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17 février 2023

Les trois vies de Gérard Larrousse

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Trois époques qui déterminent les trois vies de l’homme originaire de Lyon : Pilote, chef d’écurie, gardien de la mémoire de la course et des 24 Heures du Mans… 

Gérard Larrousse, jeune adulte, poursuit des études à l'école supérieure de commerce à Paris. Il contracte le virus du sport automobile en participant un été au rallye du Var. Au début des années 60 il va sillonner les rallyes français au volant d'une Simca Aronde puis de Renault (Dauphine-R8), avec succès. Cet homme réservé a connu une ascension discrète, le public mit du temps à palper son talent. Sa carrière de pilote monta cependant crescendo pour atteindre les disciplines phares à l’exception de la Formule 1 où il fit de rares apparitions. Au moment de raccrocher le casque son expérience de pilote liée à son goût pour l’organisation feront de lui un directeur d’écurie recherché. A l’âge des cheveux blancs  l’appel du volant le ramène au pilotage des anciennes qui ont traversé son âge d’or. Président du club des pilotes des 24 Heures, il retrouve une fonction de fédérateur. Revenons sur les étapes qui jalonnent la carrière de Gérard Larrousse.

François Coeuret


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Les débuts

Après des premiers pas en rallye Gérard doit renoncer dans un premier temps à la compétition pour se consacrer à ses études. Un accident de parachute pendant son service militaire durant lequel il se casse les chevilles retarde encore le retour à sa passion. Il décide ensuite de reprendre le volant et de s'y mettre à plein temps.

 

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En 1966, son pilotage est remarqué, il devient pilote professionnel chez NSU. D’abord cantonné aux rallyes chez Alpine il accède à la piste et débute aux 24 Heures du Mans toujours sous les couleurs d’Alpine en 1967 et 68. Il est ensuite engagé au sein de l'équipe Porsche. L’épique arrivée des 24 heures du Mans 1969 avec Hans Herrmann, dans les roues des vainqueurs Ickx et Oliver, le consacre aux yeux du public. Il signe un résultat identique l’année suivante associé à un autre Allemand, « Willi » Kauhsen, au volant de la Porsche 917 à la fameuse décoration du Martini Racing. Il s’illustre aussi en rallye sur la 911 comme en attestent ses trois secondes places au Monte Carlo lors des éditions 69, 70 et 72.

 

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Le temps des succès

En 1971 Gérard Larrousse remporte ses premières victoires importantes aux 12 heures de Sebring et sur le Nürburgring en compagnie du britannique Vic Elford. Il gagne cette même année le Tour de France automobile sur une Matra 650 associé au journaliste Johnny Rives. Patron des activités automobiles de Matra, Jean-Luc Lagardère n’oubliera pas cette victoire qui  va sceller le destin de Gérard Larrousse aux 24 Heures du Mans.

Après une saison 1972 au sein des équipes Ford en Tourisme et  Lola Bonnier en proto, il est engagé par Matra-Simca en 1973. Il réalise un parcours éblouissant en voitures de sport, triomphant à Vallelunga, Dijon, au Mans sur l'Osterreichring et à Watkins Glen, avec Henri Pescarolo, offrant ainsi à la firme française la consécration mondiale.

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En 1973, Gérard Larrousse avait succédé à Graham Hill en tant que coéquipier d’Henri Pescarolo :

« Sur mes deux victoires aux 24 Heures du Mans avec Matra, la plus enthousiasmante aura été la première, en 1973. Nous nous sommes battus toute la nuit contre les Ferrari. Cette année-là, quand nous sommes arrivés au Mans, Jean-Luc Lagardère avait convoqué tout le monde chez Matra Simca. La veille de la course, tous les concessionnaires étaient réunis sous une tente, Jean-Luc Lagardère leur a présenté l’équipe et les pilotes et leur a dit : voici ceux qui vont gagner dimanche ! Ce qui a bien sûr un peu mis la pression à tout le monde (sourire). Matra a amené dans l’automobile les techniques issues de l’aéronautique, ce qui a permis d’avoir de très bonnes voitures, qui sortaient vraiment de l’ordinaire. Tout le monde a profité de la dynamique de cette aventure. L’épopée Matra a été quelque chose de fantastique. »

A l’issue de la saison 1974 et de sa deuxième victoire mancelle, Gérard Larrousse court pour Renault Alpine en 1975 en sport ainsi qu’en F2 sur la Elf 2 (Premier au Mugello et au Trophée Jim Clark dans les deux disciplines respectives).

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Quelques tentatives en Formule 1 avec Surtees en 71 (France) et la Brabham BT 42 de l’écurie Finotto en 74 (Belgique, Suède, France)  furent  vouées à l’échec. Un seul départ à Nivelles soldé par un abandon, moyeu défectueux. Fin 75 Renault le sollicite pour diriger son service compétition F1- Sport proto.

 

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De pilote à manager

Casque raccroché en 1976 Larrousse devient patron des activités sportives de Renault, avec une double mission : remporter les 24 Heures du Mans et préparer l’arrivée du moteur turbocompressé en Formule 1.

Pilote d’usine Porsche lors de trois éditions des 24 Heures, Gérard Larrousse retrouve la firme allemande en temps qu’adversaire principal des Renault-Alpine de 1976 à 1978. Après deux victoires consécutives du constructeur de Stuttgart, Renault-Alpine succède à Matra au Mans en s’imposant en 1978. Didier Pironi et Jean-Pierre Jaussaud y triomphent.

« Cette victoire avait été préparée de longue date, indique Gérard Larrousse. C’était à la fois l’aboutissement d’une grande équipe et un aboutissement humain. »

Après ce succès, Renault-Alpine se retire des 24 Heures du Mans, comme l’avait fait Matra en 1974 après ses trois victoires consécutives de 1972, 73 et 74.

 

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En 1979, la quête technologique de Renault entre dans l’histoire lors du Grand Prix de France, avec la première victoire d’un moteur turbocompressé. Après l’épisode Renault qui se conclut en 1983 Gérard Larrousse travaille un an chez Ligier F1 puis se lance dans la discipline reine avec Didier Calmels. Il dirige sa propre écurie en utilisant des châssis Lola dès 1987. Ce sera un parcours chaotique avec un redressement judiciaire puis une reprise désastreuse par Venturi, il poursuit cependant jusqu’en 1993 avec le moteur Lamborghini puis en 94 avec un Cosworth.  A l’issue de cette saison l’écurie met la clé sous la porte.

Mais il aurait pu en être autrement…

 

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Fin 1993, Peugeot envisage de venir en F1, il décide de se servir de l’écurie Larrousse comme base de départ. Le constructeur français hésite entre deux projets. Jean Todt est derrière le premier, il s’agirait de créer une F1 100% française. Le second, à l’initiative de Jean-Pierre Jabouille, serait d’équiper une écurie avec le moteur Peugeot.

La solution retenue par Peugeot sera de racheter l’écurie Larrousse avant de créer la Peugeot F1. Cela conviendrait parfaitement à Gérard Larrousse. Une lettre d’intention est signée, BSN (Danone) est démarché, pour un gros contrat de sponsoring. Las, McLaren passe par là, tout ce beau projet s’écroule, et l’écurie Larrousse doit se rabattre sur un V8 Ford. Pour elle cela sonnera le début du déclin malgré plusieurs tentatives de sauvetage plus ou moins rocambolesques.

 

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Mémoire de la course

Le pilote lyonnais après avoir couru ponctuellement en catégorie GT au début des années 2000 se consacre ensuite à des participations dans les épreuves historiques.

Il est aujourd’hui en temps que Président du Club des Pilotes l’un des gardiens de la mémoire des 24 Heures du Mans. L’année 2023 s’annonce particulière pour l’ancien pilote, tout d’abord avec le Centenaire des 24 Heures : « L’objectif du Club des Pilotes est d’être prêt pour le Centenaire après avoir retrouvé sa dimension normale en 2022 ». Avec le développement de la catégorie Hypercar, ainsi que le retour de Ferrari, Gérard Larrousse prophétise « plusieurs voitures vont terminer dans la minute ».

2023 marquera aussi pour lui le demi-siècle de sa première victoire aux 24 Heures. Pour le public, la légende de Matra est intacte, comme a pu le mesurer Gérard Larrousse en 2019, quand il avait repris le volant du prototype bleu lors des Classic Days sur le circuit Bugatti. Le chant du V12 Matra avait provoqué l’enthousiasme et les applaudissements du public : « C’est toujours un bruit extraordinaire et c’était une époque qui a laissé une grande trace dans l’histoire du sport automobile »… En attendant le chapitre à venir du Centenaire qui annonce des moments captivants pour la légende des 24 Heures.

- Voir aussi : Gérard Larrousse : un tour à 25O km/h en Porsche 917

 

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- Source  interview et Présidence du club des pilotes : publication Net « 24H Le Mans »

- Illustrations ©DR

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Rétromobile 2023

Commentaires

Rallye de Monte-Carlo 1968: un Français est en tête sur une Alpine-Renault ! Mais j'apprends à l'instant que des spectateurs - imbéciles ou criminels - ont déversé quantité de neige sur la route. Larrousse est sorti, il ne gagnera pas le Monte-Carlo.
15 juin 1969 (c'est mon anniversaire): fin du repas dominical. Exceptionnellement, l'arrivée des 24H du Mans a lieu à 14 heures, pour cause de match Poher-Pompidou. Tout aussi exceptionnellement, la famille entière a les yeux rivés sur le Ducretet-Thomson N&b sur lequel défilent les images inoubliables de la joute entre Jacky Ickx et ce même Gérard Larrousse. Un pilote français est en passe de remporter les 24H du Mans ! Le coup passa si près...
XXIème siècle, Rétromobile 2018: c'est la pause déjeuner. J'avise à une table la joyeuse troupe MdS, la place est comptée. A la table à coté se trouve un Gérard Larrousse esseulé. J'envisage un moment lui demander de partager sa table, mais l'homme m'intimide trop. Je rejoins en définitive la table MdS, peut-être aurais-je dû opter pour ma première idée, je ne la saurai jamais.
Mais quel beau parcours effectué par le pilote lyonnais, de quoi venger tous les "Monsieur Brun" de la terre... Et merci à François de nous l'avoir superbement raconté.
Et Gérard Larrousse toujours présent à Rétromobile 2023, photo à l'appui.

Écrit par : Francis Rainaut | 21 février 2023

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