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10 janvier 2017

Arcangues

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En 1957, la télévision n’était qu’une sorte de prototype, dont l’usage était réservé à une « certaine élite ». On se tenait informés surtout grâce à la radio. Je me souviens du flash d’information du 12 mai sur Radio Luxembourg annonçant l’accident mortel du pilote de course de Portago aux Mille Miles en Italie, tuant aussi une dizaine de spectateurs dont cinq enfants. J’avais dix ans, je connaissais les noms de Fangio, de Moss, de Hawthorn, de Trintignant, de Jean Behra, mon préféré… De Portago ? Jamais entendu parler…

 par Raymond Jacques


Arcangues est un joli village basque, perché sur une colline près de Biarritz. Il s’y trouve une magnifique petite église, très ancienne avec ses traditionnelles galeries dans lesquelles les hommes se tenaient pour assister à la messe, tandis que les femmes restaient au niveau du sol. Tout autour de l’église, il y a le cimetière, dont une partie est aménagée en terrasses, et d’où l’on a une vue telle que, si j’étais enterré là, je crois que je sortirais souvent de ma tombe pour admirer le paysage…

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Sur la première terrasse, à gauche, se trouve la tombe de Luis Mariano, qui fut, en quelque sorte, un enfant adoptif du village. Plus bas, sur la seconde terrasse, à droite, se trouve la sépulture de la vieille et noble famille espagnole Cabeza de Vaca, qui donna à l’Espagne un conquistador, un gouverneur de Madrid et plusieurs prestigieux chefs de guerre. Elle possédait dans les environs une maison dans laquelle Alfonso Cabeza de Vaca y Leighton, marquis de Portago, dit « Fon » né à Londres en 1928, passa une partie de sa jeunesse. Outre l’Espagnol, il parlait le Français, l’Anglais et l’Italien. C’était un beau garçon brun, grand et svelte, à qui l’on attribuait à juste titre de nombreuses conquêtes féminines. Il était aussi un sportif accompli. Cavalier émérite, il jouait au polo, concourait en jumping et il participa même au Grand Derby d’Epsom comme gentleman jockey. Avec ses cousins, il forma la première équipe de bobsleigh espagnole. Puis, un jour, Luigi Chinetti lui proposa de conduire en course une Ferrari…

 

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« Fon » ne voulait pas courir les Mille Miles. Trop long, trop dangereux. Il avait commencé à courir en formule 1, qu’il préférait aux épreuves pour voitures de sport. Mais « il commendatore » l’avait désigné pour piloter aux Mille Miles, et il était impossible de lui résister.

Un pneu de la Ferrari 335 S numéro 531 de « Fon », secondé par Eddy Nelson, éclate sur une ligne droite à 240 kilomètres heure. L’auto sort de la route, fauche une dizaine de spectateurs et elle finit sa course dans un fossé. Le pilote et son navigateur sont atrocement mutilés, le casque de « Fon » est coupé en deux… Il avait 28 ans. Ce drame signera l’arrêt de mort de la course des Mille Miles…

 

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Ma mère habitait à Biarritz. Je suis allé souvent à Arcangues quand j’allais la voir, mais je n’ai appris que récemment l’existence de la sépulture de la famille Cabeza de Vaca dans le cimetière local. Aussi n’ai-je pas manqué de rendre visite à « Fon », en ce mercredi 28 décembre 2016.

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Postscriptum : veuillez pardonner la mauvaise qualité des photos que j’ai prises à Arcangues, je les ai faites avec un téléphone hors d’âge…

 

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Croquis de l'accident publié dans "L'Automobile"

 

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  - Photos 5 & 6 ©Raymond Jacques

  - Photo 3 ©CahierArchives

  - Autres illustrations ©DR 

00:10 Publié dans a.deportago | Lien permanent | Commentaires (6) |  Facebook | |

Commentaires

J'ai déjà visité Arcangues 2 fois: la première avec mes parents, pour Luis Mariano, puis avec mon épouse pour la beauté du village et la vue superbe! Mais grâce à vous il va falloir que j'y retourne une troisième fois : j'ignorais que de Portago y reposait.

Écrit par : J.P. Squadra | 10 janvier 2017

Tous les prétextes sont bons pour aller au Pays Basque en général et à Arcangues en particulier...

Écrit par : Raymond Jacques | 11 janvier 2017

Lire une note de Raymond est toujours un instant d'émotion. Qu'il en soit d'autant plus remercié que les contributions extérieures sont rares.
Si beaucoup d'entre nous ignoraient où se trouvait la dernière demeure de "Fon", c'est qu'il fut d'abord enterré à Madrid, au Cementerio Sacramental de San Isidro, avant d'être transféré à Arcangues en 1968.
Bien que ne parlant pas l'espagnol, j'ai trouvé beaucoup d'informations intéressantes sur le site suivant, très certainement tenu par des passionnés:
http://www.pilotos-muertos.com/2013/DePortago%20Alfonso.html

Écrit par : Francis Rainaut | 12 janvier 2017

Merci Francis pour ce lien vers le site "los pilotos muertos" qui m'était totalement inconnu. Mon espagnol étant tout aussi défaillant que mon serbo-croate ou mon swahili, je vais confier par petits morceaux la traduction de ce texte sur "Fon", apparemment très complet, au merveilleux et irremplaçable Google Translate.

Écrit par : Raymond Jacques | 12 janvier 2017

Je pensais que Louis Mariano reposait à Guéthary, mais vous me direz, ca n'est pas si loin ! En revanche, j'ignorais que de Portago fut enterré à Arcangues. J'y suis allé pourtant plusieurs fois tout en l'ignorant. Alfonso de Portago est l’un des pilotes les plus iconoclastes qu'ait connu le sport automobile. Il a été à sa façon une sorte d'Ernest Hemingway de la course automobile. Un type bien né, de souche aristocratique mais en mal de sensations, un touche à tout pour qui pratiquer importait plus que le résultat. Sa fortune et sa soif de vivre lui autorisaient toute sorte d’expérience dans le sport. Mais à ses débuts sur 4 roues, il fut si impétueux et dangereux que Maurice Trintignant le regardant évoluer jugea qu’il était urgent et nécessaire de lui prodiguer quelques conseils de trajectoire avant qu’il ne se tue. Il proposa donc à Fon de le suivre pendant quelques tours afin qu’il apprenne où se situaient les zones de freinage et les points de corde. Ce ne fut pas une erreur de trajectoire qui eut raison de lui ! Au Mille Miles, on dit qu’Enzo Ferrari qui avait le don de mettre ses pilotes dans de mauvaises conditions psychologiques, il aurait avantagé Olivier Gendebien en faisant mieux chausser sa voiture au détriment de celle de De Portago. En 1988 ; Philippe Alfonsi a réalisé untrès beau documentaire que j’avais vu sur Canal Jimmy (hélas !) qu’i s’intitulait Alfonso Cabeza de Vaca, marquis de Portago : à voir et à revoir !

Écrit par : Daniel DUPASQUIER | 20 janvier 2017

De mémoire je me souviens aussi avoir lu que la sortie de Portago aux Mille Miles était dû à un problème de suspension diagnostiqué par des mécanos. On avait proposé une intervention au pilote mais Fon avait refusé de perdre du temps . L éclatement du pneu à l'origine de sa sortie était sûrement causé par ce dérèglement, indirectement par cette négligence du pilote espagnol.

Écrit par : F.Coeuret | 20 janvier 2017

Les commentaires sont fermés.