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24 octobre 2018

Black Sunday

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Quatorzième boucle de course, trois pilotes dominent ce début de Meeting. Le petit groupe est poursuivi par un quatrième homme qui cravache pour recoller au wagon de tête... Quand brusquement le chaos survient qui va emporter encore une vie.

par François Coeuret


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Après l’annulation du Grand Prix du Mexique qui devait clore la saison c’est un évènement très british qui s’annonce en forme de fête de la Formule 1 dans le Comté du Kent. Les écuries anglaises ou assimilées sont au complet pour disputer une dernière épreuve en dehors du Championnat officiel. Les équipes BRM, Lotus, Tyrrell, March, Surtees, Brabham, Mc Laren ont effectué le déplacement pour cette épreuve de clôture célébrant le second titre mondial de Jackie Stewart. Ferrari et Matra n’ont pas jugé utile de traverser le Channel pour l’occasion. Les organisateurs ont admis un contingent de Formule 5000 afin d’étoffer le plateau. Parmi elles des Surtees, Lola, Mc Laren, une Leda, une Crosslé, toutes munies d’un copieux moteur Chevrolet 5 litres à l’exception de la Crosslé équipée d’un V8 Rover. Des monoplaces moins véloces que les F1 mais qui vont fournir une belle extension à la grille de départ. 

 

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Les essais ont déterminé une hiérarchie qui permet au Team BRM d’occuper l’avant poste de la grille. Les pilotes ont abouti à un excellent équilibre côté châssis et Jo Siffert, le vainqueur du dernier Grand Prix d’Autriche, s’est finalement adjugé la pole position à l’issue des essais. Suivent son équipier Peter Gethin et la Lotus d’Emerson Fittipaldi. Une seule F5000 se positionne devant une F1. Franck Gardner place sa Lola T300 devant la March de Henri Pescarolo.

Dimanche au baissé du drapeau, Siffert  rate son envol, il s’ensuit un léger contact avec la March de Peterson. Les deux hommes poursuivent comme si de rien n’était. Le Suisse a perdu des places dans l’incident et navigue en dixième position au passage du premier tour. Son équipier Gethin a pris la tête suivi d’un ruban de monoplaces avec dans l’ordre des poursuivants Fittipaldi, Hailwood, Peterson, Ganley, Stewart, Schenken, Surtees, Cevert…

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Les premiers tours  seront empreints d’une certaine fébrilité. A Druids au second passage Wisell et Pescarolo s’accrochent. Ils finissent le long du talus sans dommage corporel. Le secteur de Bottom Bend est le témoin d’un tête-à-queue de Ronnie Peterson au troisième tour. Mike Hailwood qui suivait de près n’a pu éviter la March qu’il percute. Le britannique reste sur le carreau et abandonne tandis que le suédois rentre au stand pour changer ses pneus arrière.   

Gethin domine toujours suivi de Fittipaldi et Stewart. Siffert cravache pour remonter son handicap. Il est cinquième au sixième tour tandis que Ganley, le troisième homme BRM, renonce joint de culasse grillé. Lors du onzième tour Jo Siffert passe la Brabham de Schenken, il s’empare de la quatrième position. Le pilote suisse ne cesse d’attaquer et s’emploie à remonter le tiercé de tête.

Après le quatorzième passage sur la ligne, Il passe Surtees attardé juste avant la passerelle précédant la courbe Hawthorns. Le pilote anglais voit la BRM décrocher puis tirer brutalement à gauche. La monoplace heurte le talus, rebondit vers la piste puis percute un panneau de signalisation à Hawthorn. Projetée dans les airs  la voiture se retourne et se disloque. Elle prend feu. L’incendie est très dense. Les secours tardent, les commissaires sont impuissants devant le brasier. Les extincteurs sont insuffisants, plusieurs ne fonctionnent pas, ils viennent difficilement à bout de l’incendie.

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La  course a été stoppée. Les monoplaces se sont arrêtées avant le secteur de l’accident. Nombreux sont ceux qui craignent le pire devant la scène de la catastrophe. A juste titre, le malheureux pilote est sans vie dans la coque de sa monoplace disloquée.

La cause réelle de la sortie de Joseph Siffert n’a jamais été élucidée malgré l’analyse de l’épave. Seules des hypothèses ont été émises. Un bris de suspension suite à la touchette du départ  avec Peterson. Une crevaison subite. Un problème de boîte de vitesse survenu juste avant la sortie de piste d’après certains observateurs ?

 


 

Les causes de sa mort furent précisées plus tard. Une autopsie révéla un décès par asphyxie, le pilote suisse présentant une fracture de la cheville pour toute blessure.

Avant de prendre la route vers l’Angleterre pour disputer la « Victory Race » Seppi , comme le surnomme ses compatriotes, avait disputé 42 courses depuis le début de saison 71. Son programme très chargé comportait la Formule 1 avec BRM, l’Endurance avec Porsche, la Canam avec sa structure privée engageant une Porsche, la Formule 2 sur une Chevron. Malgré la saturation qu’il ressentait*, Jo se rendra à Brands Hatch pour fêter le titre de Stewart, résident suisse, avec qui il s’entendait bien.

 

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50.000 personnes pour les funérailles de Seppi à Fribourg...

 

Unanimement regretté par ses pairs, le public en général, suisse en particulier, Joseph Siffert avait rejoint le destin de son équipier Pedro Rodriguez chez Porsche Wyer.

(*) Propos recueillis auprès de sa femme par la presse.

 

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Monaco 1971. Jo Siffert, Richard von Frankenberg

 

- Illustrations ©D.R.

 

Addendum : sur le caractère de Seppi

Fribourg, la Rome suisse, curé contre curé, église contre église... Une petite France en pleine Suisse, pays à grande majorité protestante.

C'est là que naît Seppi Siffert. Dans la Basse-Ville... Ses parents tiennent une laiterie, laquelle n'est pas vraiment rentable. Son père Aloïs Siffert prend alors un commerce d'eau minérale..., qui ne marche pas mieux, puis finit par abandonner toute activité régulière et même un peu plus tard sa famille.

Maman Siffert, née Ackermann, fait des ménages à l'Université pour 1,10 franc (suisse) de l'heure. Seppi l'aide au ramassage de vieux habits, plus tard ils ont même vendu des narcisses sur la Grand-Rue.

C'est Seppi qui tira sa famille de la mouise. C'est dans la Basse-Ville de Fribourg qu'il rencontre sa première compagne Yvette.

Qui ne sait pas cela ne peut pas comprendre la personnalité de Seppi, devenu Joseph, - plus français -, puis Jo, - plus international -. Sa réputation dans les affaires vient de ses origines.

Il finira par épouser Sabine Eicher qui était mannequin, puis Simone la fille du grand brasseur local Guhl (de la brasserie Beauregard). Issu du quartier populaire de la Basse-Ville il avait ainsi rejoint la haute société de Fribourg...

Mais à ce moment-là il ne ramassait plus, ni les chiffons, ni les douilles pour l'armée; il louait des autos, des Porsche 917, une March de F1, des F2, entre autres activités !

par Francis Rainaut

 

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Autographe Jo Siffert ©F.Rainaut 1969

Commentaires

Beau texte pour un sale souvenir...on se serait cependant passé des images vidéos pour ma part

Écrit par : Hawotte | 24 octobre 2018

Répondre à ce commentaire

Je ne peux que te donner raison, Alain. C'est moi qui ai pris l'initiative de cette vidéo, c'est moi qui la retire, j'ai eu tort.
Au profit d'une vidéo bien plus sympa...

Écrit par : Francis Rainaut | 24 octobre 2018

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