13 juin 2020
Improbable scénario - Le Mans 2016
A quelques minutes de l’issue de ces 24 Heures nous sommes postés devant les tribunes face à la ligne d’arrivée. La Toyota de tête N°5 qui vient de franchir la chicane du raccordement stoppe brutalement sur la piste face à son stand. Stupéfaction suivie d’un silence dans les rangs. Inimaginable ! « Il s’arrête pour attendre la voiture sœur en vue du final ! » Impossible !... Le temps s’écoule … La voiture repart,... Et le drapeau à damier tombe au passage de la Porsche N°2... C’est un rêve ? ...
François Coeuret
Chicane Dunlop. Photographes, pro & amateur
Sur le circuit de la Sarthe nous retrouvons les protagonistes de l’an passé pour un nouvel affrontement : Porsche, Audi et Toyota, toutes les trois en LMP1 Hybride. Six protos de pointe, deux par constructeur, accompagnés des Rebellion et de la CLM P1 en catégorie LMP1 Non hybride. Parmi les vingt-trois engagés de la classe LMP2 on compte les Alpine, Ligier, Oreca, Morgan pour ce qui concerne les autos construites en France. Ces protos représentent le gros de la troupe complétée des Gibson et SMP BR01. Il est à noter que la structure SRT41 by OAK Racing aligne une Morgan dont l’un des pilotes est handicapé. Frédéric Sausset, quadri-amputé, est appareillé pour piloter et va tenter un challenge préparé depuis plus de deux ans. Les catégories GTE Am et GTE Pro fournissent un plateau conséquent de près de trente voitures. Les Porsche, Ferrari, Aston Martin, Chevrolet Corvette vont s’affronter en compagnie des Ford GT qui marquent leur retour sur la piste mancelle. Le Ford Chip Ganassi team a mis le paquet en présentant quatre nouvelles voitures dont la silhouette rappelle la célèbre GT40. Cette année marque le cinquantième anniversaire de la première victoire du constructeur américain au Mans. Ford compte bien fêter l’événement en s’imposant au classement Grand Tourisme Pro.
Nous partons à midi le samedi car le fiston n’a pu se libérer plus tôt de son job d’été. Nous comptons bien arriver pour le départ à 15h. Il nous faut environ deux heures trente pour rallier le circuit. En route nous essuyons de violentes averses orageuses et voyons qu’à l’horizon les nuages et donc la pluie ne doivent pas épargner Le Mans. De fait nous passons l’entrée du circuit peu avant le départ, la piste est détrempée. Cependant la pluie stoppe miraculeusement, mais la direction de course lance quand même la course sous Safety car. C’est une première depuis la naissance de l’épreuve. Cette longue procession n’est pas très excitante et aux chicanes Ford où nous sommes postés depuis ce pseudo départ les spectateurs sifflent à chaque passage. Nous admirons tout de même le défilé à vitesse réduite de ces belles machines dont les plus performantes sont des bijoux de technologie, à la pointe de la récupération d’énergie.
Frédéric Sausset - Morgan Nissan LMP2
Le vrai départ s’éternise, on voit pourtant que la piste sèche et semble praticable…
Je songe à certaines éditions particulièrement arrosées suivies dans ma jeunesse sur les magazines où à la télé…1966, 1968, 1970… Les pilotes composaient avec les conditions de piste, la pluie ne les arrêtait pas… Autre temps…
Enfin les voitures sont libérées après ce long intermède. Les Porsche parties en pole font d’abord illusion, suivies de près par les Toyota. Les Audi tentent de suivre le rythme mais elles vont lâcher prise. A notre grande surprise les Toyota prennent la tête, elles ravitaillent après leurs adversaires. Leur sobriété alliée à une belle vitesse de pointe les propulse aux avant postes, ce que nous vérifions sur les écrans géants dans le secteur des Hunaudières. Une des deux Audi rentre au stand en début de course, elle est poussée dans le box, un mauvais présage… Les mécanos doivent changer un turbo et elle sera irrémédiablement distancée au classement. Porsche n’est pas épargné par les soucis, la N°1 victime de surchauffe va quitter le groupe des leaders. A partir de là nous assisterons à un combat serré entre les deux Toyota TS050 et la Porsche 919 N°2.
La nuit est tombée, la lutte est tendue à la faveur des rythmes de ravitaillement des deux équipes… Au petit matin, après un peu de repos, nous reprenons le fil de la course qui est encore serrée. Au cours de la matinée la Toyota N°5 va cependant s’imposer plus solidement en tête. En LMP2 l’Alpine A460 Signatech domine et va remporter le groupe. En GTE Pro Ford va s’imposer non sans avoir été inquiété par la véloce et pugnace Ferrari 488 de Risi Competizione. Les Ferrari 458 dominent les Porsche, Aston et Corvette en GTE Am. La Morgan de Tinseau-Bouvet-Sausset finira 38e après 315 tours couverts. Frédéric Sausset a réalisé son rêve, il sera très applaudi sur le podium.
Revenons à la fin de course. Alors que Toyota s’achemine logiquement vers son premier succès au Mans, fort mérité compte tenu de la belle prestation des protos nippons, un scénario incroyable va se dérouler : la Toyota N°5 s’arrête sur la piste à hauteur de son stand dans les dernières minutes de course. Les spectateurs placés devant les tribunes dans ce secteur, dont nous sommes, sont interloqués. Un bref silence s’instaure, c’est inimaginable ! On pense un moment que Nakajima attend son équipier pour un regroupement mais cela s’éternise et la voiture repart péniblement. Quelques instants plus tard le drapeau s’abaisse au passage de la Porsche N°2 devant un public ébahi. Les supporters de Porsche n’ont pas réagi tant la surprise est énorme ! A son passage en seconde position la Toyota N°6 va recevoir des salves d’applaudissements ainsi que sa malchanceuse jumelle qui rentre d’un tour final bouclé au delà du maximum réglementaire. L’auto s’est une nouvelle fois arrêtée sur la piste devant son stand, cette fois-ci définitivement. Nakajima victime d’une perte de puissance aussi subite que majeure sort KO de son habitacle accompagné d’un mécano : Un spectacle irréel.
Porsche 919. Marc Lieb - Romain Dumas - Neel Jani
Les podiums par catégorie suivent et nous ramènent à la réalité. Le circuit se vide peu à peu … Nous songeons tout de même que peu de scénaristes auraient osé imaginer un tel final au terme d’une course de 24 heures.
Signatech Alpine
Ford GT Chip Ganassi Racing
- Images ©F.Coeuret
10:00 Publié dans a.davidson, k.nakajima, s.buemi | Tags : 24h mans 2016 | Lien permanent | Commentaires (5) | Facebook | |
Commentaires
Écrit par : Raymond Jacques | 14 juin 2020
Bientôt, je l'espère, les autos du Mans ressembleront un peu plus à la Ford GT.
Écrit par : Francis | 14 juin 2020
Écrit par : F.Coeuret | 14 juin 2020
Écrit par : Raymond Jacques | 15 juin 2020
une victoire, c'est une victoire, même obtenue de cette façon.
mais la façon de faire devant les cameras de télé, c'était trop too moche.
j'avais honte pour eux
Écrit par : Bruno | 11 août 2021
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