15 novembre 2020
Gran premio de México 1964: ultimes tours pour un titre …
Le drapeau s'abaisse devant les dix-neuf pilotes qualifiés qui s’élancent pour le dernier Grand Prix de la saison. Trois d'entre eux peuvent prétendre au titre mondial. Lors de la course les trois hommes vont tour à tour se positionner en virtuel champion du monde. Jusqu’à ce que le sort désigne l'élu qui bénéficia de deux coups de pouce (de pousse ?) pour coiffer la couronne.
François Coeuret
GP Mexico 1964. Drivers ©TheCahierArchive
Le trio des prétendants
Très disputée la saison F1 64 a longtemps cherché son vainqueur. Les trois équipes de pointe, BRM, Lotus et Ferrari étaient proches quant aux performances. Ajouter quelques excellents pilotes auxquels viennent se joindre ceux des Brabham officielles. Pour couronner le Champion il fallut attendre la dernière course et jusqu’aux ultimes tours.
Graham Hill fort de ses 39 points semble le plus sérieux « client », il vient de remporter le Grand Prix des USA au volant de la BRM P261. Il est épaulé par Richie Ginther au sein de Owen Racing Organisation. Hill a commencé sa carrière en F1 chez Lotus. Il est fidèle à BRM depuis 1960. Champion du monde en 1962, il a terminé second en 63 derrière Jim Clark. John Surtees suit l’Anglais moustachu avec un retard de 5 points. Le leader de la Scuderia peut compter sur son équipier Lorenzo Bandini pour la conquête du titre. Jim Clark champion sortant possède 9 points de retard sur Hill soit l’équivalent des points d’une victoire. Le challenge de l’écossais est plus ardu. Il lui faut gagner sans que le pilote BRM ne termine mieux que quatrième*. Il égale ainsi son capital et le devance au nombre de victoires obtenues, 4 succès contre 2. La combinaison est réalisable avec de la chance, l’aide éventuelle de son co-équipier Spence et les qualités de la Lotus 33.
Les essais
L’autodrome de la « Ciudad de México » est une piste variée avec secteurs lents, courbes rapides et deux lignes droites. La moyenne des monoplaces 1500cc se situe aux alentours de 150 km/h. Jim Clark réalise la pole position devant un Dan Gurney très en forme aux commandes de la Brabham BT 7. Suivent les deux pilotes Ferrari, Bandini (Ferrari 1512) réalisant 1/10e de mieux que son chef de file (Ferrari 156). On note ensuite Spence l’équipier de Clark, Graham Hill, Jack Brabham, Jo Bonnier (Brabham) et Pedro Rodriguez qui pilote une troisième Ferrari, une 156 Aero.
Lorenzo Bandini vs Graham Hill ©TheCahierArchive
La course
Jim Clark réalise un départ fulgurant. Il est suivi par Gurney et le duo Bandini- Surtees. Graham Hill a pris un départ très moyen, il se met en demeure de viser les points après son envolée laborieuse. L’écossais volant a pris la direction des opérations, il est intouchable. Hill remonte méthodiquement au classement durant les dix premiers tours. Il atteint la troisième place au douzième, il a pris le meilleur sur les deux Ferrari. Cela lui assure une position idéale pour s’adjuger le titre de Champion. Surtees est maintenant en retrait sous la coupe de Bandini qui le précède. Les positions se figent ainsi jusqu’à la mi-course. C’est le moment que choisit Bandini pour passer à l’offensive. Il tient la BRM de Hill en point de mire et tente rapidement une attaque. Il vise la corde dans l’épingle Horquilla et se porte à la hauteur de Hill au prix d’un freinage appuyé. L’anglais se déporte à gauche mais l’italien qui est emporté vers l’extérieur heurte la BRM (premier coup de pousse). Les deux pilotes réaccélèrent. Hill a du mal car un de ses échappements s’est tordu et fissuré dans la manœuvre. Il doit passer par les stands où l’on redresse tant bien que mal la tubulure. Les espoirs de Graham Hill sont maintenant compromis. Ceux de Surtees encore minces. Le sort de l’anglais à la fine moustache repose sur les épaules de Clark. Celui de Surtees également. Ce dernier doit aussi compter sur son équipier car une troisième place ne suffit pas dans la perspective éventuelle d’un abandon de Clark. Bandini doit se laisser doubler pour que Surtees dépasse le score de Hill d’un point. Graham Hill a chuté à la treizième place et n’y croit plus, son moteur a perdu de la puissance en raison de son échappement touché. Clark est virtuel champion du monde.
A l’approche du drapeau à damier alors que la Lotus semble avoir course gagnée, l’Ecossais est subitement ralenti par une conduite d’huile endommagée, il s’arrêtera dans le dernier tour. Les concurrents sont à deux tours de l’arrivée et la course change brutalement de visage. Gurney hérite de la première position. Hill redevient virtuel Champion… Mais à l’approche du dernier tour le stand Ferrari brandit un panneau au passage de Bandini lui intimant l’ordre de laisser passer Surtees (deuxième coup de pouce). Ce dernier franchit la ligne en deuxième position au baissé du drapeau, l’anglais est sacré champion du monde avec un point d’avance sur Graham Hill.
La polémique va ensuite battre son plein. Hill est très remonté contre Bandini dans les jours qui suivent, il ne se prive pas de commenter… La « manœuvre » de Bandini était-elle intentionnelle ? Pas évident… Elle est intervenue à la mi-course. Difficile d’accuser l’écurie Ferrari de forfaiture, l’incident au stade où il est survenu ne suffisait pas à sauver Surtees qui a été relancé par le ralentissement soudain de Clark à deux tours de l’arrivée. Bandini a tout de même tiré longtemps ce boulet. Sa manœuvre de dépassement était précipitée, il a « emmené » Hill trop loin sur l’extérieur. L’anglais a légèrement tapé le rail et tordu un échappement. L’italien souhaitait probablement prendre le dessus et laisser derrière lui Hill et Surtees s’expliquer loyalement. Mais...
En robe blanche et bleue
Gurney franchit la ligne en vainqueur devant les deux Ferrari en livrée blanche et bleue. Cette singularité fut le résultat de la colère du Commandatore. Les monoplaces italiennes arborèrent ces couleurs pour les deux dernières courses de la saison disputées sur le continent américain. La FIA a refusé d’homologuer la Ferrari 250 LM en catégorie Grand Tourisme. Le créateur de la Scuderia n’en décolère pas. En signe de protestation il fait engager ses monoplaces peintes aux couleurs américaines par le NART en cette fin de saison 1964.
(*) Seuls les 6 meilleurs résultats sont pris en compte pour attribuer le titre. Hill a déjà décompter 2 points, le prochain décompte est 3 points. Si Hill termine troisième il marque 4 points soit 1 point comptabilisé avec les 3 décomptés.
- Illustrations ©TheCahierArchive & D.R.
17:38 Publié dans g.hill, j.clark, j.surtees, l.bandini | Tags : john surtees | Lien permanent | Commentaires (4) | Facebook | |
Commentaires
Les "rouges" étaient très élégantes en bleue et blanc! En tout cas belle page d'histoire, merci.
Francis, quel est ce pilote torse nu dans sa monoplace en haut à droite ?
François Libert ?
Écrit par : JP Squadra | 16 novembre 2020
Répondre à ce commentaireOups...en haut à gauche bien sûr
Écrit par : JP Squadra | 16 novembre 2020
Répondre à ce commentaireOui Jean-Philippe. François Libert, dont c'était l'anniversaire le 14 novembre et dont on est malheureusement sans aucune nouvelle… Je crains le pire !
Il nous manque en tous cas.
Écrit par : Francis | 16 novembre 2020
Répondre à ce commentaireEn effet aucune info sur le web à son sujet, c'est inquiétant. Souhaitons que François Libert ou un de ses proches lise ces lignes et nous donne des nouvelles. Bon anniversaire à François
Écrit par : JP Squadra | 16 novembre 2020
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