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19 janvier 2025

24 H de Daytona 1971: Penske défie Porsche

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Sur le Speedway américain en cette fin janvier les observateurs ont-ils l’impression de vivre la fin d’une époque ?

Celle des fantastiques prototypes Sport dotés de copieux moteurs 5L et de superbes carrosseries. Si ce n’est le cas, l’heure de la fermeture sonne pourtant bien. Tel est le souhait de la FIA qui va redistribuer les cartes la saison prochaine.

François Coeuret


512m penske,24h daytona

Les concurrents

La Ferrari 512M traitée par Penske, pilotée par Donohue et Hobbs, est considérée comme une super 512. Penske a acheté une 512S, un châssis démantelé (1040) provenant d’une équipe privée US que l’écurie a fait reconditionner en Italie avec la définition aérodynamique « M ». De retour chez Penske elle est optimisée au niveau moteur par Traco (+35 CV), le châssis est amélioré, l’aileron arrière est plus volumineux, un système de ravitaillement rapide type aviation y est adapté. Ce peaufinage mécanique a transcendé la création de Maranello. La FIA s’est montrée très conciliante vis à vis des transformations menées sur cette voiture qui s’éloigne de la création de base : la 512M (Modificato). Extérieurement elle ressemble cependant à la voiture « client » sortie d’usine*.

Des Ferrari 512 plus conventionnelles sont présentées par le N.A.R.T. Deux 512M aux mains de Revson-Posey-Parson et Gregory-Young, une 512S pour Bucknum-Adamowicz, une ancienne 312P pour Chinetti jr-Garcia Veiga-De Cadenet. Deux autres 512S, espagnole et belge, figurent sur la liste des engagés : Ecurie Montjuich (Merzario-Juncadella) et Swaters  (Gosselin-De Fierlant).

 

512m penske,24h daytona

Porsche engage quatre 917K 5L réparties sur deux écuries. Chez Wyer Rodriguez est associé à Oliver tandis que Siffert partage sa voiture avec Bell. Chez Martini Racing on retrouve Elford-Van Lennep tandis que la seconde 917 est menée par Marko et Lins. Parmi les protos deux jolies Chevron B16 Ford concourent (Baker Motor pour Baker-Grossman-Brown-Reynolds) et une seconde, française engagée par Jean Pierre Hanrioud associé à Jean Sage.

Les GT participent naturellement en nombre, les plus en vue sont les Corvette, Chevrolet Camaro, Ford Mustang opposées aux Porsche 911S/T et 914/6. On relève aussi parmi les américaines deux Shelby GT 350, une Pontiac Firebird  et une spectaculaire Dodge Dart munie de son excentrique aileron arrière.

Cette dernière ne se qualifiera pas à l’issue des essais durant lesquels la Penske décroche la pole devant Rodriguez-Oliver, Revson-Posey-Parson sur la 512M NART et Siffert-Bell au volant de la seconde Gulf Porsche. Le combat 512/917 se prépare.

 

512m penske,24h daytona

La course

Au lâcher de la meute la Ferrari 512M Penske établit un rythme très élevé comme si elle partait pour un sprint de quelques heures. Elle tient effectivement la tête pendant deux heures quarante. Mais des soucis électriques l’obligent soudain à deux arrêts : un fil d’alternateur cassé puis des feux de stop inopérants qu’il fallut rétablir. L’équipage perd quatre tours dans l’affaire. A 18H la Ferrari Penske est en troisième position derrière les deux Porsche Gulf qui ont profité de l’aubaine. Rodriguez-Oliver mènent, cependant la seconde voiture de l’équipe (Siffert-Bell) rentre tout à coup au stand traînant derrière elle une fumée bleue inquiétante. Le moteur a lâché. 

A peine une heure plus tard c’est au tour de la Ferrari 512S de De Fierlant-Gosselin de subir une casse moteur. 21 heures, alors que la luminosité baisse sur le speedway, la 917K de Rodriguez-Oliver en tête est poursuivie par la voiture sœur du Martini Racing pilotée par Elford-Van Lennep tandis que deux Ferrari pointent derrière. La Penske troisième précède la 512S NART de Bucknum-Adamowics.

 

512m penske,24h daytona

La nuit s’est installée sur Daytona et la ronde des protos 5 litres va être troublée par un incident. Vic Elford éclate un pneu sur le banking, la voiture heurte le mur. Donohue qui se présente derrière ralentit à la vue du nuage de poussière mais derrière la Porsche 911S de Perry qui n’a pas suffisamment décéléré heurte la Ferrari bleue qui tape le mur. Perry vient ensuite percuter la 917 d’Elford arrêtée près du tablier. Heureusement le pilote anglais est rapidement sorti de son auto. La 512M regagne péniblement son stand avec de gros dégâts de carrosserie et de suspension. Le pilote américain de la Porsche GT a effectué des tonneaux après le choc final. Il est conduit à l’hôpital pour passer des radios. Chez Penske une partie de mécanique commence dans un ballet bien réglé. La suspension est remise en état et le ruban adhésif vient soigner la carrosserie. Cependant une heure et quinze minutes sont perdues ! La nuit est bien entamée lorsque le calme revient avec un nouveau classement : la Porsche bleu clair mène la meute devant la Ferrari de Bucknum à distance respectable suivie par la 512M Penske qui doit entreprendre sa remontée au classement. L’étonnante Ferrari 312P NART de Chinetti jr pointe quatrième alors que la Corvette Owens Corning de Delorenzo roule en excellente position, classée cinquième.

 

512m penske,24h daytona

Vingt-cinq voitures sont encore en course au milieu de la nuit. Des averses se présentent alors, obligeant les pilotes à changer de gommes. La 512 Penske cède la troisième place à la 312 de Chinetti jr-G.Veiga à la suite d’un tête à queue en pneus slick sur la piste humide. L’équipage anglo-américain reprend sa position quelque temps plus tard. L’objectif de prendre le meilleur sur la 512S NART seconde est problématique au vu du retard accumulé. Mais justement la voiture de Bucknum-Adamowics a des ratés et crachent des flammes qui augurent un problème de ressorts de soupape. Les pilotes qui l’ont cravachée sont contraints de réduire les montées en régime. Ils abandonnent l’espoir de revenir sur la 917 dominatrice. 

L’avance de celle-ci est conséquente. Au matin elle précède la 512S NART, la 512M Sunoco, la 312P et toujours la Corvette Owens Corning de Yenko. Rodriguez-Oliver, forts du bel écart les séparant de leurs poursuivants, semblent se diriger vers la victoire.

Mais rien n’est jamais acquis d’avance.  Oliver rentre au stand plus tôt que prévu en cette matinée. Sa transmission est bloquée sur un rapport supérieur. Le stress s’empare du box Wyer. Il faut intervenir sur la boîte de vitesse et changer les pièces défectueuses. Les mécanos opèrent sous les regards compatissants de Rodriguez et Oliver. Pendant ce temps la 512 NART regagne bien sûr du terrain.

 

512m penske,24h daytona

Après une longue intervention la Porsche Gulf réintègre la piste. Le stand Wyer constate un retard de deux tours et demi sur Bucknum-Adamowics qui tiennent le coup alors que Donohue-Hobbs ne sont plus eux-mêmes qu’à deux tours de la Porsche. Il reste deux heures de course.  Rodriguez est chargé de passer à l’offensive. Il tourne entre dix et douze secondes plus vite au tour que les pilotes de la Ferrari de tête. Le « petit mexicain » mettra 33mn pour revenir dans le tour et les roues de la rouge. De brèves averses vont perturber la fin de course obligeant à monter des pneus pluie puis à revenir aux slick. La Porsche Gulf qui a repris la tête va même céder encore une fois sa position au petit jeu des arrêts car la NART conserva les pneus lisses pendant les courtes averses. A 15H la Porsche azur coupe la ligne en vainqueur avec un peu plus d’un tour d’avance sur la Ferrari du NART. Donohue-Hobbs ont assuré la troisième place suivis de la Corvette de Delorenzo-Yenco-Mahler qui devance finalement la Ferrari 312P de Chinetti jr-De Cadenet-Garcia Vega. Wyer triomphe pour la seconde fois consécutive, il doit sa victoire autant à ses pilotes qu’à ses mécaniciens. 

 

512m penske,24h daytona

Drame sur l’aéroport

Sur l’aéroport international jouxtant le circuit survient un grave incident pendant la réparation de la transmission de la Gulf Porsche. Un avion privé subit une perte de puissance juste après son décollage. Il plonge tout à coup et s’écrase provoquant un énorme nuage de fumée noire. Le public interloqué et choqué observe la boule noire s’élevant dans le ciel. Il faut quinze minutes aux pompiers pour circonscrire les flammes dans lesquelles les passagers ont succombé.

 

512m penske,24h daytona

La légende de Daytona

En 1972 l’épreuve de Daytona se courut sur 6 Heures avec les protos 3 Litres. La course perdit ainsi beaucoup de sa superbe dans cette configuration. Elle reprit ensuite le format 24 Heures avec des enjeux beaucoup moins attractifs que les précédents, ceux qui marquèrent l’époque des géants de l’endurance. 

* Une quinzaine de 512S furent transformées en M (Modificato). Si Ferrari avait adopté pour tous ses clients l’évolution « Penske » il est évident que Porsche aurait eu plus de soucis avec les 512M. Maranello était probablement trop occupé avec la mise au point de la 312 PB.

 

512m penske,24h daytona

- Illustrations  ©DR, gettyimages


Commentaires

Ah, m'sieur dames, quelle époque que cette époque-là : Ferrari 512 et 312, Lola T70 (pas la plus titrée mais celle que je préférais dans mon Panthéon esthétique automobile), et la fantastique Porsche 917 ! Il y avait aussi les Alfa 33, les jolies Chevron et les légères et françaises Alpine. Chez les GT il y avait les tonitruantes Corvette et les Cobra, pas plus silencieuses, sorte de mariage (réussi !) de la carpe et du lapin, caisse légère de roadster britannique et gros V8 américain ! Et, last but not least, toutes les Matra, issues de la volonté d'un patron exceptionnel : Jean-Luc Lagardère. Ah, m'sieur dames, quelle BELLE époque que cette époque-là.......

Écrit par : Raymond Jacques | 19 janvier 2025

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