16 décembre 2017
Nürburgring 1956 : qui sera « Ring Master » ?
La décennie Fangio - IV -
Juan Manuel Fangio a du fil à retordre depuis le début de l’année. La Scuderia Ferrari qui engage pour son compte les Lancia D50 lui oppose un jeune anglais coriace. Peter Collins ne se laisse pas impressionner par le triple Champion du monde. Il défend son pré carré avec talent et détermination. A la veille du Grand Prix d’Allemagne disputé sur le circuit du Nürburgring, l’un des juges de paix de la saison, Collins précède l’argentin au classement du Championnat du monde. Certes un seul petit point les sépare mais un point qui agace « El Chueco » comme le surnomment les railleurs…
par François Coeuret
Depuis le début de saison le pilote argentin est confronté non seulement à la vive concurrence de ses collègues mais aussi à quelques soucis mécaniques qui l’ont desservi. En arrivant dans les montagnes de l’Eifel, Juan Manuel Fangio compte bien en imposer à son jeune équipier mais aussi rival. Les deux hommes s’élancent pour les essais avec la ferme détermination de réaliser le meilleur temps. Behra et Moss au volant de la Maserati 250F contestent la suprématie des pilotes Ferrari. L’anglais s’est imposé à Monaco, il se positionne quatrième au classement général tandis que le français régulier et opiniâtre est troisième. Au sein même de la Scuderia le jeune italien Castellotti se montre parfois dangereux pour ses équipiers. Le verdict tombe à la veille de la course.
Fangio réalise le tour le plus rapide pour… trois dixièmes de secondes devant Collins. Un écart infime compte tenu des 22,810 km composant le tour de circuit. Castellotti réalise le troisième temps à 3.2 secondes du record, contribuant à placer la Lancia-Ferrari D50 au sommet de la hiérarchie. Suit la Maserati de Moss mais à 12.2 sec puis on pointe Musso (Ferrari) précédant quatre Maserati (Perdisa, Maglioli, Behra, Salvadori) et la Ferrari de De Portago.
La grille 4-3 promet un départ indécis. Fangio fébrile rate son envolée et Collins profite de l’aubaine pour s’emparer du commandement devant le Champion du monde qui emmène dans son sillage Moss et Castellotti. L’argentin attaque et réagit. Après Flugplatz il passe Collins, Moss incisif déborde aussi son compatriote. Ce dernier ne compte pas se faire décrocher et au prix d’une attaque virile reprend la seconde position. Un début de course haletant durant lequel les trois hommes ont fait le trou. Castellotti victime d’un tête à queue dans le premier tour est lâché. La D50 est irrésistible au point que Moss va petit à petit perdre du terrain sur le duo majeur.
Collins, Fangio, Moss, Castellotti
Derrière Moss roulent Behra, Salvadori et Portago qui réalise au beau début de course. Fangio domine Collins, il conquiert une petite marge mais se fait parfois recoller comme s’il souhaitait prendre des pauses, toutes relatives cependant. Les deux hommes sont les patrons reprenant plusieurs fois le meilleur tour. Qui va remporter le titre de « Ring Master 1956 » ? Le neuvième tour rend un début de verdict quand Collins rentre prématurément au stand suivi d’un nuage de fumée. Une conduite d’essence a privé les observateurs de la suite du formidable combat. La tension qui étreignait Fangio a dû baisser de quelques crans. Ce qui ne l’empêche pas de battre encore une fois le record de la piste, dix secondes de mieux que son temps des essais ! Il contrôle ainsi Moss à 15 secondes qui attaque aussi fort. Behra malchanceux est passé par son stand pour faire refixer une attache de réservoir. Collins qui avait relayé Portago après l’abandon de sa propre voiture sort de la route violemment mais s’en tire indemne. Behra en conséquence rallie la troisième place du podium.
Stirling Moss - Maserati 250F
Juan Manuel Fangio termine sa course en contrôlant Moss, il rentre marqué par sa brillante performance. Le pilote de Balcarce reprend la tête du championnat avec 8 points d’écart sur Behra et Collins.
Il va dans la lancée s’adjuger le titre à l’issue du Grand Prix d’Italie gagné par un Moss irrésistible. Durant ce Grand Prix Collins cédera son volant à Fangio en fin de course. La voiture de l’argentin souffrait d’un problème de direction qui le ralentissait. Ce geste chevaleresque salué par Fangio le priva d’une possibilité de coiffer le titre dans l’hypothèse d’un abandon de Moss.
- Photo 1 & 3 ©Cahier Archive
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19:05 Publié dans e.castellotti, jm.fangio, p.collins, s.moss | Tags : jm fangio, peter collins, stirling moss | Lien permanent | Commentaires (3) | Facebook | |
Commentaires
A signaler pour l'anecdote la disparition le 29 novembre dernier de la marquise de Moratalla, la propre sœur de "Fon" de Portago. Elle fut l’une des pionnières de la pelote basque au féminin, une éleveuse de chevaux passionnée mais également au centre d'une sordide affaire de succession.
Voilà pour le rayon faits divers...
Passionnante saga que raconte l'ami François, on a jamais fini d'en apprendre, je me régale.
Écrit par : Francis Rainaut | 16 décembre 2017
Répondre à ce commentaireA propos du titre de cette note, une question me taraude : ne devrait-on pas parler de « Ring Meister » plutôt que de « Ring Master » ?
Un grand pilote belge, dont vous devinerez facilement le nom, était lui à la fois « Rain Master » et « Ring Meister »…
Écrit par : RMs (Racing' Memories) | 08 février 2018
Répondre à ce commentaireEn effet j'ai hésité quant à l'orthographe à adopter. Ce titre officieux apparut je crois au cours des années 60. "Meister" étant attribué à Jacky Ickx, j'ai évité l'amalgame et employé "Master" pour Fangio et les années 50. C'est une extrapolation car à cette époque le terme n'avait pas encore cours. A noter que "Ringmaster" en un seul mot se traduit par" Monsieur Loyal" au cirque!
Écrit par : F.Coeuret | 08 février 2018
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