurie Connaught. Après avoir vendu la firme un peu plus tard, il devint le manager de son pilote Stuart Lewis-Evans, un Britannique âgé à l’époque de 28 ans doté d’un fort talent et d’une grande sensibilité, qui plus tard rejoignit Vanwall, l’équipe qui connaissait le plus de réussite dans son propre pays. En 1958 toutes les équipes à l’exception de Cooper avaient encore des monoplaces à moteur avant et, bien entendu, il n’y avait aucune combinaison ignifugée. Pendant la phase finale du championnat du monde à Casablanca Aïn-Diab, la Vanwall de Lewis-Evans prit feu, le Britannique subit de graves brûlures entrainant sa mort trois jours plus tard, car du fait du manque de sièges dans les vols commerciaux, il ne put être acheminé b.ecclestone,j.rindt,e.fittipaldià temps vers le traitement médical indispensable à Londres. Après la mort de son pilote, Ecclestone fit le job de vendeur de voitures d’occasion, car il n’a jamais été ni un pilote à succès ni un constructeur.

Un jour au beau milieu des années soixante il rencontra Jochen Rindt qui, tel un flash de lumière ,avait battu l’élite de la Formule 2 Britannique, presqu’entièrement constituée de pilotes de Grand Prix

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06 février 2014 | Lien permanent | Commentaires (2)

Daytona 1970 : Porsche s’envole

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La Porsche 917 est née en 1969. Ce « phénomène », extrapolation de l’homogène 908 sa devancière, fut produit à 25 exemplaires comme la réglementation l’imposait. Elle représentait à l’époque l’aboutissement de l’offensive de la marque de Stuttgart dans la catégorie Sport. Un début de carrière difficile n’empêchera pas sa progression,  mise au point laborieuse qui l’acheminera vers une insolente réussite. Avec Daytona 70 débute son impressionnante série de succès.

par François Coeuret

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La présentation de la 917 est l’occasion d’annoncer la couleur. Exposée au salon de Genève début mars 69, elle fait sensation. L’ambition de Porsche se résume quelques semaines plus tard  par un  spectaculaire alignement des vingt-cinq unités requises pour l’homologation de la voiture en endurance. La 917 est gréée de sa « langheck » (longue queue) pour l’occasion, celle-là même qui va poser de sérieux problèmes de stabilité à haute vitesse. Les pilotes qui vont la déverminer lors des premiers tests se plaignent  d‘une tenue de cap particulièrement aléatoire. L’exercice s’apparente à un essuyage de plâtre en bonne et due forme. L’adoption d’une  «  kurzheck » (queue courte) améliore la situation mais son excès de portance est avéré. Lors des 1000km du Nürburgring, les pilotes maison lui préfèrent la saine 908. Piper-Gardner prennent courageusement en charge la 917.

 

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David Piper-Frank Gardner, Nürburging 1969

 

Revenons à sa genèse. Le Châssis de la 917 est conçu sur l’exigence de la légèreté. Il est tubulaire, réalisé en alliage léger. Le moteur est un 12 Cylindres ouvert à 180°  refroidi par air, la spécialité de la marque. Oserait-on dire qu’on ne s’est pas foulé pour sa conception ? On a repris l’alésage et la course du groupe de la 908. Pour simplifier il est le résultat de l’adjonction d’un « demi 8 cylindres » au 8 cylindres 3L  d’origine. On a affaire au pragmatisme germanique. Pourquoi  redessiner un nouveau moteur alors qu’il suffit de reprendre l’excellente base du moteur de la 908 ? La cylindrée s’élève donc à 4500 cm3, la puissance tourne autour des  530  CV.

 

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La saison 1970 va donc débuter après un long épisode de mise au point côté aérodynamique. D’autres postes ont été travaillés, le renforcement des freins, de la boîte de vitesse et la fiabilisation moteur. Sur les conseils de David Piper, l’un des pilotes d’essai les plus assidus, le nouveau capot arrière court s’inspire de celui de la Lola T70.  Le résultat s’avère enfin efficace. La version capot arrière profilé a également été revue pour l’épreuve mancelle.

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En ce début de saison 70 un duel prometteur s’engage en Floride pour la première épreuve du Championnat mondial. Ferrari, engagé en 3L avec son proto en 69, a anticipé la saison suivante. L’usine a conçu sa 512S en vue de contrer l’offensive germanique. La belle rouge possède des caractéristiques la différenciant notablement de sa rivale. Les variantes se situent au niveau du 12 cylindres, un 5L en V ouvert à 60°, de puissance supérieure (550CV), refroidi par eau. Le système de refroidissement volumineux lié au châssis cage acier renforcé par des panneaux alu confèrent à cette voiture un handicap poids de près d’une centaine de kg. Autre inconvénient, l’architecture moteur de l’italienne la pénalise par un centre de gravité plus haut que celui de sa concurrente.

 

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Enfin la Ferrari ne s’est pas aguerrie en compétition comme la Porsche qui a bataillé pendant 6 mois sur les circuits. Si la compétition peut apparaître équilibrée en visualisant les deux protagonistes qui ne manquent pas d’allure, les détails de leur conception tendent à desservir l’italienne côté dynamique. Cette dernière  par contre est plus puissante. La piste va bientôt rendre son verdict. 

Sur le continent américain,  la première manche du Championnat Mondial d’Endurance va engager le premier duel italo-germanique. Chez Porsche on a mis les œufs dans deux paniers. La récente association avec John Wyer dont l’expérience est précieuse permet à Porsche de disposer d’une seconde équipe en parallèle avec l’usine qui présente une voiture  sous l’égide de Porsche Autriche avec  Elford-Ahrens au volant.     

 

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L’équipe Gulf Wyer engage 2 voitures. Rodriguez associé au méconnu Kinnunen et Siffert-Redman piloteront les 917 K livrée bleue azur. Dans la même optique  Ferrari  concourt avec ses 512S usine pour Ickx-Schetty, Andretti-Merzario et Vaccarella-Giunti ainsi que des privées. Le N.A.R.T présente une 512S aux mains de Gurney-Parsons  tandis que la Scuderia Picchio Rosso engage aussi une 512S pour Manfredini-Moretti. En catégorie Sport, les autres voitures présentes ne sont pas de l’année : Lola T70 et Ford GT 40. Côté Sport Prototype 3L,  l’équipe Matra va tenter de damer le pion aux puissantes Sport. Trois  pilotes de F1 et un futur sont aux commandes des 650 : Brabham-Cevert et Beltoise-Pescarolo. Dans cette catégorie on trouve de nombreux privés à bord de Ferrari 312P, Porsche 908, 906 et une Chevron B 16. Les GT et Tourisme forment  le gros du plateau. Parmi elles, les voitures les plus rapides devront se frayer un chemin.  Dans ces dernières catégories, les plus performantes se nomment Chevrolet Corvette, Camaro et Porsche 911.

 

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Samedi 31 Janvier les qualifiés vont s’élancer pour deux tours d’horloge sur le Speedway de Daytona. Pas de surprise aux essais, les 917 et 512S ont largement dominé. Andretti-Merzario qui ont arraché la pole et Siffert-Redman  occupent la première ligne devant Rodriguez-Kinnunen et Elford-Ahrens. Suivent les autres 512S. Les Matra 650 sont en embuscade mais avec leur moteur issu de la F1 le problème est de durer. Un bel entraînement pour Le Mans cependant.

Après le tour de lancement, Siffert prend la tête devant Andretti alors que Rodriguez se porte dans le sillage de l’américain. Le mexicain perd un peu de terrain dans la partie routière du circuit mais recolle la 512 sur l’anneau. Il prend finalement le meilleur sur l’américain. Ickx est parti calmement et suit un groupe de protos 3L. Les 512S ravitaillent cinq tours avant les Porsche et Ickx s’arrête aussi pour un problème de roue. Giunti ouvre le premier abandon d’une Ferrari de pointe, il heurte le mur sur le banking et détruit ses suspensions en rentrant au stand. Plus tard Redman équipier de Siffert explose un pneu et perd 15 minutes au stand. La Porsche N°2 prend la tête. Celle de Siffert est ensuite victime d’un amortisseur puis de son embrayage. Rodriguez-Kinnunen augmentent leur avance. Dans la nuit Ickx, gêné par des GT, heurte le mur du banking. Sa voiture trop endommagé abandonne. La Matra de Beltoise-Pescarolo tient une belle quatrième place que des ennuis d’allumage vont gâcher.  Deux Ferrari usine ont disparu et Ickx remplace Merzario sur la 512 usine restante. La 917 « Autriche » casse une suspension qui l’oblige à un long arrêt, une fuite de réservoir la ralentit ensuite.

 

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La longue nuit vaut des soucis pour Siffert, encore un amortisseur. Andretti s’arrête au stand en panne de feux arrière. Les Matra souffrent, démarreur pour l’une, allumeur pour les deux. Elford-Ahrens finissent par renoncer avec leur fuite. Au petit matin la Porsche N°1 de Siffert casse son embrayage, longue réparation en vue. Rodriguez-Kinnunen, épargnés d’ennuis, mènent alors largement.

Pour l’anecdote  Rodriguez demanda à son équipier de rouler tranquille. Le manager de Wyer le remplace par Redman jugeant Kinnunen trop lent ! Kinnunen qui ne parle pas anglais n’a pas expliqué sa relative lenteur ! Après mise au point les choses rentrent dans l’ordre. Siffert a repris la ronde avec un embrayage neuf et attaque une belle remontée. Les Matra, ralenties par leur soucis d’allumage, vont terminer cependant toutes deux la course (10e - 18e). La Ferrari usine restante, deuxième après le long arrêt de Siffert-Redman, connaît des problèmes de châssis (les mécaniciens ont dû procéder à des soudures) et d’amortisseur. Pour ces deux voitures, la fin de course va se conclure en sprint. Siffert se déchaîne et prend  le meilleur sur le fil. 

 

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La Porsche N° 2  de Rodriguez-Kinnunen triomphe devant la voiture sœur N°1 de Siffert-Redman. La Ferrari N°28 de Andretti-Merzario-Ickx complète le podium. Au bilan, la Porsche 917 a largement dominé cette première manche.   

Ferrari  remportera  la course suivante à Sebring puis Porsche aura la mainmise sur le reste du Championnat. La 917 coiffe haut la main la couronne mondiale et récidive en 71 après avoir subi une augmentation de cylindrée (5 Litres). La règlementation à partir de 72 l’écarte du Championnat Endurance. Elle migrera vers la Can Am, amassant de nouveaux succès. Ce palmarès élogieux lié à son impressionnante allure feront d’elle une voiture de course mythique.

 

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- Photos ©D.R.  

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27 janvier 2018 | Lien permanent | Commentaires (3)

Les cinq Grand Prix de Monaco de Lorenzo Bandini

Bernard Bianconi est un « vrai » collectionneur. Il n'a pas son pareil pour classer, ranger, regrouper par thèmes. Quand il s'attaque à un sujet, il en explore tous les volets.

Raison de plus pour l'accueillir dans Memories that Stand Out...

lorenzo bandini

1. 03/06/1962 Ferrari 156 n°38


Aux essais Ferrari organise un « volant » qui oppose l'italien à l'adolescent mexicain Ricardo Rodriguez, Lorenzo n'a aucun mal à s'imposer et se qualifie en 10e position pour terminer sur le podium de son premier GP en Principauté, 3e derrière McLaren et Phil Hill.

lorenzo bandini

2. 10/05/1964 Ferrari 156 n°20


Qualifié en 7e position, Lorenzo est 4e derrière G.Hill, Clark et Ginther quand il est trahi par sa transmission au 69e tour.

lorenzo bandini

3. 30/05/1965 Ferrari 1512 n°17


Malgré une météo capricieuse qui perturbe les essais et cet italien né en Afrique, il s'élance le dimanche depuis la 2e ligne pour monter au final sur la 2e marche du podium derrière Graham Hill, devançant Stewart et Surtees.

lorenzo bandini

4. 22/06/1966 Ferrari 246 n°16


La formule 3 litres vient d'entrer en vigueur et Ferrari ne dispose que d'une voiture de cette cylindrée confiée à Surtees. Bandini tirera un excellent parti de la 2.4 L puisque s'élançant de la 3e ligne il terminera à nouveau deuxième, derrière Jackie Stewart cette fois.

lorenzo bandini

5. 07/05/1967 Ferrari 312 n°18


Lorenzo Bandini se présente cette année-là en leader de la Scuderia, et à ce titre aux essais il emmène dans son sillage son nouveau coéquipier Chris Amon qui a du mal à digérer le tracé monégasque. Après s'être fait subtiliser la pole par Brabham, il propulse sa Ferrari en tête depuis la première ligne. Il pointe encore en 2e place au 82e tour, quand la Ferrari se retourne sur les bottes de paille de la chicane et s'embrase. Très gravement brûlé Lorenzo Bandini rendra son dernier soupir le 10 mai à l'hôpital Princesse Grace de Monaco.

Bernard Bianconi

- Photo 2 ©BrianWatson

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03 mars 2015 | Lien permanent | Commentaires (1)

GP de France F1 1971

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La France vient tout juste de renouer avec son Grand Prix de F1 après dix années d’abstinence depuis la dernière course disputée sur le circuit de Nevers Magny-Cours. Que de changement si l’on compare avec le premier Grand Prix disputé en 1971 sur cette piste qualifiée à l’époque d’ultra moderne. Mutation qui est loin de charmer les « anciens » passionnés ayant vécu cette époque aussi cruelle qu’attachante. Ceci est une appréciation personnelle, forcément subjective…

par François Coeuret

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Préambule :

1971 : après deux années passées sur le circuit de Clermont-Ferrand, la Formule 1 s'installe dans le Var près du Castellet sur la nouvelle piste créée par Paul Ricard; le père de la célèbre boisson anisée s'était-il découvert un intérêt soudain pour le sport automobile ? A moins qu'une opération promotionnelle ne soit cachée derrière cette réalisation ? Le chantier mené au profit des passionnés de compétition mécanique fut l'occasion d’associer au breuvage jaune une image dynamique à défaut de lui fournir un alibi côté respectabilité. Ne soyons pas mauvaise langue, l'homme est un mécène qui s'est investi dans d'autres domaines.

 

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Le résultat est élogieux. Le circuit fut inauguré en avril 1970. Un tracé élaboré au départ par Charles Deutsch mais modifié par Jean-Pierre Paoli, inspiré et validé par plusieurs pilotes. Jean-Pierre Beltoise et François Mazet furent directement impliqués dans le projet. François Chevalier en prend la direction lorsque JP Paoli se lance dans la création d’une écurie. La piste présente un développement varié, des dégagements généreux, une longue ligne droite lui donnant du caractère. La sécurité a grandement progressé, le circuit devient une référence dans le domaine. Le tarmac est complété d’infrastructures diverses et modernes : Salle de presse, restaurant, loges sponsors, vaste paddock, piste d'aviation à proximité. La France passe à l'ère moderne et le petit « cirque » de la F.1 se retrouve comme coq en pâte au pays des cigales... Mais petit bémol côté spectateurs, les tribunes ne sont pas assez nombreuses et la butte de terre qui longe la piste est conçue à minima pour le consommateur de petit(s) jaune(s).

 

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Les forces en présence :

Stewart est en tête du Championnat devant Jacky Ickx. L’écossais semble parti pour une fructueuse saison à l’image de celle de 1969. La Tyrrell est efficace, bien née, rappelons-le encore une fois dans la lignée de la Matra MS80. Ferrari est en mesure de contester la domination de l’anglaise. Andretti a remporté la première course de l’année et Jacky Ickx le précédent Grand Prix en Hollande. Le belge est associé régulièrement au rapide Clay Regazzoni. Cevert a entamé sa première saison complète et doit encore faire ses preuves. Les écuries BRM, March, Matra, Mc Laren endossent le rôle d’outsiders. Lotus, Surtees, Brabham sont à la peine en ce début de saison.

 

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François Mazet - March 701 "Jo Siffert Automobiles"

 

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 Max Jean - March 701 "Franck Williams"

 

Enfin on doit signaler les premières et uniques apparitions en Grand Prix de deux espoirs français, le sympathique pilote marseillais Max Jean ainsi que le champion de F3 1969 François Mazet, futur producteur de citrons à Menton, à quelques pas d'ici.

 

françois cevert,jackie stewart,beltoise,matra

 

françois cevert,jackie stewart,beltoise,matra

 

Les essais :

La Tyrrell de Stewart arbore un bouclier avant adapté à la longue ligne droite du Mistral. L’équipe officielle March a adopté le V8 Alfa Roméo pour Peterson, son pilote de pointe, en place du Cosworth. Les factures de révision de ce dernier grèvent le budget de l’équipe qui a trouvé un partenaire moins onéreux. La maintenance des moteurs est offerte par les italiens. Matra veut se mettre en évidence à l’occasion de son Grand Prix national, le V12 a été remanié côté culasses et admission. Andretti qui court aux US est absent. Stewart domine les Ferrari malgré leur V12. Leurs pilotes se qualifient en première ligne à côté de l’Ecossais. Graham Hill et Rodriguez suivent. Le Mexicain a exploité le parfait équilibre de sa BRM tandis que le Britannique montre qu’il est encore dans le coup. On pointe ensuite Siffert, Cevert, Beltoise, Amon, Stommelen (sur Surtees) puis Hulme, Peterson, Surtees. Les Lotus de Fittipaldi et Wisell sont larguées (17e et 15e temps).

 

françois cevert,jackie stewart,beltoise,matra

Virage de la Sainte-Baume

 

La course : 

Chaud soleil provençal au départ. Stewart prend la tête, poursuivi par la Ferrari de Regazzoni et la BRM de Rodriguez. Ickx s’est trouvé englué tandis que Cevert dont le départ a été moyen remonte, il passe les Matra. Hill fait bonne figure après un départ laborieux en conquérant la cinquième place. Siffert exploite son V12 et entame aussi une remontée de même que Fittipaldi parti très loin sur la grille. Le leader a déjà sept secondes d’avance au cinquième tour. Côté propulseur il est le mieux servi par Ford, son Cosworth « série 11 » tourne du feu de Dieu… Ickx casse rapidement son moteur. Les Matra bien parties n’assurent pas leur position du premier tour d’autant que Beltoise n’a pas eu de nez quant à son choix de pneus durs. Jean Luc Lagardère fait la moue… Regazzoni glisse sur l’huile répandue par Peterson qui a explosé son Alfa, il casse un triangle en heurtant le rail. Rodriguez maintenant second tombe en panne d’allumage permettant à Cevert de passer deuxième. C’est la dernière fois que le public français voit évoluer le Mexicain qui périra le weekend suivant sur le circuit du Norisring en Intersérie.  Le premier doublé Tyrrell semble se profiler mais le moteur du jeune Français émet un bruit inhabituel en raison d’un échappement défectueux. La Tyrrell tiendra bon, la fin de course est animée par Siffert et Fittipaldi qui bataillent pour la troisième place. Le Brésilien sort vainqueur de la joute. Cevert est radieux sur son premier podium, il concrétise les espoirs placés en lui et va réaliser une belle seconde moitié de saison ponctuée par une victoire aux USA. Stewart sera sacré champion haut la main, 29 points d’avance sur Peterson la révélation de l’année.    

 

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 - Illustrations ©D.R.

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27 juin 2018 | Lien permanent

Le petit Mozart de la F1

Venu d'outre-Quiévrain, Alain Hawotte, comme certains de ses illustres compatriotes, est un adepte de la ligne claire (*) et du mot juste. Son trait de plume est net et précis, ses récits ont du rythme et de l'humour. Tous les ingrédients sont donc réunis pour savourer ces passionnantes histoires belges, à ne pas confondre avec les mémoires d'Ostende...

(*) en admettant que ce terme puisse s'appliquer à des écrits.

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Le petit Mozart de la F1

Pour Ricardo, même si la comparaison est courue et ne convient que rarement, elle s’impose d’elle même.
Ricardo jeune homme ténébreux, doué, charmeur plein de projets tout en ayant déjà accompli en quelques années ce que d’autres ne feront pas en une vie entière...
Ricardo, champion cycliste à 10 ans, faute de pouvoir l’être à moto si jeune, Ricardo, champion moto à 14 ans, faute de pouvoir l’être en voiture et Ricardo qui s’engage au Mans en sport sur Ferrari avec son frère et qui est refusé au départ à 17 ans en ayant pourtant 2 ans de conduite de grosses sports chez lui, là bas au Mexique...

Il revient l’année suivante et manque de gagner mais la mécanique Ferrari casse...

A 19 ans, en 1961, Ricardo intègre la Scuderia Ferrari, trop jeune pour résister aux pressions d’une équipe d’usine et de tout un peuple.
Le GP d’Italie sera son premier GP, aux essais les critiques pleuvent, Ricardo conduit comme un dément, "un dément génial mais dangereux" dira Von Trips qui, ironie du destin ne sait pas encore qu’il prendra demain son dernier départ...
Alors Ricardo court, court encore et toujours, passe en trombe à Spa, dompte le raidillon sans sourciller... enfin sans que lui ne sourcille car les autres le considère toujours comme dangereux pour lui et surtout pour les autres, la foule l’adore car elle pense que si ses pairs l’estiment dangereux, elle comprend surtout bien vite qu’il est dangereux pour l’aura des princes et des rois en place...
Riccardo va vite, tellement vite.

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GP du Mexique 62, Ferrari n’est pas là alors Ricardo prend place dans la Lotus bleu nuit, comme le crépuscule, de Rob Walker !
Il est chez lui, il est en pôle, mais, soudain, la Lola d’un outrecuidant Surtees prend la pôle, sa pôle… Alors, fébrilement, Ricardo saute du muret des stands et des bras de sa femme, et oui, déjà il était marié, il ajuste son casque jaune orné du drapeau vert blanc rouge, à sa façon, légèrement incliné vers l’arrière, et bondit fébrilement dans sa Lotus, une Lotus qui vole sur la piste, une Lotus qui survole les difficultés, un piano duquel le jeune artiste tire les plus belles notes de glissades en rugissements suraigus, et voilà le bolide qui aborde « Peralta » la courbe rapide avant les tribunes, la Lotus entre bien vite dans la courbe, très vite… trop vite, Mozart joue de son volant, contrebraque, mais rien à faire, la partition échappe soudain à l’artiste et la Lotus désemparée s’en va se disloquer dans les protections... Mozart ne jouera plus jamais...

Jeune, trop jeune, rapide, trop rapide, fougueux, trop fougueux, orgueilleux, trop orgueilleux, mais doué, tellement doué... Tel était RICARDO RODRIGUEZ...

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Signé Alain Hawotte

 

- Images ©DR

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26 juin 2014 | Lien permanent | Commentaires (1)

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