11 juillet 2023
Rancards à Montlhéry - 15 octobre 1967
Ils étaient nombreux à s’être rancardés sur le plateau de St-Eutrope en ce dimanche matin automnal. Le but : admirer encore une fois les sports protos en action sur le sol national pour les spectateurs qui avaient fait le voyage au Mans en juin. Quant à ceux qui avaient manqué la course du siècle dans la Sarthe, c'était l’occasion de voir à l’œuvre une belle brochette de ces spécimens de l’endurance.
François Coeuret
Le plateau
Certes les « usines » n’avaient pas fait le déplacement en cette fin de saison, la course ne figure pas au Championnat et les dés étaient jetés depuis un moment. Cependant lors de ces « 1000 km de Paris » la participation fut plus que copieuse. Côté constructeurs sont représentés Ford, Ferrari, Lola, Mirage, Matra, Alpine, Porsche. Voilà qui présageait une course attrayante. Une brochette de GT40 dont celles de Vaccarella-Maglioli et Giorgi-Jabouille (Brescia Corse et Ford France), ainsi que la MKII de Ford France (Schlesser-Ligier) sont présentes sur l’autodrome. Deux Ferrari 412P (P3/P4) et une 250LM listent sur le programme : sur les 412P Siffert-Piper (Maranello Conscessionaires) et Lucien Bianchi-Beurlys (Equipe Nationale Belge), Attwood-Redman sur la 250 LM Piper. La Lola T70 engagée par Max Wilson est pilotée par Hobbs et son propriétaire. Wyer a acheminé la Mirage M1 victorieuse à Spa pour Jacky Ickx et Paul Hawkins.
Les Porsche privées présentes sont deux 910, des 906, et bien sûr des 911 en GT. A noter au volant Elford-Bradley, Stommelen-Dechent, Herrmann-Schütz (906-906-910). Côté Hexagone Matra et Alpine sont bien sûr en lice. Matra pésente une 630 Ford 4,7 L aux mains de Beltoise-Pescarolo et une 630 BRM 2L pour Servoz Gavin-Jaussaud. Alpine en plus de trois A210 présente sa nouvelle A211 3 litres préfigurant la future A220. Sur les A210 Depailler-Vinatier, Cheinisse-Delageneste et de Cortanze-LeGuellec, Mauro Bianchi-Grandsire vont faire débuter la 3 litres. Le plateau est complété par une Marcos, une Lotus 47, une Ferrari GTB, des 911 au nombre de cinq voitures. En proto une Chevron B6 et au chapitre des singularités, une Costin Nathan IMP (châssis en bois, Nathan-Ruata) et la jolie Nomad MK1 Ford (Lanfranchi-Konig). Episode tragique précédant cette course : Jean Rolland qui devait être associé à Henri Greder s’est tué en septembre sur la piste parisienne lors d’un test privé à bord d’une Alfa Romeo T33.
Les essais
Deux séances vont déterminer la grille de départ. Au premier jour Siffert réalise le meilleur temps sur la 412 verte devant la Mirage Ford et La seconde 412 jaune de Lucien Bianchi. Chez Alpine on dévermine la 3L qui accroche le dixième temps après une session de mise au point soutenue. Le lendemain Jacky Ickx s’empare de la pole devant la T70 de Hobbs qui n’a pas amusé le terrain lors d’une séance intense. Les Ferrari se placent en embuscade en seconde ligne, Siffert devant Lucien Bianchi. On trouve ensuite la Matra Ford des potes Beltoise-Pescarolo qui n’ont pas ménagé leur peine devant Schlesser-Ligier (MKII). Suivent Attwood-Redman (250LM), Vaccarella-Maglioli (GT40) puis deux Porsche, 910 et 906 (Herrmann-Schütz et Koch-Neerpasch). L’Alpine 3L est créditée du 11e temps devant la Matra 2L de Servoz-Jaussaud. Des soucis de suspension dus à un choc avec les bottes de paille puis de boîte ont donné du fil à retordre à l’équipe de Dieppe que le public tient à la bonne avec les protos de Vélizy. Cela faisait un moment que des françaises n'avaient pas montré leur nez aux autos de pointe…
La course
La chicane devant les tribunes au niveau du raccordement du routier, réclamée par les pilotes, est serrée. Installée depuis l'accident de 1964, c’est un passage délicat, une adaptation qui paraît très improvisée avec ses inévitables mais nostalgiques bottes de paille ! Les pilotes doivent s’y accommoder d’autant qu’ils en sont à l’origine. La météo prévoit de la pluie en cours d’épreuve. Le départ est donné sur une piste quasi sèche. Le public est arrivé en masse, attiré par le beau plateau réuni par les organisateurs.
Les voitures s’élancent à 10h30. Ickx prend la tête devant la Lola de Hobbs, le duo des Ferrari 412 et la Matra-Ford. Siffert attaque en ce début de course et passe la Lola au troisième tour tandis que Ickx a creusé l’écart, neuf secondes au tour 5. L’Alpine 3L est déjà au stand au quatrième tour pour vérifier les pneus, elle était en quinzième position. Siffert roule crescendo au point de réduire son écart régulièrement sur Ickx. La jonction est faite au 10e tour, le suisse va prendre le dessus. Quelle attaque ! Siffert a maintenant 33 sec d’avance sur la Mirage au 20e tour alors que la Lola a abandonné 5 tours plus tôt carter crevé car elle talonnait dans la cuvette de Couard.
Lucien Bianchi stoppe au stand pour faire nettoyer son pare-brise maculé de l’huile échappée de la Lola. Beltoise en fait autant mais s’arrête carrément sur le circuit ! La situation va rebondir quand Siffert se met en tête à queue soudainement, stoppe et s’aperçoit qu’une cosse de batterie est desserrée. Il a perdu du temps et s’arrête au stand. Alors que le public pense simplement à un ravitaillement l’arrêt s’éternise car on diagnostique aussi un problème de segmentation. Cela ne prédit rien de bon pour la suite. La Mirage reprend la tête devant La Ferrari de Bianchi qui compte une minute de retard. Le paramètre pluie entre en jeu maintenant. Il va changer la donne avec le relai de Hawkins. Ce dernier est moins rapide sous la pluie que Jacky Ickx, Bianchi-Beurlys remontent allègrement. La Ferrari double la Mirage et se détache. Schlesser passe également Hawkins. A la suite des ravitaillements de Bianchi et Schlesser, Hawkins reprend la tête avec 35 sec d’avance sur la Matra de Pescarolo. La française qui a déjà ravitaillé se retrouve en excellente position, le public jubile. Nous en sommes au cinquantième tour avec le classement suivant : Hawkins, Pescarolo, Ligier, Beurlys, Herrmann.
Pesca roule grand rythme, rattrape la Mirage en cinq tours. Il passe, creuse un écart de 42 sec en trois tours car les pneus de Hawkins sont à l’agonie. Là le public exulte mais au moment où la Mirage stoppe au box la Matra ne passe plus. La boîte de Pescarolo a rendu l’âme. Douche froide sur l’autodrome ! Du coup Ligier passe en tête très provisoirement car au jeu des ravitaillements la Mirage récupère le leadership, Bianchi est troisième, Piper quatrième, Schütz cinquième. Les positions commencent à se stabiliser sauf pour Schlesser et Bianchi. Au centième tour la Ferrari est remontée sur la Ford. La jaune dépasse la bleue claire et passe en seconde position. Nous sommes à 29 tours du damier, la Mirage roule vers le succès sauf incident et Schütz va réaliser une fin de course météorique qui le mène dans les roues de la MKII de Schlesser-Ligier. Il va même prendre le dessus dans le dernier tour en s’adjugeant la troisième place devançant donc Schlesser, Piper avec la Ferrari qui a finalement tenu la distance et Attwood sixième.
L’Alpine 3L finit septième et première française que le public va applaudir sans retenue, histoire de se consoler après cette course très disputée.
- Photo 5 ©Michel Janvier
- Autres illustrations ©DR
10:55 Publié dans j.ickx, j.siffert, p.hawkins | Tags : mirage, 1000km paris, matra | Lien permanent | Commentaires (3) | Facebook | |
Commentaires
Encore une fois merci pour ces bons souvenirs qui avaient besoin d’être rafraîchis
Écrit par : Albert | 11 juillet 2023
Répondre à ce commentaireSur Youtube, une vidéo de 4 minutes postée par "Arrivepas", sans doute tournée en Super 8 à l'époque, en couleurs. C'est toujours émouvant de retrouver des images de cette époque révolue...
Écrit par : Raymond Jacques | 12 juillet 2023
Répondre à ce commentairemerci dévoquer, ces souvenirs d'un autre temps.
j'avais mis un compte rendu de Sport Auto, avec photos, ici
https://wookey.forumotion.com/t1406-1967-1000-km-de-paris-a-monthlery
Écrit par : Bruno | 17 juillet 2023
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