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Rechercher : L ETOFFE D'UN HEROS

La malédiction des graves noires

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Une fois arrivé au sommet du Puy de Dôme à quelques encablures de Clermont-Ferrand le visiteur, en plus d'admirer le remarquable panorama du site, prend conscience qu'il visionne la plus grande chaîne volcanique d'Europe. Elle culmine à 1885 mètres au sommet du Puy de Sancy. L'ensemble du domaine géologique est endormi depuis environ sept mille ans. Le Puy de Gravenoire, un des nombreux petits volcans de la chaîne, surplombe le circuit automobile de Charade. Il est composé d'un mélange trachy-basalte, roche noire ou parfois rouge issue du refroidissement qui a suivi la fin de l'activité sismique. Bien que reposant paisiblement dans cet écrin jadis chaotique ces roches n'en sont pas pour autant inoffensives.

Ceci nous amène à évoquer deux épisodes concernant le Grand Prix de France automobile de Formule 1...

François Coeuret

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Charade : La piste d’origine

Charade a souvent été comparé à un petit Nürburgring (l’ancien). Stirling Moss le considérait comme « le plus beau circuit du monde ». Ce circuit est sis à une altitude moyenne de 800 mètres, se déroule sur huit kilomètres. Il possède 51 virages et d’importants dénivelés.  Le tracé est varié, composé de secteurs rapides (lignes droites et courbes) combinés avec des virages à angles serrés. La moyenne au tour se situe autour de 160km/h pour les Formule1. Le ruban de bitume au fond du circuit auvergnat est assis sur un remblai composé bien sûr de roches volcaniques. Le secteur contournant l’ancien volcan est baptisé Gravenoire, orthographié parfois Grave Noire, nom du puy le surplombant.  Ce site fut exploité.  Une carrière vit le jour, on y extrayait la pouzzolane présente sur les lieux. Les bordures du circuit côté nord-est sont particulièrement garnies de rocaille volcanique. Notamment de cailloux souvent acérés, les « graves noires » ainsi nommées par les locaux. Ils sont à l’origine de quelques soucis rencontrés par les concurrents des courses organisées sur cette piste.

 

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5 Juillet 1970 - Grand Prix de France

Début d’après-midi, la Ferrari de Jacky Ickx mène la danse depuis le baissé du drapeau... Quinzième tour, le pilote parisien au volant de sa F1 bleue prend la tête de la course. Jusqu’alors calé dans la boîte de vitesse de la monoplace rouge il s’est débarrassé de son plus coriace adversaire victime d'un souci mécanique. Le public français jubile. Une voiture 100% française mène le Gand Prix, châssis, moteur, pilote ! Cela fait des lustres que ce n’est pas arrivé. Le staff de l’écurie balance entre le bonheur de la situation et le stress de l’attente du drapeau à damier. Il reste tout de même 23 tours du circuit de huit kilomètres à boucler. 20e tour, Jean-Pierre Beltoise roule avec seize secondes d’avance sur Jochen Rindt, ça baigne. Beaucoup commencent à y croire. Le V12 de la Matra MS120 sonne clair et JPB domine son sujet...

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Trois tours plus tard l’angoisse grandit dans le stand des bleus. Rindt remonte régulièrement jusqu’à opérer la jonction puis passer le leader dont la voiture est de plus en plus instable. Il perd beaucoup de terrain. Tour 27 :  Arrêt au stand, un pneu arrière s’est dégonflé lentement, Jean Pierre a roulé sur un de ces petits graviers acérés déposés sur la piste par les concurrents flirtant avec les bas-côtés. La malédiction enfonce le clou côté mécanique puisque après avoir changé ses deux pneus arrière Jean-Pierre Beltoise s’arrête une seconde fois. Le moteur déjauge. Les mécanos constatent qu’il reste pourtant suffisamment d’essence pour finir la course. Rindt sur la Lotus en a profité pour remporter son quatrième grand prix. La déception est grande dans le clan français après le fiasco du Mans. Le public quitte le circuit un peu abasourdi. Une belle occasion manquée.


 

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2 Juillet 1972 - Grand Prix de France

Après un passage sur le nouveau circuit provençal du Castellet en 1971, le Grand Prix de France retrouve Charade l’année suivante. La MS 120 de 1970 est maintenant devenue MS 120D. Un nouveau châssis plus rigide, plus léger muni de la dernière version du V12 maison. Matra qui vient de remporter les 24H du Mans est toujours à la recherche d’une victoire en F1 avec ce moteur. Ce n'est plus un pilote français aux commandes mais un Néo-Zélandais. Sur ses épaules l’équipe française fait peser une forte pression.  Jean-Luc Lagardère s’est fixé l’objectif suivant : victoires au Mans et au Grand Prix de France. Le premier challenge est rempli, reste le suivant. Chris Amon a réalisé le meilleur temps des essais précédant le Grand Prix. On gamberge dans le stand en fin d’après-midi la veille de la course. Chris est « briefé » façon débutant tête en l’air ! Un pilote qui compte tout de même derrière lui neuf saisons de Formule 1 et qui va courir pour la quatrième fois à Charade...

- « Méfie-toi des graviers qui s’accumulent en bordure de trajectoire ... »

Il faut dire que la crevaison de 70 est encore gravée dans l’esprit de l’équipe.

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Amon part en trombe une fois le drapeau national abaissé. Hulme puis Stewart se signalent dans ses rétros. Le Néo-Zélandais au casque tricolore s’arrache et déploie tout son art du pilotage. Il transporte beaucoup plus de carburant que ses collègues champions du monde. Le V12 Matra est plus gourmand que le Cosworth. Amon compense mais pendant les dix premiers tours la voiture bleue se trouve sous la pression des deux acolytes. Chris ne cède rien, il va même prendre un peu d’air au prix d’un gros forcing ... Au point d’oublier la consigne des graves noires...?

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20e tour : la bleue rejoint son stand pneu avant gauche crevé (*)... La malédiction a encore frappé ! Une vraie guigne... Reparti huitième Chris Amon va remonter pour accrocher la troisième marche du podium avec pour maigre consolation un meilleur tour en course. Stewart remporte la course. Il a su rester prudent et ménager ses pneus à partir de la mi-course. A moins que les très bonnes relations qu’il entretient avec Goodyear lui aient permis de toucher pour la course un train de pneus à la bande de roulement renforcée. Certaines archives abordent le sujet.   

Matra quitte la F1 à l’issue de cette saison. La malédiction des graves noires va cesser avec l'abandon de ce beau circuit par la Fédération française pour ce qui concerne les grandes courses internationales …

 

(*)  Amon ne fut pas le seul à subir une crevaison, Redman,  Depailler,  Adamich et Ickx connurent  le même sort. Helmut Marko quant à lui perdit un œil à la suite d’une projection de pierre.

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- Images ©DR

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Jim Redman : Hard Years (2)

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Cette note termine « Hard Years », le chapitre 2 de la biographie de Jim Redman. On comprend à sa lecture toute la force de caractère qu’il a fallu au pilote Honda pour surmonter les aléas de la vie. Pour autant, jamais on ne se résigne, jamais on ne s'ennuie, pour un peu on se croirait dans une fiction d'aujourd'hui. Mais ne vous y trompez pas, il s'agit ici de réalité pure et dure.

A l'heure où beaucoup se lamentent à propos de leur misérable « pouvoir d'achat », il est bon de se remémorer quelles pouvaient être les conditions de vie dans l'Angleterre et autres pays européens au début des années cinquante. C'est entre autres ces conditions rudes qui allaient forger toute une génération de pilotes mythiques, qui sont restés pour la plupart dans notre mémoire.

On retrouve ça et là quelques titres de musique qui ont rajoutés afin d'aérer un peu le texte. Vous pourrez vous amuser à les identifier...

Cette note marque aussi le 10e anniversaire de ce site, initié le 30 juillet 2012 suite à la disparition soudaine de "Mémoire des Stands".

Francis Rainaut

- voir également Jim Redman : Hard Years (1)

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Masters of War

... En 1944, ma mère a finalement reçu des nouvelles de mon père, mais ça n’était pas bon, en fait, c’était terrible. Sa propre mère était en train de mourir et il avait tenté en vain d’obtenir quelques jours de congé pour raisons familiales afin d’être avec elle. Cela lui fut catégoriquement refusé et ma grand-mère paternelle est morte cette année-là sans voir son fils bien-aimé pour la dernière fois. Cet événement tragique a été le tournant de la vie de mon père. Je me suis souvenu plus tard que ma mère nous avait dit que ses lettres changeaient et que leur ton devenait de plus en plus amer.

La guerre se termina enfin et, bien que l’Angleterre ait été dévastée par les bombardements incessants, son peuple était libre. Les jumeaux purent rentrer chez eux. Nous ne les avions pas vus depuis trois ans - trois longues années ! Ils avaient maintenant huit ans et étaient gentils et en bonne santé. Ma mère était fascinée par leur nouvel accent et ne pouvait s’empêcher de leur poser des questions sur tout ce qu’ils avaient vu ou fait pendant leur absence, afin qu’elle puisse comprendre leurs nouvelles manières et habitudes apprises pendant leur séjour.

Petit à petit, la famille Redman était à nouveau regroupée, mais cela n’a pas empêché ma mère d’être toujours très stricte sur nos tâches ménagères. Chacun d’entre nous connaissait ses tâches, que nous faisions ou alors étions punis, et nous n’étions pas autorisés à écouter la radio le soir à moins que nos devoirs ne soient terminés. Enfin, un jour, nous avons reçu la grande nouvelle ; notre père rentrait à la maison. Nous étions tous tellement excités à l’idée de le revoir - enfin, nous allions être réunis et redevenir une vraie famille ! Il avait passé six ans en Afrique - six longues et interminables années loin de sa famille, dans la solitude la plus totale - avec les forces alliées, et n’avait pas réussi une seule fois pendant tout ce temps à obtenir des congés pour rentrer chez lui.

Nous ne sommes pas allés à sa rencontre parce qu’il préférait rentrer seul à la maison. Avant qu’il n’arrive, mon souvenir était celui d’un homme gai, doux et charmant, et je m’accrochais de toutes mes forces à cette image de peur de me retrouver devant un étranger. Quand nous l’avons vu, il était terriblement mince, son visage était fatigué, son corps plié, visiblement usé et meurtri par tout ce qu’il avait enduré. Il avait même été touché par des éclats d’obus et semblait grandement diminué à cause de cela. Ce fut un gros choc pour nous, mais encore plus pour lui. Il semblait perdu, incapable de trouver ses repères. Les jours passèrent. Il parlait peu et se refermait de plus en plus sur lui-même, malgré tout l’amour et le soutien de ma mère. Son retour à la vie civile allait être extrêmement difficile.

L’armée lui trouva rapidement un emploi de livreur de lait, mais le salaire net était modique. De plus, depuis le retour de son mari, ma mère avait cessé de louer des chambres à des employés de l’usine qui pouvaient maintenant retourner à leur travail normal. J’ai aidé mon père du mieux que je pouvais, en l’accompagnant dans ses tournées chaque fois que le temps scolaire le permettait. J’ai adoré être avec lui à ces moments-là. Il m’a laissé conduire le cheval et la charrette, nourrir et nettoyer l'animal et j’ai adoré cela. Les disputes qui avaient divisé mes parents dans le passé semblaient maintenant oubliées, mais après quelques semaines de calme relatif, la situation s’est à nouveau détériorée. Alors qu’avant ce n’était que des mots, c’était maintenant des cris violents, au cours desquels ma mère explosait en larmes. Comme toujours, je défendais ma princesse. 

 

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"Mum" Redman

I Can See for Miles

Une fois, alors que j’étais submergé par les cris et les larmes de ma mère, je me suis précipité dans la chambre de mes parents et j’ai violemment poussé mon père hors de la pièce. Lui - qui pensait que ses enfants le considéreraient comme le héros conquérant - n’avait jamais imaginé que ce serait notre mère qui allait susciter toute notre admiration. À l’époque, nous lui en voulions tellement que nous ne pouvions pas arrêter de nous moquer de lui et de l’appeler « vieil homme » ou « sympathie », et tout cela parce qu’un jour, il avait négligemment laissé échapper, de manière résignée, que la seule chose qu’il souhaitait de nous était un peu de sympathie. Une chanson populaire de l’époque que tout le monde fredonnait s’appelait Sympathy et nous avions pris l’habitude de la chanter derrière son dos. À une autre occasion, Wendy et Peter préparaient une sorte de bonbon sucré au cacao dans une vieille boîte de tabac, dans laquelle ils ont trempé leurs doigts. Notre père les a surpris et a crié avec colère : « Que faites-vous tous les deux ? » Le bruit de sa voix les effrayait tellement qu’ils couraient à l’étage et s’enfermaient dans la salle de bain. Mon père s’est précipité dans les escaliers et a frappé plusieurs fois à la porte, les implorant de l’ouvrir. Mais Wendy et Peter, pour qui mon père était un parfait inconnu, n’obéissaient pas, tant ils avaient peur de la colère de cet homme. Au bout d’un moment, cependant, ils l’ont entendu pleurer et ont légèrement ouvert la porte. Il était assis, complètement perdu, pleurait et répétait doucement « mes enfants, pourquoi avez-vous si peur de moi ? » Wendy et Peter se sont regardés, n’ont pas bougé, et n’ont pas dit un mot.

Malgré leurs violentes disputes, mon père n’a jamais frappé ma mère. Il était évident qu’ils s’aimaient, mais qu’ils ne pouvaient plus se comprendre ou se tolérer et qu’ils ne pouvaient donc plus vivre ensemble. Pendant trop d’années, ils avaient été séparés et maintenant trop de blessures anciennes et nouvelles, trop de malentendus les séparaient à jamais.

Aucun de nous, les enfants, ne détestait notre père, juste le fait qu’il rendait notre mère malheureuse. Jackie et moi avons découvert plus tard que la première chose que mon père a demandé à ma mère, tout en la tenant tendrement dans ses bras, était de savoir si elle lui avait été fidèle pendant son absence ... Finalement, c’est l’armée qui a décidé de l’avenir de mon père en l’envoyant dans un centre de réhabilitation dans une ferme, dans l’espoir qu’il puisse retrouver le chemin de la vie civile. Dans sa jeunesse, mon père avait grandi à la campagne et travaillait dans une ferme. Avant de partir, il a demandé à ma mère s’il pouvait emporter avec lui des effets personnels, comme sa collection de timbres et son précieux piano car, sans eux, il ne partirait pas. À ma grande surprise, elle a accepté ; elle était si fatiguée des disputes brutales, de la tension entre eux et du mal qui consumait constamment mon père et sur lequel elle n’avait aucun contrôle, qu’elle aurait accepté toute condition qui l’éloignerait de chez nous. Quelque temps plus tard, il est rentré chez lui et la vie était à nouveau calme. Mon père semblait s’améliorer, du moins physiquement, mais tout cela était une illusion : en fait, il ne s’en est jamais complètement remis. Chaque fois que son anxiété revenait et que les disputes avec ma mère devenaient plus orageuses, il retournait dans une ferme différente, jusqu’au jour où il abandonna tout espoir d’être guéri et se résigna, cette fois, à partir pour de bon. Le problème était qu’il avait vu tellement de choses et, comme je l’ai découvert beaucoup plus tard, qu’il avait été un pilote de moto et un chauffeur de camion de munitions assez courageux, qu’il était « choqué par les obus », comme on l’appelait.

 

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School's Out

En 1946, je venais d’avoir 15 ans et j’ai été obligé de quitter l’école, avant même d’avoir obtenu mon Matric (baccalauréat, Ndt), parce que mes parents n’avaient plus les moyens de me garder là-bas. Mon père venait à nouveau d’être envoyé dans une ferme, cette fois près de Bath, pour une durée indéterminée. Maintenant, même si ma mère recevait une petite allocation de l’armée, elle n’était pas en mesure d'assumer les besoins financiers de toute une famille. C’est pourquoi j’ai dû quitter l’école et commencer à chercher du travail. En tout cas, je savais au fond de moi que je n’aurais pas réussi l’examen ; il devenait de plus en plus difficile pour moi d’accepter l’autorité stricte de l’école.

J’ai trouvé un emploi et j’ai commencé à travailler immédiatement en tant qu' « improver » (metteur au point , Ndt) dans l’atelier de réparation automobile d’un grand constructeur et entrepreneur en génie civil dans la région appelée Taylor Woodrow. Avec l’avenir si incertain en cette période juste après la guerre, les garagistes ne signaient pas de contrats d’apprentissage, mais utilisaient plutôt ces contrats de techniciens pour les jeunes hommes à la recherche d’un emploi. Au fur et à mesure que nous avancions dans nos connaissances et nos compétences, nous avons pu monter en puissance pour enfin devenir mécaniciens à part entière. Alors, j’ai balayé le sol, nettoyé les pièces de rechange et commencé à faire des réparations simples. Par-dessus tout, j’ai regardé, écouté et appris rapidement. Ma mère était très fière de moi. Un jour, elle revint de la bibliothèque publique avec un livre sur Henry Ford. Debout près de moi, et d’une voix confiante, elle a dit : « Voilà, vous avez commencé sur la dernière marche comme Henry Ford et vous aussi, vous pouvez devenir aussi grand et aussi important que lui. » Elle nous a vraiment fait croire à l’impossible.

Même si je ramenais de l’argent à la maison, ce n’était pas suffisant, et nous devions augmenter le revenu familial. À cette époque particulière, il y avait beaucoup de gens du nord de l’Angleterre et de l’Irlande qui cherchaient du travail, et ma mère a donc décidé d’accueillir à nouveau des locataires. Après la guerre, la reconstruction s’est opérée partout : ponts, routes, bâtiments, bureaux, tous avaient été endommagés ou détruits par les bombardements, et il y avait donc beaucoup de travail autour, en particulier dans la région du grand Londres. Nous avons pu loger plusieurs personnes dans notre maison, la plupart étaient des hommes gentils et bien élevés.

Je me souviens d’un en particulier. Il était irlandais, marié, père de plusieurs enfants, et a commencé à m’emmener avec lui quand il allait pêcher le week-end. Il était courtois et charmant et, par la façon dont il regardait ma mère, il était facile de deviner qu’il était entiché mais, bien sûr, elle a fait semblant de ne pas le remarquer. Quoi qu’il en soit, elle est toujours restée polie et amicale envers lui. Je pense cependant qu’elle n’était pas complètement indifférente à lui mais restait totalement silencieuse sur le sujet et s’il y avait un secret entre eux, c’était un secret très bien gardé...

Récemment, alors que Jackie lisait un journal, elle est tombée sur un article relatant l’histoire d’un vagabond irlandais qui, depuis 50 ans, errait dans toute l’Angleterre. Il n’était jamais retourné chez lui en Irlande et avait récemment été retrouvé mort à l’âge de 94 ans. À son grand étonnement, l’homme en question portait le même nom, Paddy Duffy, que le jeune Irlandais qui avait logé chez nous 50 ans auparavant. L’âge était juste, donc l’idée nous a traversé l’esprit que cela pouvait être un seul et même homme qui avait, à cause d’un amour impossible pour une femme - notre mère - passé toute sa vie à errer, rêvant d’un amour qui ne pourrait jamais être.

 

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Black denim trousers and motorcycle boots

Dans le garage où je travaillais, deux des mécaniciens, Keith Starling et Bob Baker, possédaient leurs propres motos, il était donc naturel que je gravite autour eux car j’avais toujours été intéressé par les bécanes. Au fil des jours et des semaines, nous sommes devenus amis, et souvent le week-end, nous partions faire un tour ensemble. Je roulais sur l’une ou l’autre des motos, me tenant fermement et devenant ivre par la vitesse et l’incroyable sentiment de liberté. Ce n’était pas assez pour moi cependant - je voulais apprendre à en conduire une moi-même, alors finalement Bob m’a appris comment. Dès la première fois que j’ai saisi le guidon de cette moto, j’ai su que je devais avoir la mienne.

 

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C’était juste avant mon 16e anniversaire et je suis allé de magasin en magasin, à la recherche de la moto qui allait devenir la mienne. Après beaucoup d’indécision, j’en ai finalement trouvé une que j’aimais, ce n’était en aucun cas mon premier choix mais mon budget était très limité. C’était un monocylindre d’occasion, ex-War Department, une 350cc Matchless, avec des fourches à poutres et un cadre rigide. Ma mère a accepté que je puisse l’obtenir si je pouvais travailler sur un plan pour la payer : elle était proposée à 70 £. C’était beaucoup plus que ce que j’avais, mais un petit dépôt l’a garantie et ma mère a signé le contrat de location-vente. À l’époque, je ne gagnais que 1 livre 15 shillings par semaine, donnés pour l'essentiel à ma mère car mon père n’était pas là, ne gardant qu’un minimum pour l’argent de poche. Mais je voulais vraiment cette bécane et j’ai décidé de trouver un emploi dans la livraison de journaux tôt le matin, avant d’aller au travail. Cela payait 10 shillings par semaine, mais ce serait tout à moi et tout cela irait vers le paiement de la moto. Sur mon itinéraire de livraison des journaux, je lisais les magazines de moto. Je ne pouvais pas me permettre de les acheter et, bien sûr, je suis tombé amoureux des nouvelles motos affichées, rêvant qu’un jour je pourrais échanger ma bécane contre l’une d’entre elles. J’ai suivi aussi les courses de moto, et je savais juste que c’était quelque chose que je devais faire.

 

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Vincent Comet 500cc

 

Des années plus tard, après avoir payé la Matchless et l’avoir échangé pour une bicylindre Triumph d’occasion, j’ai pu acheter l’objet de mes rêves, un Vincent Comet 500cc. En utilisant la Triumph comme dépôt, j’avais suffisamment pour l’acompte, le reste je rembourserai petit à petit à crédit. Nous avons appelé cela le « flux goutte à goutte » et, en fait, j’ai passé plus de temps à nettoyer et à faire briller ma moto que de la conduire car tout l’argent des journaux est allé payer la location-vente. Frustré de ne pas avoir d’argent pour l’essence, un jour au travail, j’ai siphonné de l’essence dans les réservoirs de quelques voitures différentes pour la mettre dans ma bécane. On m’a pris en flagrant délit et on m’a dit de démissionner immédiatement. Le même jour, j’ai trouvé un nouvel emploi dans un autre garage à environ 100 mètres de là, appelé Ellbourne’s Garage, dont le propriétaire, le colonel Ellbourne, était un ancien militaire. C’était un bâtiment très imposant, avec sa propre station-service, sa salle d’exposition et son garage pour les réparations, et j’ai travaillé là jusqu’à l’âge de vingt ans.

Malheureusement, dans le même temps, la famille a de nouveau été frappée par la main du destin. Un matin d’hiver, Jackie a subi de violentes douleurs au dos qui l’ont empêchée de respirer. Notre médecin de famille, le docteur Ginsberg, est arrivé presque immédiatement et son diagnostic était très alarmant : Jackie souffrait de pleurésie et de pneumonie combinées. Elle a été immédiatement transportée d’urgence à l’hôpital où il a été découvert qu’elle avait également contracté la tuberculose. Ma mère était dans un état d’effondrement total, mais devait être forte pour nous tous. J’étais - et je suis toujours - très proche de mes sœurs, et c’était insupportable de savoir que Jackie était loin de moi, dans une chambre d’hôpital entourée de malades. Au cours des six mois qui ont suivi, chaque fois que c’était possible, nous avons rendu visite à tour de rôle à Jackie, afin qu’elle puisse avoir les livres dont elle avait besoin pour étudier, des livres qui lui étaient enlevés dès que le membre de la famille avait quitté la pièce.

Elle était très volontaire et, avec ça et un peu de chance, elle se remit relativement rapidement de sa maladie mais, à sa grande déception, elle dut encore rester six mois à la maison pour un repos complet. Elle, qui adorait étudier et apprendre plus que toute autre chose, a dû se résigner à l’idée de quitter l’école pour toujours et de chercher un emploi une fois qu’elle fut debout.

Je gagnais maintenant plus que les mécaniciens expérimentés, ce qui a fait une grande différence pour moi et ma famille, même si j’ai continué à livrer les journaux pour payer ma nouvelle moto. Bob, Keith et moi avions acheté trois Vincent HRD 500cc flambant neuves, Cornet monocylindres et nos plaques d’immatriculation avaient des numéros consécutifs : LXH 767, LXH 768 et LXH 769. Nous avons vraiment ado

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04 août 2022 | Lien permanent | Commentaires (3)

My Sweet Lord

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Bien que les équipes de course amateur aient été la règle plutôt que l’exception pendant une bonne partie du vingtième siècle, beaucoup de gens pensaient qu’elles étaient en voie d’extinction au cours des années septante. Aucune équipe supposée amateur ne pouvait exister longtemps sans être sponsorisée, dans la plupart des cas, par un grand nom de l'industrie du tabac ; et même avec un tel soutien, il était encore difficile de réussir.

Ce fut donc complètement à contre-courant que le Team Hesketh débarqua en Formule Un en 1973 puis, sous les rires et les quolibets de ses rivaux, commença à obtenir des résultats intéressants avec une March 731 de location. Il ne fallut alors plus beaucoup de temps pour que les rires ne se transforment en admiration et envie, enfin que le Team Hesketh soit accepté comme membre à part entière de la Grand Prix ‘Society‘.

par Alain Hawotte

 

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Le Team Hesketh

A l’origine de cette équipe était un passionné, garçon extraverti et excentrique qui profitait d’un héritage important et qui prenait un plaisir fou à le dépenser en s’amusant…

Fan depuis toujours de courses et de vitesse, il avait vite fréquenté Anthony « Bubbles » Horsley, un pilote de F3 en 1970, pilote sans grands résultats d’ailleurs, mais particulièrement bon vivant, ceci entrainant probablement cela…! Horsley devint vite le bras droit de notre jeune Lord. (1)

En 1970 également, un certain de James Hunt tentait sa chance. James était rapide, mais cassa tellement de March que son nom fut vite transformé en Hunt « THE SHUNT » (l’accident) par raillerie, se fâcha avec Mosley, et fut viré mi-72. James rencontra alors Horsley en Belgique du côté de Zolder, dans les stands pour certains, dans un dancing pour d’autres… Un accord fut vite trouvé et Hunt finit la saison dans une F3 du nouveau team spécialement créé pour l’occasion par Horsley et son mécène.

 

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Pour 1973, on acheta une Surtees de Formule 2 mais Mister « Shunt » ne fut pas long à la mettre hors service en essais privés… En récompense James se vit confier une… Formule 1, une Surtees encore, pour la course des Champions et il finit troisième ! Le patron décida que c’était perdre son temps que de rester en F2 et on commanda une March tout en débauchant un jeune de là-bas, Harvey Postlethwaite, pour concevoir, dans le château du boss figurez-vous, une nouvelle F1.

Hunt, comme libéré par la confiance d’un team dévolu à sa cause et à sa façon d’aborder la course, tout en joie, rire, et frasques, explosa : un premier point au Grand Prix de France, quatrième à Silverstone et pour la dernière course une superbe seconde position derrière Ronnie Peterson au GP des USA. La March privée avait fait mieux que l’usine.

lord hesketh,james hunt,hesketh racingFallait-il donc prendre au sérieux ces joyeux drilles à la chemise blanche brodée d’un nounours et cette F1 sans aucun sponsor splendide dans sa robe immaculée aux couleurs de l’Union Jack : blanche à bandes rouge et bleue ? (2)

La question se posait car année-là, l’écurie était considérée avec réserve par les organisateurs. Soirées, champagnes, bateaux de luxe, Rolls Royce et jolies filles étaient le quotidien de l’entourage du Lord.

Dès le début de l’année 1974, une nouvelle F1 le Type 308 de Postlethwaite était engagée pour le Trophée International de Silverstone et première sortie, première victoire appréciée par son public, moins par ses rivaux très sérieux, trop sérieux peut être.

La saison de 1974 confirma les espoirs et la voiture vierge de tout sponsor bataillait au premier rang.

1975, fut l’année la plus marquante de l’écurie avec de nombreuses fêtes et surtout une, mémorable, après la superbe victoire de Hunt au GP de Hollande à Zandvoort.

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Mais « Le Patron », comme il l’avait fait broder en anglais « the Boss » au dos de sa chemise, n’avait malheureusement pas un trésor sans fond... Il avait toujours financé ses voitures seul et sans sponsors, et l'argent commençait à manquer : les Rolls devenaient moins nombreuses, le bateau moins long, le champagne moins frappé mais les filles restaient jolies… mais fin 1975, Le Boss décréta que la F1 et la course ne l’amusaient plus trop et décida de stopper toute activité… en réalité les fonds étaient épuisés… Hunt s’offrit à McLaren et y remplaça Fittipaldi pour gagner le titre après une saison dramatique que nous connaissons tous.

Les nouvelles voitures furent vendues à Frank Williams qui venait de s’associer avec Walter Wolf, magnat canadien du pétrole. La 308C de Postlethwaite devint la Wolf-Williams mais sans grand succès car mal née, ce que Hunt avait probablement perçu fin 1975 lors des premiers roulages.

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De son côté Bubbles Horsley maintint en 76 et 77 un ersatz du team légendaire en fin fond de grille en ayant recours à des pilotes payants avec l’ancienne voiture d’abord, puis avec la jolie 308E de l’ingénieur Franck Dernie. Remarquée pour son sponsor « Penthouse » et sa décoration, une jolie playmate ornant ses flancs, mais sans pilote de grand talent il était difficile de retrouver l’enthousiasme des débuts et dès 1978, l’écurie, joujou délaissé d'un millionnaire britannique se retira définitivement des grilles.

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Telle fut l’histoire belle et grivoise de l’écurie HESKETH, le dernier team romantique de la F1.

 

(1) Anthony 'Bubbles' Horsley fit partie de cette bande britannique de joyeux lurons comprenant notamment Jonathan Williams, Charles Lucas, Frank Williams, Charlie Crichton-Stuart et Piers Courage. Leur repaire était situé à Harrow - Flat 6, 283 Pinner Road. Si les murs pouvaient parler, ils auraient beaucoup à nous raconter sur les frasques de ces jeunes pilotes mais aussi de visiteurs illustres tels que Jochen Rindt ou encore Innes Ireland. Ce fut Charles Lucas qui présenta 'Bubbles' au jeune Lord Thomas Alexander Fermor-Hesketh.

(2)   Extrait d'un article de Sports Illustrated, May 13, 1974 by Robert F. Jones:

“Reading,“ says Alexander, "is a consuming passion of mine. Only one of many, mind you." He is recovering now from his bout with the flu, though a nasty cough persists, making him sound all the more like Robert Morley dying in African Queen. "I don't think that reading and motor racing mix that well—at least, most racers don't read. They don't do much more than race, actually. They can't; it's so demanding a sport. He who reflects, one might say, cannot race. Imagination and action are to some extent antithetical. Yet the sport is deep in history—deeper even than the Mosses and Fangios and Nuvolaris. It goes back, in my mind at least, to those wonderful point-to-point horse races of the 18th and 19th centuries, to the Regency rakes who drank far too much and celebrated the Black Mass and did all sorts of dreadful things, including riding too fast for their own good. Daring should be fun."

“Nothing disturbs me more than that pale cast of mind which insists on removing the joy from action, which reduces it to a dry, commercial, mathematical set of formulae. When I first met Bubbles—I was in my teens then—he confirmed what I had felt as a boy, reading about motor racing: that it was Adventure. So much of that has gone out of the sport in the past 10 years. We want to see if it is still there. Not that Adventure is a sloppy, haphazard thing. It can coexist with sound engineering, intelligent teamwork, canny driving—all of that. But the whole effort must feel Adventurous. A state of mind that obviates ulcers. That is why I avoid sponsorships. Once one falls into the debt of the big companies, once one assumes those heavy responsibilities, the joy drains from the game as surely as oil drains from a split crankcase."

He coughs heartily and swallows half a mug of tea.

"Hesketh Racing is bankrolled entirely by my own company, Hesketh Finance. I use none of my inheritance for the racing effort. Oh, I'm not that moral a man, but I draw the line at squandering the family fortune on racing and leaving my widowed mother destitute. The new car, and even more the new V-12 engine, constitute great gambles, I admit. But what I want to do, quite frankly, is win the World Driving Championship with the minimum of outside help, win it on our own, out of our own skill and wit and—dare I say it?—daring. I want us to be remembered, not as a superteam built of superstars and supersupport, but as people who made it all seem to be fun. That may sound a bit wet in this workaday world, but I mean it. You know, I still have a box of my childhood toys in my room. Now and then, I take them out and play with them."

And if Hesketh Racing does finally win the championship, what then?

"I have a few more ambitions," his Lordship admits. "I would like to win the Indianapolis 500, with an all-girl pit crew. Can you imagine the look on A.J. Foyt's face? And I would like to enter us in American stock-car racing. We've seen a bit of that, and it's the most excitingly pure form of amateur racing in the world. The American South is closer to the world that I grew up in than any part of Europe or Britain. I love it. But ultimately, if the truth be told, my ambition is to win back the America's Cup for England. We lost it 125-odd years ago due to a lack of daring. I think I could find the right people to build the right boat and sail it right enough to win. Oh, we would have to live in America for a year, learning the currents and tides and winds off Newport, but that would be part of the fun, wouldn't it?"

Spot on, your Lordship.

lord hesketh,james hunt,hesketh racing

- Photos ©D.R.

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13 décembre 2014 | Lien permanent

Comme un avion sans aile - 1 - P142, la BRM secrète

tony rudd,peter wright,jim clark

Vers la fin des années soixante on commença à rajouter des ailerons aux monoplaces et autres prototypes afin d’augmenter leur vitesse de passage en virage. Ces ailerons utilisaient l’air « se précipitant » sur les rapides voitures de course pour créer une force verticale d’appui permettant un meilleure adhérence des pneus sur la piste afin d’accroitre le « grip » (1).

Certains ingénieurs parmi les plus créatifs considéraient cependant les ailerons comme une solution inélégante pour arriver à ce résultat. Dès lors ils n’eurent de cesse que de vouloir inventer la F1 « sans ailerons » qui utiliserait toute sa carrosserie pour générer de l’appui et de la déportance. Le concept n'était pas complètement nouveau, il faut se souvenir que cette voie avait été défrichée, dès les années vingt !... par l’ingénieur René Prévost, également aviateur (2).

par Francis Rainaut

tony rudd,peter wright,jim clark

B.R.M. P142: Aurait-elle assuré l’avenir de l’équipe ?

brm2.jpgTony Rudd - l'ingénieur en chef chez BRM - fut l'un des premiers à chercher une alternative aux ailes et ailerons dont la taille n'avait cessé d'augmenter à partir de 1968 avant que la C.S.I. n'y mette le holà un an plus tard, suite à l'épisode mouvementé de Barcelone-Montjuic (3).

Peter Wright, un ingénieur récemment diplômé du Trinity College de Cambridge et qui venait de rejoindre BRM, partageait le point-de-vue de Tony. Du coup on lui demanda de travailler sur le dessin d’une voiture qui utiliserait la totalité de sa carrosserie pour générer autant de force d’appui que les ailerons « rajoutés ». Le travail démarra dans le plus grand secret dans l’entrepôt de BRM à Exeter Street. Le plan était d’avoir cette nouvelle voiture révolutionnaire prête à courir pour le Grand Prix d’Italie en septembre 1969.

Afin d'expérimenter ses idées, Wright commença par rajouter des « side pods » sur les flancs d'une BRM P126. Ces side pods avaient une forme d'aile inversée, dans le but de générer sous les pontons une dépression qui « appuierait » la monoplace au sol. Jackie Oliver essaya la BRM, mais les résultats furent décevants, même si l'ingénieur reprit plus tard la même idée pour la toute nouvelle March 701.

tony rudd,peter wright,jim clark

Le projet P142 n’était connu que d’un tout petit nombre de personnes. Même la Haute Direction de Bourne n’était pas pleinement consciente de ce qui se passait. On fit des tests en soufflerie sur des maquettes et le travail commença alors sur la nouvelle monoplace.

Mais quand l'état major de Bourne découvrit toute l’ampleur de ce qui se tramait,  ils arrêtèrent tout cela immédiatement et remirent tous les moyens  sur le développement de la monoplace courante.

Une autre version impute clairement à l’arrivée de John Surtees chez BRM la responsabilité de l’abandon définitif du projet P142. Quoi qu’il en soit, Rudd ou Surtees, il fallait faire un choix…

tony rudd,peter wright,jim clarktony rudd,peter wright,jim clarkBRM P142, Imperial College Wind Tunnel

 

 

Peu de temps après Tony Rudd et Peter Wright quittèrent B.R.M. et rejoignirent Specialised Mouldings Ltd.,  une firme dessinant et fabriquant des éléments de carrosserie destinées aux voitures de course. C'est dans ce contexte que Robin Herd leur confia la conception de quelques évolutions pour sa March 701. Mais aucun pilote ne put jamais détecter la moindre différence de comportement de cette monoplace avec ou sans ses flancs ailés.

Et pourtant cette idée de réservoirs latéraux carrossés en aile d'avion inversée était bien la bonne... Il n'y manquait que les jupes pour rendre le travail de cette aile totalement indépendant de l'air extérieur.

tony rudd,peter wright,jim clark

Au sein de Specialised Mouldings Ltd., Wright apprit beaucoup sur l'aérodynamique et les matériaux composites puis il rejoignit TechnoCraft, une filiale de Lotus, toujours en compagnie de Tony Rudd.

Et ce ne fut que huit années plus tard que les victorieuses Lotus 78 et 79 de Formule 1 démontrèrent de manière évidente que les idées qui étaient derrière la conception de la « BRM secrète » allaient dans la bonne direction.

A ce moment là Tony Rudd et Peter Wright travaillaient tous les deux pour Lotus...

 

- Voir aussi  Wing car's technical 

 

(1) Dynamique des fluides, les bases :

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Source: Patrick Camus, Auto-Hebdo

L'origine de la déportance, donc de l'effet de sol et son fonctionnement, sont analogues à ceux d'une aile d'avion placée à l'envers.
Extrados = dépression = déportance ; Intrados = surpression = portance.
La dépression crée une force double de celle provoquée par la surpression. Un avion est donc aspiré dans l'air et non porté.

 

(2) Projet de véhicule à « effet de sol » présenté par René Prévost en 1928.

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(3) Synthèse rapide de l’arrivée des ailerons en F1 et monoplaces :

 

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- 1965 & Riverside 1966 : Bruce McLaren essaie un aileron sur sa M2A (contribution Michel Lovaty).

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- 1966 : L' Eisert Indy dessinée par Shawn Buckley dispose d'un becquet arrière.

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- Novembre 1967, Riverside : Jim Clark pilote une Vollstedt dotée d’un aileron (photo Bob Gates).

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- Janvier 1968, Tasman séries, Teretonga : à la demande de Jim, des mécaniciens Lotus montent aux essais un aileron fait à partir d’une pale de rotor d’hélicoptère sur la 49T de Clark. Ce montage n’est pas conservé pour la course, mais n’échappe pas au regard curieux du tout jeune ingénieur Ferrari, Gianni Marelli. (contribution photo Pascal Klein)

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- GP de Monaco : Boycott Ferrari, les Lotus 49 - de même qu'aux essais du GP d'Espagne peu de temps auparavant - apparaissent avec un important becquet à l’arrière, ancêtre des ailerons.

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- GP de Belgique : La Ferrari d’Amon et les Brabham courent avec un aileron, les Lotus avec un becquet.

- GP des Pays-Bas : début de la généralisation des ailerons.

- Mai 1969, GP d'Espagne : Accidents spectaculaires de Hill et de Rindt dûs aux ruptures de leurs - gigantesques - ailerons.

- GP de Monaco : La C.S.I. interdit les ailerons, puis ne les tolère que de dimensions restreintes.

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- Dessin Yardley BRM ©Francis Rainaut

- Autres illustrations ©DR

- March 701 "Wing Car", dessin Jordi Saillet, couleurs Luigi Mennella ©Philippe Bondurand

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In Memoriam Michel Lovaty

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20 mars 2015 | Lien permanent | Commentaires (1)

PILOTE D'USINE, par Johnny Servoz-Gavin

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APRES une saison 1967 marquée par des hauts et des bas, Johnny Servoz-Gavin décida de s'acheter une conduite. Le résultat ne tarda pas à se faire sentir et vers la fin de la saison il se classa quatrième en Formule 1 à Madrid. Nous savons combien cette performance avait impressionné Ken Tyrrell qui nous en parla longuement cet hiver. Mais Johnny était étiqueté comme un farfelu et Matra le mit au purgatoire, comme il le dit lui-même. Fort heureusement, il ne se découragea jamais, loin de là, et la malchance de Jackie Stewart devait faire son bonheur, puisqu'il était appelé à le remplacer au GP de Monaco, avec le résultat que l'on sait. Maintenant, Johnny est un vrai pilote de F1, avec une place de second au G.P. d'Italie à son palmarès, Sport Auto est heureux de présenter à ses lecteurs les impressions de ce jeune pilote dans une rubrique qui paraîtra désormais régulièrement.

G.C.

(Fac-similé d'un article de la revue Sport Auto, octobre 1968)

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"EN 1967, j'étais pilote officiel de Matra en Formule 2. La saison a mal débuté pour moi. Le seul bon souvenir que j'en ai gardé est le Grand Prix de Monaco où j'étais parvenu à qualifier ma Formule 2 lestée. Le reste du temps, je cassais, course après course, et j'en ai pris un vieux coup au moral. En y réfléchissant, je crois bien que tout compte fait c'était beaucoup de ma faute, car je n'avais pas pris la chose au sérieux. Dès le mois de juillet, j'ai compris qu'il fallait que je change d'attitude si je voulais garder ma place chez Matra. A partir de ce moment-là, j'ai vraiment essayé de finir toutes les courses, et surtout de bien les finir. Je me suis beaucoup plus occupé de ma voiture dont j'ai fignolé les réglages. Je suis ainsi allé chercher les dixièmes de seconde qui séparent les vedettes des négligents. Bientôt cela a payé et ma meilleure performance de la saison devait être une quatrième place dans la course de Formule 1 (ne comptant pas pour le Championnat du Monde) à Madrid en fin de saison, avec ma Formule 2 lestée.

Malgré tout, ma position chez Matra n'était pas des plus assurées. A la fin de l'année, on ne m'a pas offert le volant d'une monoplace pour 1968, comme je l'espérais. J'étais mis au purgatoire et tout ce que l'on me proposait, c'était de conduire et mettre au point le prototype.
Contrairement à ce que beaucoup auraient pu penser, je ne me suis pas démoralisé du tout, bien persuadé dans mon for intérieur que je ne tarderais pas à me rasseoir dans ce que préfère un vrai pilote : une monoplace. Certes, j'aime bien conduire un « proto » aussi, mais ce type de voiture ne permet pas de courir aussi souvent que la monoplace, et pour un pilote, l'entraînement est une chose primordiale. J'ai passé l'hiver à faire des essais avec la 630 à moteur Ford 4,7 l et à rêver à une saison 68 en Formule 2... je n'osais quand même pas penser à la Formule 1 !
La course de F2 de Jarama devait se terminer de façon catastrophique pour Jackie Stewart qui se cassait le poignet aux essais avec la Matra F2 de l'équipe Matra International de Ken Tyrrell. Il allait être indisponible pour encore bien plus longtemps qu'on ne le pensait alors. La première course où il fut ainsi mis sur la touche fut le Grand Prix d'Espagne.

 

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La Matra à moteur Matra n'étant pas encore prête, Ken Tyrrell confia sa Matra-Ford à Jean-Pierre Beltoise qui en tira un excellent parti mais eu la malchance d'être stoppé par des ennuis de lubrification après avoir mené la course.
L'épreuve suivante comptant pour le Championnat du Monde était le GP de Monaco. On n'apprit que peu de temps avant de descendre sur la côte que Jackie serait toujours indisponible. Le problème était de savoir qui allait piloter cette voiture aux performances très prometteuses. La V12 était enfin prête et la responsabilité de lui faire faire ses premiers pas en compétition incombait à Jean-Pierre. Par ailleurs, M. Lagardère ne voulait pas entendre parler d'un pilote étranger à l'équipe Matra-Elf. Claude Leguezec, le directeur sportif, recommandait chaudement son poulain Henri Pescarolo, mais M. Lagardère, se souvenant des conversations que nous avions eues dans le courant de l'hiver, essayait de me faire courir. Ken Tyrrell vint à mon secours et il poussa mon nom en avant. C'est donc moi qui fut choisi. Après un hiver sur des charbons ardents, mon optimisme était justifié... dès le troisième GP de la saison.
Je n'avais encore jamais conduit la Matra-Ford. En revanche, j'avais fait de nombreux essais avec la V12 et je connaissais bien le circuit de Monaco, quoique la rupture de mon distributeur d'injection m'y ait stoppé après deux tours seulement l'an passé.

Je suis descendu à Monaco le mercredi avec ma 530 (7 heures de route !) J'avais choisi de loger à l'hôtel Hermitage dans une grande chambre très calme, pour m'éloigner du tohu-bohu habituel. Tyrrell est arrivé le lendemain matin et nous sommes allés chercher les brassards à l'Automobile-Club : on était déjà dans le bain.
Ken Tyrrell est considéré comme l'un des grands directeurs sportifs de la course automobile aussi j'étais tout disposé à écouter les recommandations et les conseils qu'il m'a tout de suite prodigués. C'était extraordinaire de disposer ainsi de toute une équipe avec cinq mécaniciens et deux voitures pour mon premier vrai Grand Prix, comme si j'étais l'un des favoris du Championnat du Monde. L'ambiance que crée Ken Tyrrell dans son équipe était pour moi totalement nouvelle, car il n'y a qu'un seul patron : c'est lui. Les mécaniciens sont d'une efficacité et d'une discipline assez étonnante : je vivais un rêve.

La première séance d'essais se déroula le jeudi après-midi.Je m'étais déjà assis dans la voiture à Vélizy pour faire adapter le siège et les pédales, qui étaient réglés pour Jackie Stewart, mais il n'y eut rien à changer. Pour la première fois, j'allais partir dans une monoplace avec des ceintures de sécurité, accessoires que j'allais tout de suite apprécier et dont je ne voudrais plus me passer. Non seulement sur le plan sécurité, mais surtout pour le confort : le pilote est beaucoup mieux maintenu dans les virages, ce qui est particulièrement important à Monaco. Tyrrell m'avait bien recommandé de ne pas me lancer tout de suite et de commencer par m'habituer à la voiture et à la puissance du moteur Ford V8. J'ai essayé les deux voitures, mais dès le début je me sentis plus à l'aise dans la 11 T (châssis 01) qui répondait mieux à mon style personnel de conduite tout en glissades. Déjà les temps étaient bons et au fur et à mesure que les chronos s'amélioraient, je voyais Ken s'inquiéter de ma progression beaucoup trop rapide à son gré. Cette première journée terminée, je m'emparais d'un interprète pour suppléer à mon anglais insuffisant, et discuter avec Tyrrell des réglages à effectuer pour le lendemain.

 

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Après une assez longue conversation, il fut décidé de monter la voiture 11 (châssis 02) avec une boîte de vitesses à quatre rapports utilisables et la 11 T avec un échelonnement de 5 rapports. C'est là l'une des astuces caractéristiques d'un directeur des courses aussi compétent que Ken Tyrrell.
Le lendemain, les essais se déroulèrent aux aurores et Dieu sait si je n'aime pas me lever tôt. Cette journée fut pourtant marquée, pour moi, d'un très bon chrono de 1'28"8 qui allait me placer en première ligne au départ.
Des deux voitures, je préférais toujours la 11T et je demandais à Ken de l'équiper de la boîte à quatre rapports que je trouvais plus astucieuse et moins fatigante pour la mécanique car elle permettait d'économiser huit changements de vitesse par tour.
Le samedi, il pleuvait et Ken me demanda si je voulais quand même tourner. Il souhaitait naturellement me voir prendre la voiture en main dans des conditions nouvelles qui pouvaient se représenter le lendemain, mais d'un autre côté il semblait avoir très peur que je la lui casse ! Je n'ai donc fait que quelques tours, testant les nouveaux pneus Dunlop à bande centrale découpée pour éviter l'aquaplaning. De nouveau, je réalisais des temps très valables.

Le soir, nous prîmes la décision définitive de partir avec le mulet, surtout sur le conseil de Jackie Stewart qui m'avait dit : « Monaco est particulièrement pénible aussi est-il préférable de partir avec une voiture dans laquelle on se sent vraiment bien ». Peut-être que lui aussi avait peur que je lui casse sa voiture neuve ! Après le diner, je suis passé à la pharmacie pour y acheter des pilules pour dormir vraiment bien et elles se révélèrent si efficaces que je ne me suis réveillé qu'en fin de matinée, juste à temps pour le conseil de guerre que tenait Ken Tyrrell sur le balcon de la chambre de Jackie Stewart. Tyrrell est vraiment un coach qui a plus d'un tour dans son sac et il me donna ce jour-là, par l'intermédiaire de Gérard Crombac, toute une série de conseils des plus précieux.
Le premier était le suivant : « Graham Hill est toujours lent à se mettre en action. Profites-en si tu peux pour prendre la tête, car il bloquera le peloton derrière toi et tu pourras ainsi gagner quelques secondes qui pourront se révéler précieuses par la suite. - Quelques heures plus tard, j'avais tout loisir de méditer sur la prudence de ce pilote chevronné dans les premiers tours.
Il me dit ensuite : si tu as dans ton rétroviseur Surtees ou Brabham, ne te laisses surtout pas impressionner : ils vont te montrer le poing. Mais c'est pour te la faire à l'estomac. S'ils ne parviennent pas à te doubler, c'est qu'ils ne vont pas assez vite pour cela, ne leur fait pas de cadeau, ils ne t'en feront pas.
Jackie a aussi mis l'accent sur la fatigue que procure ce circuit diabolique et la nécessité de se relaxer en permanence chaque fois que cela est possible, dans les deux lignes droites, et cela dès les premiers tours. Il faut se décontracter les muscles, et surtout ceux de la nuque. Pour les pilotes, Monaco est un calvaire à cause des accélérations et des décélérations incessantes. Dans les derniers tours, on souhaiterait ne plus avoir de tête, tellement elle pèse lourd sur les épaules.

 

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Le dernier geste de Ken, celui qui m'a le plus frappé, fut d'inspecter l'équipement que j'allais utiliser : casque, gants et surtout lunettes. Il m'a conseillé de mettre deux plexis superposés afin d'en arracher un à la mi-course et de me retrouver avec des lunettes propres. Ce conseil allait m'être précieux à Monza.
Ensuite, je suis allé déjeuner chez Bernard Cahier qui tenait table ouverte, mais j'avoue que mes pensées étaient ailleurs. Je me sentais très bien mais il m'était difficile de supporter les innombrables recommandations de tous ceux qui gravitent autour des coureurs, mais malheureusement se mettent rarement à leur place.
Je descendis ensuite vers les stands et dès que le moteur fut chaud, je fis deux départs pour m'entraîner, à la sortie du gazomètre pour ne pas trop attirer l'attention. Les mécaniciens poussèrent la voiture jusqu'à la fausse grille de départ pendant que je m'y rendais à pieds après avoir achevé de me préparer. Les spectateurs des tribunes m'acclamèrent comme si j'avais déjà gagné la course.

Le fait le plus extraordinaire que j'ai pu constater vint des mécaniciens : je m'assis dans la voiture et deux d'entre eux vinrent m'attacher mais aucun mot ne sortit de leur bouche : simplement un geste du pouce lorsqu'ils eurent fini. C'est à un petit fait comme celui-ci que l'on se rend compte de l'ambiance d'une grande écurie de course. Je pouvais me souvenir qu'à chaque fois que je prenais le départ en F2 la saison passée les mécaniciens m'abreuvaient de paroles et de tapes sur le ventre au moment où je m'en serais le plus passé.
Moteur en route, sans problème, je fais signe que tout va bien et nous allons nous placer sur la ligne de départ. Il ne reste que trente secondes et un regard vers Graham Hill, à gauche, me vaut en réponse son clignement d’œil caractéristique.

monaco 1968

Une demi-heure avant le départ, le directeur de la course Louis Chiron m'avait donné des explications sur sa façon de le donner : « surtout, que personne ne bouge avant mon signal ! » Cela va me servir. Quand Chiron fait signe avec ses doigts qu'il reste cinq secondes, je commence à embrayer avec 7 500 t/m au moteur, et j'avance lentement de 10 cm. Pour ne pas être en reste, Graham avance, lui, de 30 cm. Chiron lui ordonne à ce moment de s'arrêter, mais je continue ma pression insidieuse sur le directeur de course qui se voit forcé de baisser le drapeau : j'embraye à fond et tout étonné du succès de ma manœuvre j'attaque le virage de Sainte-Dévote avec dix mètres d'avance. La course est partie et j'attaque très fort dès les premiers virages. Déjà je passe le tunnel et freine pour la nouvelle chicane. Je rentre aussi fort que pendant les essais, pensant qu'il ne peut y avoir aucun problème puisque je suis en tête. Mais l'adhérence est mauvaise. Il y a de la poussière sur la route et mes pneus ne sont pas encore chauds ; la sortie est plus délicate que je ne m'y attendais car je pars en glissade des quatre roues et ne peux éviter de frôler le rail avec mes deux roues de gauche. Cela ne m'empêche absolument pas de continuer sur ma lancée et au premier passage Ken me signale de couper la pompe à essence électrique. Je réponds par le signal convenu car il m'avait dit « si tu oublies de nous accuser réception, nous te repasserons le signal à chaque tour pour être bien sûr que tu obéisses ! ».

 

#11 Johnny Servoz Gavin_..Matra International...Matra MS10... Motor Ford Cosworth DFV V8 3.0...jpg

J'effectue ainsi trois tours en tête avec une avance qui va croissante, mais malheureusement, à la sortie du virage du portier, en pleine accélération, au moment où j'enclenche la troisième, plus rien. En un centième de seconde j'ai passé en revue dans mon esprit toutes les hypothèses qui expliqueraient cet incident, mais la course est finie pour moi et je rentre au ralenti jusqu'à mon stand où l'on s'aperçoit de la rupture d'un demi-arbre au ras du dernier filet. Je fus très surpris de la réaction des gens qui pensèrent tout de suite que cela était dû à ma touchette du premier tour. Sincèrement, j'étais persuadé qu'il n'en était rien, mais ils étaient parvenus à convaincre Ken Tyrrell. Sa tête était celle d'un homme très déçu. Il ne l'était pourtant pas plus que moi, je pense, car je dois dire que je ne savais plus où me mettre. La course continuait à se dérouler et au fil des tours les voitures disparaissaient les unes après les autres de sorte que mon remord allait croissant, d'autant plus que tout le monde venait me trouver pour me dire : « tu vois, si tu avais fait une course sage, tu serais dans les trois premiers ». Cela n'était pas fait pour me remonter le moral. Pour me réconforter, j'essayais de chercher la compagnie de mes amis, du moins de ceux que je pensais l'être car si l'on en a beaucoup dans les moments de gloire, ils sont plus rare lorsque l'on est dans la mistoufle. Mais déjà je pensais aux courses futures que m'avait promises Ken Tyrrell.

 

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A Rouen sur la Cooper T86B

 

Tête-à-queue à 250 km/h

Après Monaco, je suis allé en spectateur assister au Grand Prix de Hollande à Zandvoort où John Cooper me demanda si je voulais conduire une de ses voitures au Grand Prix de France à Rouen.
Bien sûr, je savais que la voiture n'était pas très bonne, mais c'était pour moi une course de plus et j'allais essayer quand même de faire bonne figure.
Nous eûmes beaucoup d'ennuis mécaniques durant les essais qui furent d'ailleurs beaucoup trop courts, mais je parvins quand même à tourner plus vite que mon coéquipier Vic Elford, qui faisait sa première course en monoplace. L'ambiance de l'écurie Cooper était très sympathique, mais c'était celle d'une équipe où l'on a perdu l'habitude de gagner. Il se mit à pleuvoir juste avant le départ, mais je partis quand même avec des pneus pour le sec.
Après un bon départ, j'aborde la remontée qui suit le Nouveau Monde et à Sanson, nous nous gênons mutuellement avec Brabham et je pars en tête-à-queue. Tout le monde me repasse, sauf Siffert qui a dû changer sa batterie au départ, de sorte que je me retrouve avant-dernier.
J'attaque à fond et remonte petit à petit beaucoup de mes concurrents dans les dix tours qui vont suivre et au cours desquels je vois hélas à chaque passage les flammes et la fumée se dégager d'une voiture accidentée dont j'ignore alors qu'elle est celle de Jo Schlesser. Les débris de cet accident jonchent la piste et un éclat de métal s'est logé entre un pneu et sa jante. Cela va me procurer la plus belle chaleur de ma jeune carrière : j'aborde la courbe du Grésil à près de 250 km/h quand subitement le pneu se dégonfle et je pars en tête-à-queue. Beaucoup de choses défilent dans mon esprit, mais déjà cette toupie s'arrête contre le rail de sécurité à l'extérieur de la sortie de la courbe : heureusement qu'il était ici celui-là ! Je viens de l'échapper belle et tout heureux d'être indemne, je rentre à pieds à mon stand, trempé par l'averse qui redouble, ce qui me donne d'ailleurs l'occasion de me faire attraper par un gendarme qui me demande ce que je fais là !

 

Sur la touche au Nürburgring,
revanche à Monza

Ma deuxième chance dans l'équipe Tyrrell faillit m'être accordée au Nürburgring. Stewart n'était pas encore sûr de la force de son poignet et sur le sec il ne pensait pas pouvoir tenir le coup sur un circuit aussi dur que le Nürburgring. Il avait beaucoup souffert au G

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17 décembre 2022 | Lien permanent | Commentaires (24)

Hill,... Phil Hill

phil hill

L’américain Phil Hill est le trait d’union parfait entre le film "Grand Prix" et les Chaparral. Alain Hawotte nous livre ici sa vision du 1er champion du monde venu des U.S.A.

 

Phil croit à la chance, Phil croit au destin, Phil craint à la mort,

Et ces notions semblent guider son chemin vers le sommet de sa colline.

Les forces qui semblent diriger sa vie lui donnent le frisson, alors en 1955 après le décès de son ami et professeur, le vétéran Bill Vukovich à Indy et après la tragédie du Mans, Phil s'éloigne de la course automobile pris d’un doute sinistre... et se pose la question : Pourquoi ?

Il ne reviendra qu’appelé par Ferrari, car personne ne refuse un appel de Ferrari pour piloter.

S’il entre chez Ferrari en 1958, c’est en fait parce que le destin de Peter Collins était de perdre la vie au GP du Nürburgring…

Phil est introverti, sensible, amateur d’art et de musique, tout le contraire d’un chevalier des temps modernes… (1)

phil hill

C’est presque par hasard qu’en 1961 Phil est encore en course pour le championnat, survient alors une autre marque du destin, à Monza, son équipier Von Trips entre dans la foule et se tue, il ne sera pas le champion du monde 1961 ce sera Phil car les 156 Ferrari étaient imbattables cette année-là et que dans la Scuderia l'ordre était Von Trips, Hill, Ginther...

En 1962, les Ferrari sont à la peine et Phil aussi, perdu dans ses pensées… 63, 64 et 65 chez ATS et Cooper ne lui apporteront rien de bon, à part peut-être le désir de quitter la monoplace…

Attiré par les performances en soliste au début de sa carrière, c’est surtout en duo avec Gendebien qu'il marquera peut être plus les esprits. Il gagne d'abord trois fois au Mans avec Olivier, le belge.

Quittant Ferrari et la F1, il est alors appelé par Ford pour mettre au point les GT40, mais il ne profitera pas de son travail car engagé par une autre écurie américaine et partageant avec Sharp le patron lui même, puis avec Bonnier et Spence le volant de beaux oiseaux blancs du Texas, les Chaparral, il en obtiendra le plus de notoriété jusqu’en 1967.

Il arrêtera sa carrière lorsque ses belles Chaparral seront déclarées hors la loi en 1967 en remportant sa dernière course le BOAC 500 avec une 2F frappée du numéro 1, dernier clin d'œil au destin.

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Restant dans le monde automobile en restaurant de belles mécaniques dans sa Californie natale, Phil nous quittait discrètement le 28 août 2008.

Ah oui j’oubliais, Phil a, sans émotion particulière car c’était son destin et que pour s’accomplir il perdit un équipier, quand même gravi la colline, il est le discret champion du monde 1961, un certain Phil HILL.

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signé Alain Hawotte

 

(1) 1954 "Quand j’ai débuté la compétition, je ne pensais pas au danger. Je pense que je filtrais les informations dans mon cerveau pour diminuer les côtés négatifs et amplifier les côtés positifs. Après plusieurs années, j’ai commencé à prendre conscience que c’était un sport dangereux ou il y avait des accidents et on pouvait se tuer. J’ai commencé à faire de l’anxiété et j’ai développé un ulcère à l’estomac".

- Images ©D.R.

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14 août 2014 | Lien permanent

Stirling Moss, « Le Gars en Or »

stirling moss,goodwood 1962

L'actuel doyen des pilotes de Grand Prix, Sir Stirling Moss, OBE,  fête aujourd'hui ses 86 ans.

Dans son numéro de juin 1963, la revue Motor Sport publie un article signé Denis Jenkinson juste après que Moss ait décidé de mettre un terme à sa carrière, conséquence de son terrible accident de Goodwood l'année précédente.

Nous avons voulu, à l'occasion de l'anniversaire du pilote anglais, lui rendre un vibrant hommage en publiant l'article de son ami Jenkinson traduit en français.

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Sept. 1948, Cooper midget T43, Moss 1st victory ©Getty Images

  par Denis Jenkinson

 

     « Au cours des douze derniers mois, on m’a souvent demandé « Comment va Stirling Moss, est-ce qu’il recommencera un jour à courir ? », et tandis que certains parmi ces poseurs de questions faisaient cela uniquement parce que c’était à la mode de le faire, et que Moss c’était l’actualité, il y avait malgré tout un grand nombre de personnes issues de tous les coins de l’Europe qui étaient parfaitement sincères. Cela allait de gens qui connaissaient Moss, comme les mécaniciens de Maserati, à ceux qui ne l’avaient jamais rencontré, mais l’avaient admiré depuis les tribunes ouvertes au public, comme ce petit groupe de Belges enthousiastes qui me sollicitèrent pour lui transmettre leurs vœux de prompt rétablissement.

J’ai rencontré à travers toute l’Europe des gens qui étaient sincèrement inquiets de l’avenir sportif de Stirling Moss, et j’ai toujours répondu, en croisant les doigts, « J’espère qu’il courra à nouveau. » Au bout d’un moment j’ai changé cela en « S’il courre à nouveau » et désormais, comme nous le savons tous, je dois avouer « Il ne courra plus jamais. » Avec l’annonce officielle de sa retraite sportive, qui fait suite à des essais effectués au volant d’une Lotus 19, la course automobile n’a pas seulement perdu l’un de ses meilleurs pilotes, elle a aussi perdu le modèle que tous les concurrents cherchaient à imiter.

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May 1955, Mille Miglia victory with Denis Jenkinson ©Keystone/Getty Images

 

La plus grande qualité de Moss fut incontestablement de ne jamais connaître de « jour sans »; il était toujours au meilleur de sa forme et dans la mesure où la voiture était au point, c’est lui qui devenait la référence au moment même où il débutait ses essais. On pourrait écrire des pages entières sur Moss et ses capacités de pilote, au volant de n’importe quelle voiture, sur n’importe quel circuit, il est fort probable que beaucoup le feront, certains qualifiés pour cela, d’autres beaucoup moins, mais on se souviendra toujours de lui pour sa façon de ne jamais rien lâcher pour obtenir un résultat.

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2 Sept. 1956, Monza. 1st Moss, 2nd Fangio ©Getty Images

 

Certains font référence à Moss comme étant « le maestro » mais pour moi il ne pourra jamais le devenir car il n’a jamais eu le temps de devenir mûr, il a toujours été jeune et « maestro » sous-entend âge, compétence, sagesse et capacités. Moss possède la plupart de ces qualités et une large expérience mais quelque part il n’a jamais montré une personnalité ou un comportement de vrai « maestro » comme a pu le faire Fangio. Quand j’ai rencontré pour la première fois à Lisbonne en 1955 le regretté Mackay-Fraser (1) nous avons passé une soirée en compagnie de Moss, et ce fut l’habituelle soirée animée, avec Moss infatigable jusqu’à 2 heures du matin, heure à laquelle il s’arrêta instantanément pour aller se coucher, pendant que Mac et moi étions heureux de nous laisser aller encore une heure et de se relaxer doucement après un ou deux derniers verres.

(1) Connu sous le surnom de ‘Mac’, le pilote américain Herbert Mackay-Fraser fut le premier à perdre la vie au volant d’une Lotus, le 14 juillet 1957. (NdT)

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 14 May 1961, Monaco, Lotus-Climax 18 ©DR

 

Pendant tout ce temps, Mac parlait de Moss comme d’un « Gars en Or » (2) et j’ai toujours pensé que cette appellation était tout-à-fait appropriée. Il n’était pas l’égal de Fangio, étant suffisamment jeune pour être son fils, mais il dominait déjà de la tête et des épaules le reste de ses contemporains. Pour moi Fangio était le véritable « maestro » mais Stirling Moss restera toujours « Le Gars en Or ». Nous avons maintenant derrière nous douze mois de compétition depuis sa dernière course, théâtre de son accident, et on s’est désormais habitué à son absence des grilles de départ. Mais pour ceux d’entre nous qui ont vu Moss à son meilleur niveau - auquel il était la plupart du temps - et à mesure que les nouveaux pilotes établissent de nouveaux records ou réalisent des exploits remarquables, il ne faut jamais oublier de garder notre sens de la mesure lorsque l’on comparera les anciens et les nouveaux.

(2) « Golden Boy » dans le texte original en anglais. (NdT)

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 17 Jul. 1961, Gallery of Champions ©Getty Images

 

J’écris ceci à la veille de l’épreuve des 1000 km du Nürburgring, une épreuve au cours de laquelle Moss réalisa deux années de suite des choses en apparence impossibles au volant d’Aston Martin quand il dut composer avec des équipiers moins expérimentés (3), avant d’effectuer le « had-trick » lors de la troisième tentative, secondé alors par un brillant Gurney. Le circuit de l’Eifel fut également le théâtre d’un de ses plus grands triomphes lorsqu’il remporta le Grand Prix d’Allemagne avec sa Lotus-Climax obsolète, battant l’équipe Ferrari toute entière grâce à l’habileté de son pilotage, mais comme je l’ai évoqué un petit peu avant, on pourrait écrire un livre tout entier su le sujet.

(3) 1958, Jack Brabham qui découvre l’Aston Martin et le Nürburgring, 1959, Jack Fairman. (NdT)

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20 Apr. 1962, Goodwood, Stirling Moss, Lotus-Climax ©Getty Images

 

Il a été forcé de se retirer de la course auto pour les raisons qui ont obligé beaucoup de coureurs à le faire avant lui : sa vision est déficiente, sa capacité de jugement affaiblie, sa concentration ne tient pas très longtemps, ses réflexes sont passablement émoussés et enfin son adresse et sa dextérité ne sont pas au niveau où ils devraient être. Toutes ces choses surviennent habituellement chez un homme  lorsqu’il atteint un âge avancé, parfois 45 ans,  peut-être 55 ans, mais pas 33 ans.

En un instant fugace Stirling Moss est devenu subitement un vieil homme, du moins au regard des exigences requises pour faire partie du cercle des meilleurs pilotes de Grand Prix, tout cela dans un accident survenu lors d’une petite course insignifiante qui ne représentait pas beaucoup plus qu’une rencontre de club ou une petite épreuve sur terre, ce qui à mes yeux constitue le coté le plus désolant de toute cette histoire. »

traduit par Francis Rainaut

 

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Paris 2009, Stirling & his wife Susie ©F.Rainaut

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17 septembre 2015 | Lien permanent | Commentaires (1)

24H de Daytona 1968 - le hold-up de Porsche

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L'an 1968 : la réglementation du Championnat du Monde Sport-prototype évolue. La catégorie sport oblige l’utilisation d’un moteur issu de la série qui ne dépasse pas 5L de cylindrée et la production de cinquante exemplaires minimum. La catégorie prototype ne doit pas excéder 3L de cylindrée. Exit les monstres US de 7L et les superbes prototypes 4L de Maranello. Qui peut maintenant saisir l’opportunité et tirer les marrons du feu ? 

Début février 1968 : ouverture du Championnat en Floride sur le Speedway et routier de Daytona.

François Coeuret

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Le plateau

John Wyer présente deux Ford GT 40 aux mains de Ickx-Redman et Hobbs-Hawkins, V8 5L optimisé chez Gurney-Weslake. Porsche engage officiellement quatre 907 LH (Lang Heck) de 2,2L à capot arrière effilé. Au volant : Siffert-Herrmann, Mitter-Stommelen, Elford-Neerpasch et un équipage exotique franco-américain Schlesser-Buzzetta. Alfa-Roméo est présent avec quatre 33/2 usine 2Litres (Schütz-Vaccarella, Andretti-Bianchi, Casoni-Biscaldi-Zeccoli, Giunti-Galli).

 

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Autodelta a également dépêché deux Giulia sprint GTA en catégorie Tourisme -2L. La Howmet TX mue par une turbine à gaz (catégorie proto 3L) est l’attraction locale (Heppenstall-Lowther-Thompson). C’est un projet du pilote US Ray Heppenstall qui a convaincu Howmet corporation de se lancer dans la compétition automobile par le biais de cette technologie déjà testée à Indianapolis et par Rover-BRM en Europe. De nombreux pilotes américains sont bien sûr présents au volant de GT ou Tourisme +2L : Mustang Shelby, Chevrolet Corvette, Chevrolet Camaro, Porsche 911 fournissent le gros du plateau. Ferrari est représenté grâce à l’écurie satellite N.A.R.T., Vestey Racing et Raceco-Miami, trois 250LM et une Dino. Quelques étrangetés si l’on peut dire sur ce circuit : une Morgan, MGB, Volvo 122S, Jaguar XKE, Dodge Dart, Lancia Fulvia Zagato, des Triumph (TR4-GT6), plus réalistes une Chevron B6 BMW et une Nomad Ford.

 

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Les essais – la course

Les GT40 Wyer font office d’épouvantail face aux Porsche certes joliment profilées et Alfa-Roméo : 5L contre 2,2L et 2L. La hiérarchie pressentie au vu des données techniques de la liste des engagés se confirme sur la piste. Les Ford réalisent les meilleurs temps devant les Porsche, la Howmet et la Ferrari 250LM N.A.R.T de Piper. Ickx a réalisé la pole battant le record de Gurney en 67 sur la MKII. Giunti-Galli sont victimes d’un accident aux essais, leur Alfa n’est pas réparable. L’Alfa 33/2 de Schütz-Vaccarrella est neuvième, Pedro Rodriguez est dixième temps sur la Ferrari Dino du N.A.R.T. Les GT et tourismes américaines sont puissantes mais lourdes et moins dynamiques, elles ne peuvent jouer la victoire à la distance sauf circonstances exceptionnelles. Les pilotes les plus rapides aux essais sont Gulstrand-Leslie (15e), Patrick-Jordan-Caplan (16e), Grant-Morgan (17e), Revson-Yenko (19e) tous sur Corvette et Donohue-Johnson (20e) sur une Camaro.

 

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Samedi le peloton s’élance en formation puis est libéré au signal du starter agitant son drapeau. Les pilotes Ford prennent la tête suivis des Porsche, de la Howmet, des Ferrari de Piper et Rodriguez, des Alfa. C’est parti pour 24 heures. Au troisième tour Hawkins doit déjà stopper au stand pour un problème électrique, un câble d’alimentation est débranché. Quand la première heure se conclut, Ickx est en tête devant les quatre Porsche usine et la seconde GT 40. La Howmet est rapidement hors course, son pilote est victime d’une sortie de route provoquée par le blocage d’une soupape de décharge. La nuit tombe, Redman s’arrête soudainement en bord de piste et doit renoncer boîte défaillante (58e tour). C’est à ce moment que Hobbs qui avait relayé Hawkins reprend la première position, il a remonté les Porsche au prix d’un bel effort. La course se stabilise un bon moment et entame sa partie nocturne. En milieu de nuit des soucis techniques vont commencer à accabler la seconde GT40. Elle est inexorablement retardée par des stops au box. Elle laisse ainsi les Porsche aux avant-postes. La seconde Wyer va finalement abandonner après 430 tours à la suite d’une fuite du réservoir d’essence.

 

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Siffert-Herrmann tiennent dorénavant longuement la tête mais la 907 va jouer de malchance, elle s’arrête 22 mn au box pour résoudre un problème de frein, le support de pédale est cassé. La voiture repart en seconde position devant Schlesser-Buzzetta. Elford-Neerpasch ont pris la relève en tête, ils s’acheminent sauf problème vers la victoire. En fin de course le staff Porsche laisse conduire Siffert, Herrmann et aussi Stommelen sur la voiture de tête durant quelques tours. Ainsi ces pilotes sont récompensés de leur malchance se trouvant listés sur la feuille de classement en première position. Stommelen vit sa voiture abandonner dans un accrochage alors que son équipier était au volant.

 

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Cet accrochage a impliqué trois autos, la Porsche officielle N°53 (Mitter-Stommelen), la 907 privée N°55 (Steinemann-Spoerry) et la 250LM NART N°81 (Piper-Gregory). Les trois voitures restent sur le carreau. La voiture victorieuse N°54 sera donc créditée au classement final de cinq pilotes : Elford-Neerpasch-Siffert-Herrmann-Stommelen. Les américains Titus-Bucknum (Mustang Shelby) terminent quatrièmes à la distance et premiers de la classe Tourisme +2L devant les trois Alfa 33/2 et la Ferrari 250LM de Gunn-Ortega-Merello.

 

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Porsche égale Ferrari

Comme Ferrari l'avait fait en 1967, Porsche signe un beau triplé. La firme allemande regroupe ses trois voitures sur la ligne d’arrivée pour marquer son succès. Elle va rééditer une performance identique à Sebring (un doublé), clôturant une campagne nord-américaine triomphale. Un véritable hold-up alors que l’écurie Wyer fut accablée d’ennuis (quatre abandons en deux courses).

 

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Les vainqueurs autour de Huschke von Hanstein

 

Au bilan de fin de saison Ford vainqueur aux 24H du Mans remporte le Championnat suivi de très près par Porsche, trois points séparent les deux constructeurs.


 

- Illustrations ©DR

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14 mars 2023 | Lien permanent | Commentaires (1)

le New Look

memorytso,memories that stand out

 

L'été (1) est une période propice aux grands dépoussiérages. « Memories that Stand Out » vient tout juste de fêter ses trois ans, ce qui est peu et beaucoup à la fois.

Le moment est venu de repartir sur une nouvelle présentation, de se projeter vers une audience élargie à de nouvelles générations, en continuant bien entendu à garder l’œil sur le rétroviseur...

Les réglages dus à ce changement, cadrages, photos à la une, légendes,... devraient être finalisés vers le milieu du mois d'août. Après cette date, j'incite les très talentueux lecteurs de ce blog à signaler via un commentaire les anomalies détectées, la meilleure intervention se voyant récompenser par un objet fétiche (2) venu tout droit du Texas, plus précisément du Petroleum Museum de Midland et ayant pour thème... Chaparral, on ne se refait pas !

J'en profite pour solliciter à nouveau les contributions extérieures, tenir un site est beaucoup plus énergivore que de glisser quelques photos sur FB, que ceux qui auraient des difficultés avec l'orthographe se rassurent, la correction de quelques fautes n'est pas la partie la plus difficile du travail d'un teneur de blog.

Donc, Ladies and Gentlemen, Start your Engines  !

Et d'ici là, excellentes vacances.

 

(1) Ou peut-être le printemps...

(2) Exact replica of the 1964 Chevy-Powered Chaparral Team %%%

Francis Rainaut

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06 août 2015 | Lien permanent | Commentaires (6)

Pilotes et skieurs (*)

divina galica,patrick tambay,jc killy

Le calendrier s'y prête, nous rééditons - à temps cette fois-ci - la note parue il y a un an.

Si l’on vous parle d’un long « ruban » de quelque 3,3 km qui se découpe en portions dont les noms sonnent comme une menace, tels la Mausefalle (la souricière), un impressionnant saut qui propulse les coureurs dans le vide après quelques secondes de course, et le Steilhang (la pente raide), ne pensez pas qu’il s’agit d’un quelconque remake du Nürburgring, on parle ici de la Streif, cette piste de ski alpin située à Kitzbühel en Autriche et dont la descente mythique a lieu le 24 janvier 2015 (1) et (2).

L’occasion rêvée de faire un parallèle (!)  entre pilotes et skieurs.

(*) réédition

 

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Nombreux sont les « skieurs » à avoir soigné leurs trajectoires, à la fois sur les pistes verglacées et sur les pistes bitumées. Ils ont en commun les mêmes notions de vitesse, de trajectoire et de glisse. S’y ajoute un sens de l’attaque certain et une excellente maitrise technique des appuis.

Honneur aux dames, intéressons-nous en premier à la « divine » Divina Galica. La speedqueen, fille d’un presque collègue de James Bond, a participé à trois Olympiades d’hiver en slalom et en géant, à chaque fois en tant que capitaine de l'équipe féminine britannique olympique de ski et a aussi détenu un record du monde de vitesse à ski. Elle a ensuite enchaîné sur la course automobile où, après des débuts sur Formule Ford, elle a vite grimpé les marches jusqu’à la Formule 1 où, « unfortunately », elle a échoué à se qualifier aux trois Grand Prix auxquels elle était engagée, à une époque où les places sur la grille étaient très chères et son matériel pas de première jeunesse. Et je n’ai pas cité ses participations brillantes en Formule 5000, en championnat Aurora mais aussi en Formule 2 et en protos.

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L’autre exemple qui nous vient immédiatement à l’esprit, est celui de Luc « Lucho » Alphand, l’enfant de Serre-Chevalier, trois fois vainqueur sur la terrible Streif et aussi triple vainqueur de la coupe du monde de descente. Luc Alphand a aussi remporté la coupe du monde de ski au général, l’équivalent d’un championnat du monde de Formule 1, une belle revanche sur ses débuts qui furent émaillés de chutes et de blessures diverses, en bref le quotidien d’un skieur de compétition. Une fois la période ski terminée, Lucho a encore remporté le Dakar 2006 et  terminé 7e la même année des 24 Heures du Mans dans une Corvette de l'écurie Luc Alphand Aventures.

divina galica,patrick tambay,jc killydivina galica,patrick tambay,jc killyCe qui m'amène en trace directe à parler de Patrick Tambay (3) et du regretté Bob Wollek, tous les deux membres de l’Equipe de France de ski, le premier en équipe Junior, le second en équipe militaire, à la glorieuse époque d’Honoré Bonnet et du roi Killy, excusez du peu.

Tous les deux ont laissé une large empreinte dans le monde du ski et de la course automobile, ils ont fréquenté à la fois l'élite du ski français et la course automobile au plus haut niveau.

 

 

divina galica,patrick tambay,jc killyPuisque l’on en vient à évoquer « Toutoune », soulignons au passage sa pointe de vitesse sur quatre roues, notamment à la Targa Florio en compagnie de Bernard Cahier mais aussi au Mans avec Bob Wollek sur l’Alpine-Renault, équipage typiquement « alpin » s’il en fut.

Mais Killy n'a sans doute pas souhaité s'investir « à fond » dans une deuxième carrière sportive, ayant déjà donné pas mal d'années au ski de compétition et fourmillant par ailleurs d'idées et de projets comme on a pu le constater quelque temps après.

 

Avant eux il y eut l’avalin Henri Oreiller, le « fou descendant » vainqueur de la descente des J.O. en 1948, qui se consacra plus tard à la course automobile avec un brio certain, fut sacré Champion de France Tourisme des Rallyes en 1959, avant de se tuer en 1962 à Montlhéry à l’âge de 37 ans au volant de sa Ferrari 250 GTO , lancé à la poursuite du suisse Edgard Berney également sur Ferrari 250 GTO.

Henri fut par ailleurs engagé volontaire dans la SES (Section d’Eclaireurs Skieurs), une unité de la Résistance.

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divina galica,patrick tambay,jc killyCitons ensuite pêle-mêle le géantiste Georges Coquillard, le bobsleigheur britannique Robin Widdows (4), et chez les dames "Christine" Beckers.

Plus près de nous n'oublions pas le free rider Guerlain Chicherit (5) aussi à l’aise à ski que dans les montagnes d’Amérique du Sud.

 Enfin chez les pistards, nous mentionnerons Jacques Laffite dont le talent, dit la légende, fut détecté skis aux pieds, le grenoblois Johnny Servoz-Gavin ex-moniteur dixit sa bio, François Cevert et Jochen Rindt skieurs assidus, et bien sûr coté rallye Sébastien Ogier lequel est au passage moniteur de ski.

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Pour terminer il serait dommage ne pas citer Fernand Grosjean, le grand-père de Romain, qui fut vice-champion du monde de ski - pour la Suisse, nul n’est parfait - en 1950.

Il n’est donc pas surprenant que Michael Schumacher apprécie autant le ski, nous lui dédions tout naturellement cet article, écrit par un skieur pratiquant régulièrement depuis près de cinquante ans.

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    Francis Rainaut

 

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(1)    http://www.hahnenkamm.com/programm.html

A suivre sur Eurosport

(2)    «A Kitzbühel, on a un petit peu peur, et parfois très peur. Il n'y a pas beaucoup de descentes qui vous font cet effet», souligne le Norvégien Aksel Lund Svindal. «Elle est horrible, vous partez et les premières trente secondes sont un mélange entre tenter d'aller vite et tenter de survivre, c'est pourquoi l'atmosphère est si différente ici», estime le double vainqueur de la Coupe du monde 2007 et 2009.

(3)    Champion de France junior de descente en 1968, sélectionné en équipe nationale B

(4)    Finaliste aux J.O d’Innsbruck 1964

(5)    Quadruple champion du monde de ski freeride

Illustrations :

-          Divina Galica Shellsport International © DR

-          Divina Galica J.O. © DR

-          Divina Galica Chevron F2 © DR

-          Bob Wollek © DR

-          Patrick Tambay, Val d’Isère © DR

-          Jean-Claude Killy, Nürburgring 1968 © DR

-          Henri Oreiller, St-Moritz 1948 © DR

-          Robin Widdows, Cooper-BRM © DR

-          Jochen Rindt © DR

-          Mausefalle Hahnenkamm © DR

-          Bernie & Niki 2014 © DR

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22 janvier 2015 | Lien permanent | Commentaires (2)

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