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01 janvier 2015

January 1, 1965 : Africa King

A l’orée de la saison 1965 eut lieu sur le circuit d'East London le Grand Prix d’Afrique du Sud qui marquait le retour de ce pays - à l'époque sous régime controversé d'apartheid - dans le calendrier des Grand Prix. La semaine de course commençait fin décembre 1964 et le Grand Prix ayant lieu le 1er janvier représentait donc la première manche du nouveau championnat. De ce fait il constituait une sorte de postface de la saison 1964, la plupart des équipes s’engageant avec les pilotes et le matériel de la saison écoulée.

Tout ceci eut lieu il y a très exactement un demi-siècle, je vivais également en Afrique à cette époque, nettement plus au nord cependant.

Au passage, comme il est d'usage en cette période, nous n'oublierons pas de souhaiter à tous nos lecteurs et correspondants une bonne et heureuse année 2015.

Francis Rainaut

 

jim clark,jackie stewart,east london

 

La course se déroulait sur 85 tours du circuit d’East London, le « Prince George Circuit » long de 3,9 km. 28 pilotes étaient engagés, parmi lesquels on retrouve des noms - tels ceux du Rhodésien Clive Puzey ou des Sud-africains Neville Lederle et Ernie Pieterse - connus de seuls quelques rares initiés mais néanmoins aptes à faire le bonheur d'authentiques amateurs de quiz.

Inutile de chercher un quelconque pilote francophone, on était en pleine mainmise « british » sur le championnat du monde, Bandini, Rindt, Siffert , Bonnier et Gurney représentaient la seule opposition face aux sujets de Sa Gracieuse Majesté (1).

Parmi les 28 pilotes présents, trois ne devaient pas passer le cap (!) de la séance spéciale de pré-qualification, tandis que cinq autres allaient être éliminés à l’issue des séances normales.

Après l’épisode N.A.R.T. de fin 1964 (2), les Ferrari étaient à nouveau engagées sous leurs propres couleurs, mais sous le nom de leur manager Eugenio Dragoni, Enzo Ferrari n’ayant en effet pas encore récupéré sa licence officielle. Le champion sortant John Surtees commençait - de son propre chef - à défendre son titre sur la 158 V8 modèle 1964 tandis que Lorenzo Bandini était au volant de la nouvelle 1512 à moteur flat-12.

jim clark,jackie stewart,east london

Chez Cooper, Rindt héritait d’une T73 de 1964, tandis que McLaren disposait de la nouvelle T77, les autres engagements de la firme étant le fait de privés. Le Reg Parnell Racing ne présentait qu’une seule monoplace plus très récente pour le local Tony Maggs, ex-pilote officiel, les nouvelles machines n’étant pas prêtes.

jim clark,jackie stewart,east londonEn parcourant la liste complète des engagés, on trouve quelques raretés locales, telle cette Alfa Special conduite par Piet de Klerck, et autres LDS mk1 voire mk2.

Réveil matinal à 6 heures pour les qualifications du jeudi, afin de bénéficier de conditions météo plus fraîches. Mais tous les efforts déployés par les pilotes sont annihilés par la sortie des stands de l’ « écossais volant » qui réalise un temps de 1:27.2 tout en ayant été gêné par Sam Tingle sur son LDS-Alfa Romeo, lequel avait semble-t-il oublié l’existence des rétroviseurs.

En définitive Jim Clark va totalement dominer  les qualifications en prenant l’ascendant lors des trois séances, obtenant la pole avec un avantage de près d'une seconde, un gouffre. Le reste du top cinq se tient derrière dans un écart assez réduit (3).

jim clark,jackie stewart,east londonLe temps est sec et dégagé pour cette course du nouvel an. Quand le drapeau de l’Afrique du Sud s’abaisse, Clark fait un super départ, et se trouve déjà détaché avant le premier virage. Spence suit simplement la trace de son leader pour occuper la seconde position, avec Brabham juste derrière, puis McLaren qui a réussi un excellent envol depuis sa 8e position, enfin Surtees et Hill.

Les Lotus commencent à creuser un mince écart sur le reste du peloton, et l’attention se reporte alors sur Surtees; le pilote Ferrari a en effet dépassé McLaren au second tour pour le gain de la quatrième place, puis Brabham au 4e tour pour atteindre la troisième place après un départ plutôt mauvais. Gurney quant à lui visite rapidement les stands en raison d’un problème électrique, tandis qu’Anderson le rejoint bientôt en proie à des ennuis de freinage.

 

jim clark,jackie stewart,east londonAprès seulement six tours les Lotus sont débarrassées de Surtees qui ne parvient pas à se défaire de Brabham ni de Hill. Auteur d’un bon départ dans l’ancienne Brabham de Rob Walker, Bonnier doit ralentir suite à des problèmes de trappe à essence, ouvrant malgré lui le passage à Bandini. Il finira par abandonner, de même que Rindt victime d’ennuis de bougies ainsi que Love dont ce n’est pas encore l’année...

A mi-distance, Clark a fait le trou et devance Spence de 13 secondes, lui-même séparé de 12 secondes d’un groupe de chasse qui comprend Surtees, Brabham et Hill. Mais cet écart descend soudain à trois secondes après une légère sortie de route de la Lotus, et c'est le moment que choisit le pilote Ferrari pour accentuer la pression sur Spence. Sa situation se trouve même facilitée par les ennuis de Brabham dont le moteur commence à cafouiller et qui se fait ainsi doubler par Hill.

Spence se dirige alors vers une méritoire seconde place quand il part à nouveau en tête-à-queue à Beacon Bend, cette fois-ci sur l’huile laissée par le moteur Ford de Prophet, permettant ainsi à Surtees et à Hill de le dépasser.

jim clark,jackie stewart,east londonMalgré d’une légère inquiétude quand le directeur de course lui présentera le drapeau à damiers un tour trop tôt, l’ « écossais volant » gagne confortablement  cette course avec 29 secondes d’avance ; personne ne jouait dans sa cour ce 1er janvier. Il récidivera trois ans plus tard sur les hauteurs de Kyalami, pour ce qui deviendra son ultime victoire. Il mérite bien d’être appelé « Africa King » !

Derrière lui Surtees termine à une honorable seconde place, devant un troisième champion du monde, Hill. Spence en quatrième position fut un brillant animateur, il n’aura malheureusement pas le temps de laisser sa trace au palmarès des grands pilotes.

Signalons pour finir le résultat de l’ « autre » écossais, un certain Jackie Stewart qui marque un premier point pour ses débuts en Formule 1, au volant de sa B.R.M.

 

Et tout ceci s'est déroulé il y a très exactement cinquante ans !

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(1)  ou presque puisque l’Afrique du Sud, membre depuis 1931, a quitté le Commonwealth pendant l'apartheid, de 1961 à 1994 alors que la Rhodésie n’en sortira qu’en décembre 1966 après que les colons blancs aient proclamé son indépendance le 11 novembre 1965. 

(2)  conséquence d'une brouille entre Ferrari et la fédération italienne au sujet de l'homologation de la 250 LM en catégorie Sport.

(3)  Grille et résultats

 

- Image 2 ©Bruno Becce QuattroRuote.

- Autres images ©D.R.


22 décembre 2014

S'il vous plaît... dessine-moi une matra !

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C'est bien connu, le soleil se lève à l'Est. D'ailleurs en Alsace, on fête la saint Nicolas début décembre. C'est sans doute pour cette raison que François Blaise a repris son traineau et nous a ramené de l'International Motor Show du Luxembourg (1) les images de tous ces gros jouets bleus qui ont charmé notre jeunesse.

Fermons un peu les yeux le 24 décembre pour imaginer laquelle de ces merveilles on trouvera le lendemain au pied du sapin. Et merci à l'EPAF qui n'oublie pas que toutes les grandes personnes ont d'abord été des enfants.

(1) qui fêtait le cinquantenaire de Matra Sports.

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13 décembre 2014

My Sweet Lord

lord hesketh,james hunt,hesketh racing

Bien que les équipes de course amateur aient été la règle plutôt que l’exception pendant une bonne partie du vingtième siècle, beaucoup de gens pensaient qu’elles étaient en voie d’extinction au cours des années septante. Aucune équipe supposée amateur ne pouvait exister longtemps sans être sponsorisée, dans la plupart des cas, par un grand nom de l'industrie du tabac ; et même avec un tel soutien, il était encore difficile de réussir.

Ce fut donc complètement à contre-courant que le Team Hesketh débarqua en Formule Un en 1973 puis, sous les rires et les quolibets de ses rivaux, commença à obtenir des résultats intéressants avec une March 731 de location. Il ne fallut alors plus beaucoup de temps pour que les rires ne se transforment en admiration et envie, enfin que le Team Hesketh soit accepté comme membre à part entière de la Grand Prix ‘Society‘.

par Alain Hawotte

 

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Le Team Hesketh

A l’origine de cette équipe était un passionné, garçon extraverti et excentrique qui profitait d’un héritage important et qui prenait un plaisir fou à le dépenser en s’amusant…

Fan depuis toujours de courses et de vitesse, il avait vite fréquenté Anthony « Bubbles » Horsley, un pilote de F3 en 1970, pilote sans grands résultats d’ailleurs, mais particulièrement bon vivant, ceci entrainant probablement cela…! Horsley devint vite le bras droit de notre jeune Lord. (1)

En 1970 également, un certain de James Hunt tentait sa chance. James était rapide, mais cassa tellement de March que son nom fut vite transformé en Hunt « THE SHUNT » (l’accident) par raillerie, se fâcha avec Mosley, et fut viré mi-72. James rencontra alors Horsley en Belgique du côté de Zolder, dans les stands pour certains, dans un dancing pour d’autres… Un accord fut vite trouvé et Hunt finit la saison dans une F3 du nouveau team spécialement créé pour l’occasion par Horsley et son mécène.

 

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Pour 1973, on acheta une Surtees de Formule 2 mais Mister « Shunt » ne fut pas long à la mettre hors service en essais privés… En récompense James se vit confier une… Formule 1, une Surtees encore, pour la course des Champions et il finit troisième ! Le patron décida que c’était perdre son temps que de rester en F2 et on commanda une March tout en débauchant un jeune de là-bas, Harvey Postlethwaite, pour concevoir, dans le château du boss figurez-vous, une nouvelle F1.

Hunt, comme libéré par la confiance d’un team dévolu à sa cause et à sa façon d’aborder la course, tout en joie, rire, et frasques, explosa : un premier point au Grand Prix de France, quatrième à Silverstone et pour la dernière course une superbe seconde position derrière Ronnie Peterson au GP des USA. La March privée avait fait mieux que l’usine.

lord hesketh,james hunt,hesketh racingFallait-il donc prendre au sérieux ces joyeux drilles à la chemise blanche brodée d’un nounours et cette F1 sans aucun sponsor splendide dans sa robe immaculée aux couleurs de l’Union Jack : blanche à bandes rouge et bleue ? (2)

La question se posait car année-là, l’écurie était considérée avec réserve par les organisateurs. Soirées, champagnes, bateaux de luxe, Rolls Royce et jolies filles étaient le quotidien de l’entourage du Lord.

Dès le début de l’année 1974, une nouvelle F1 le Type 308 de Postlethwaite était engagée pour le Trophée International de Silverstone et première sortie, première victoire appréciée par son public, moins par ses rivaux très sérieux, trop sérieux peut être.

La saison de 1974 confirma les espoirs et la voiture vierge de tout sponsor bataillait au premier rang.

1975, fut l’année la plus marquante de l’écurie avec de nombreuses fêtes et surtout une, mémorable, après la superbe victoire de Hunt au GP de Hollande à Zandvoort.

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Mais « Le Patron », comme il l’avait fait broder en anglais « the Boss » au dos de sa chemise, n’avait malheureusement pas un trésor sans fond... Il avait toujours financé ses voitures seul et sans sponsors, et l'argent commençait à manquer : les Rolls devenaient moins nombreuses, le bateau moins long, le champagne moins frappé mais les filles restaient jolies… mais fin 1975, Le Boss décréta que la F1 et la course ne l’amusaient plus trop et décida de stopper toute activité… en réalité les fonds étaient épuisés… Hunt s’offrit à McLaren et y remplaça Fittipaldi pour gagner le titre après une saison dramatique que nous connaissons tous.

Les nouvelles voitures furent vendues à Frank Williams qui venait de s’associer avec Walter Wolf, magnat canadien du pétrole. La 308C de Postlethwaite devint la Wolf-Williams mais sans grand succès car mal née, ce que Hunt avait probablement perçu fin 1975 lors des premiers roulages.

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De son côté Bubbles Horsley maintint en 76 et 77 un ersatz du team légendaire en fin fond de grille en ayant recours à des pilotes payants avec l’ancienne voiture d’abord, puis avec la jolie 308E de l’ingénieur Franck Dernie. Remarquée pour son sponsor « Penthouse » et sa décoration, une jolie playmate ornant ses flancs, mais sans pilote de grand talent il était difficile de retrouver l’enthousiasme des débuts et dès 1978, l’écurie, joujou délaissé d'un millionnaire britannique se retira définitivement des grilles.

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Telle fut l’histoire belle et grivoise de l’écurie HESKETH, le dernier team romantique de la F1.

 

(1) Anthony 'Bubbles' Horsley fit partie de cette bande britannique de joyeux lurons comprenant notamment Jonathan Williams, Charles Lucas, Frank Williams, Charlie Crichton-Stuart et Piers Courage. Leur repaire était situé à Harrow - Flat 6, 283 Pinner Road. Si les murs pouvaient parler, ils auraient beaucoup à nous raconter sur les frasques de ces jeunes pilotes mais aussi de visiteurs illustres tels que Jochen Rindt ou encore Innes Ireland. Ce fut Charles Lucas qui présenta 'Bubbles' au jeune Lord Thomas Alexander Fermor-Hesketh.

(2)   Extrait d'un article de Sports Illustrated, May 13, 1974 by Robert F. Jones:

“Reading,“ says Alexander, "is a consuming passion of mine. Only one of many, mind you." He is recovering now from his bout with the flu, though a nasty cough persists, making him sound all the more like Robert Morley dying in African Queen. "I don't think that reading and motor racing mix that well—at least, most racers don't read. They don't do much more than race, actually. They can't; it's so demanding a sport. He who reflects, one might say, cannot race. Imagination and action are to some extent antithetical. Yet the sport is deep in history—deeper even than the Mosses and Fangios and Nuvolaris. It goes back, in my mind at least, to those wonderful point-to-point horse races of the 18th and 19th centuries, to the Regency rakes who drank far too much and celebrated the Black Mass and did all sorts of dreadful things, including riding too fast for their own good. Daring should be fun."

“Nothing disturbs me more than that pale cast of mind which insists on removing the joy from action, which reduces it to a dry, commercial, mathematical set of formulae. When I first met Bubbles—I was in my teens then—he confirmed what I had felt as a boy, reading about motor racing: that it was Adventure. So much of that has gone out of the sport in the past 10 years. We want to see if it is still there. Not that Adventure is a sloppy, haphazard thing. It can coexist with sound engineering, intelligent teamwork, canny driving—all of that. But the whole effort must feel Adventurous. A state of mind that obviates ulcers. That is why I avoid sponsorships. Once one falls into the debt of the big companies, once one assumes those heavy responsibilities, the joy drains from the game as surely as oil drains from a split crankcase."

He coughs heartily and swallows half a mug of tea.

"Hesketh Racing is bankrolled entirely by my own company, Hesketh Finance. I use none of my inheritance for the racing effort. Oh, I'm not that moral a man, but I draw the line at squandering the family fortune on racing and leaving my widowed mother destitute. The new car, and even more the new V-12 engine, constitute great gambles, I admit. But what I want to do, quite frankly, is win the World Driving Championship with the minimum of outside help, win it on our own, out of our own skill and wit and—dare I say it?—daring. I want us to be remembered, not as a superteam built of superstars and supersupport, but as people who made it all seem to be fun. That may sound a bit wet in this workaday world, but I mean it. You know, I still have a box of my childhood toys in my room. Now and then, I take them out and play with them."

And if Hesketh Racing does finally win the championship, what then?

"I have a few more ambitions," his Lordship admits. "I would like to win the Indianapolis 500, with an all-girl pit crew. Can you imagine the look on A.J. Foyt's face? And I would like to enter us in American stock-car racing. We've seen a bit of that, and it's the most excitingly pure form of amateur racing in the world. The American South is closer to the world that I grew up in than any part of Europe or Britain. I love it. But ultimately, if the truth be told, my ambition is to win back the America's Cup for England. We lost it 125-odd years ago due to a lack of daring. I think I could find the right people to build the right boat and sail it right enough to win. Oh, we would have to live in America for a year, learning the currents and tides and winds off Newport, but that would be part of the fun, wouldn't it?"

Spot on, your Lordship.

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- Photos ©D.R.

02 décembre 2014

La passion

SPA 66, j’ai 9 ans, un gosse..., un premier GP, un circuit, dans le lointain un bruit déchire les vallées humides des Ardennes, un nuage de pluie s’avance de plus en plus vite, un point rouge grossit, un pilote se bat, ses bras dansent sur son volant, un numéro 6 blanc, et une étincelle au fond de moi, chaque tour soufflera sur cette étincelle, attisera la flammèche qui deviendra brasero.

john surtees,ayrton senna

par Alain Hawotte

Durant le retour j’ai le ventre qui frémit encore du hurlement du moteur. Et alors on cherche à la télé noir et blanc la voiture rouge, le casque blanc et bleu, puis la voiture deviendra blanche, puis rouge de nouveau et enfin bleue et en couleur comme la télé…
Et un jour dans un entrefilet on lira que Big John met un terme à sa carrière de pilote, la chaîne se casse, mais le feu brûle toujours, on suit des voitures frappées des flèches blanches et du sigle TS, et puis les Surtees disparaîtront. Le jeune adolescent était resté un gosse et en voulait à la terre entière…

john surtees,ayrton senna
Mais au départ du GP suivant, il y avait Ickx pour longtemps en GP d’abord, en endurance et rallye raid ensuite, et la main a rallumé la T.V., le magazine préféré était encore dans le porte-journaux… La passion était là, de pilotes en pilotes, d’écuries en écuries, de circuits en circuits, de disciplines en disciplines même, elle se nourrissait sans cesse.
Des drames, il y en eu d’autres, et j’ai été touché ou cela fait mal un beau premier mai 94, et là, j’ai dit stop, j’ai pleuré, j’ai juré, j’ai craché !

john surtees,ayrton senna
Ma passion, elle, elle n’a rien dit, elle savait que je la retrouverais, une fidélité de 30 ans ne se détruit pas, elle s’occulte, se fait petite, se cache et murmure, petit à petit elle se redécouvre ; des sons, des images, des odeurs reviennent à la surface et le murmure grandit, se développe et, comme cette voiture rouge en 66, emporte à nouveau mon cœur et mes tripes.

Je sais, et je le crains; ma passion connaîtra d’autres drames, grands et petits, mais je sais aussi que certains vecteurs de cette passion seront en bonne place dans mon livre d’or, et je sais surtout que tous, oui tous, garderont une place dans mes souvenirs.

 

john surtees,ayrton senna

- Photo 3 ©The Cahier Archive

- Autres photos ©D.R

20 novembre 2014

Bernie...

« A moins qu'une personne qui en a le pouvoir me relève de mes fonctions, une seule chose peut mettre un terme à mon travail en F1, c'est quand ils me porteront dans mon cercueil.

Et ils feraient mieux de s'assurer que mon cercueil soit fermé avec des clous ! »

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29 octobre 2016

« Ron Dennis, Frank Williams et moi, nous nous sommes tous les trois enrichis grâce à la F1, mais ce n’était pas notre intention première quand nous sommes arrivés dans le sport », a assuré Ecclestone, dont la fortune est estimée à près de 3 milliards d’euros, avant d'ajouter : « Le problème aujourd’hui, c’est que nous avons des gens qui ne pensent qu’à s’en mettre plein les poches. Toto Wolff est probablement le meilleur exemple… »

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Monaco 1958. B.Ecclestone, Connaught-Alta

 

10 novembre 2014

AMON SCORES FOR LOLA

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Une victoire de Chris Amon, la « dernière » du circuit de Solitude, l'ultime apparition en course de Jacques Maglia (1 & 2)... cela fait trois événements suffisamment rares pour qu’une note leur soit consacrée.

(librement adapté d'un article d'AUTOSPORT July 23, 1965)

Francis Rainaut

 

AMON VAINQUEUR SUR LOLA

 

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Dans une course fertile en rebondissements et en épisodes tragiques, Chris Amon a conduit brillamment pour remporter dimanche dernier en Allemagne le Grand Prix de Solitude de Formule 2. Il fallait pour gagner tout l’immense talent du jeune Néo-Zélandais, parfaitement secondé par l’endurance de sa monture, une Lola-Cosworth du Midland Racing Partnership; jamais l'ensemble ne manqua de rythme.
Alan Rees et Gerhard Mitter amènent leurs Brabham-Cosworth du team Winkelmann aux deuxième et troisième place, le premier nommé réussissant le meilleur tour – nouveau record – pendant la dernière phase, une fois le difficile et sinueux circuit routier de 11,4 km réellement mis en mains.
Cependant la tragédie s'invita lors d'un premier tour mouvementé lorsque le pauvre Jacques Maglia, un jeune Français qui essayait de se faire un nom depuis déjà quelques saisons et semblait enfin sur la voie du succès, sortit de la route avec sa Lotus-Cosworth privée et subit alors de très graves blessures.Avec tout le cirque des Grand Prix parti pour Zandvoort, les équipes de F2 les plus importantes durent trouver d’autres pilotes tandis que cette ardente bande d’enthousiastes, les indépendants, dont la présence dans les différents meetings n’est pas toujours très bien appréciée - financièrement parlant - par les organisateurs, souriait davantage que d’ordinaire.

 
Les deux transporteurs de Ron Harris amenaient quatre Lotus : la monoplace de Jim Clark victorieuse à Rouen, qui resta dans son camion pendant tout le meeting, une autre avec moteur Cosworth pour Peter Revson (la monture habituelle de Mike Spence) et deux autres motorisées par B.R.M. pour Brian Hart et Hans Herrmann, dont c’était la première sortie F2 sur une voiture réellement compétitive. Les autres Lotus 35 étaient aux mains de l’Autrichien Alban Scheiber, des Français Jacques Maglia et Bernard Collomb et du Britannique Barrie Hart, ce dernier ayant opté pour une  motorisation B.R.M., tous les autres étant en Cosworth.
 

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Les deux Brabham du Winkelmann Racing étaient présentes comme de coutume, Jochen Rindt l'habituel coéquipier d’Alan Rees étant remplacé par le gars du coin Gerhard Mitter. Trevor Taylor amenait sa Brabham Aurora Gear par la route depuis le Yorkshire, Jo Schlesser disposait d’une voiture de l’Ecurie Ford-France, Silvio Moser un engagement au nom de Martinelli-Sonvico et Kurt Ahrens le sien en son propre nom. Les derniers entrants au programme étaient les deux Brabham du David Prophet team pour Prophet lui-même et pour le pilote de G.T. Peter Sutcliffe, dont c’était la première expérience en monoplace, et l’ex-voiture d’essai du team Normand de Mike Beckwith. Toutes les Brabham étant motorisées par Cosworth.
 
Le Midland Racing Partnership amenait trois Lola, une T60 à moteur B.R.M. pour Paul Hawkins, une T60 à moteur Cosworth pour Chris Amon et une Lola-Cosworth T55 de l’année dernière pour le pilote de F3 Roy Pike. Le Merlyn Racing engageait une Merlyn-Cosworth Mk. 9 pour Chris Irwin, tandis que Ian Raby engageait à son compte une monoplace identique. Le Français Eric Offenstadt avait apporté sa Cooper à moteur B.R.M. Pour compléter le plateau on trouvait la Lotus 18/21 d’Ernst Maring (avec un moteur d’1 litre de sa conception utilisant pas mal d'éléments Borgward) et une paire d’anciennes formules Junior ayant bénéficiés d’une rapide remise à niveau pour les mettre aux spécifications F2 (les Cooper Mk3 d’Otto Lux et de Rolf Scheel).
 
Après une parade interminable composée d’à peu près tous les types de véhicules existants, l’heure des Formule 2 sonnait enfin pour le Grosser Preis der Solitude. Les temps des essais du vendredi avaient décidé de la grille, et tous ceux qui n’avaient pas réussi un bon chrono ce jour-là, quelques soient leurs efforts effectués ce samedi détrempé, se retrouvaient en fond de grille. Revson, Amon et Rees composaient la première ligne, avec Taylor et Mitter tapis juste derrière. Beckwith était le mieux placé de la troisième ligne, devant Ahrens et Brian Hart. Les suivants dans l’ordre étaient: Maglia et Hawkins ; Irwin, Herrmann et Raby ; Barrie Hart et Prophet; Moser, Offenstadt et Pike ; Maring et Collomb ; Schlesser, Sutcliffe et Scheiber ; enfin Scheel et Lux.

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Vingt-cinq paires d’yeux anxieux guettaient le starter après que les mécaniciens, les parasites, etc., aient évacués la grille. Le régime des moteurs augmenta, puis diminua après que le signal des 1 mn fut donné. Trente secs., 10 secs., et alors le régime augmenta une fois de plus jusqu’à ce que le starter abaisse le drapeau allemand. Ce fut un départ propre, avec Trevor Taylor jaillissant de la seconde ligne pour prendre la tête dans la première grande courbe à gauche en haut de la colline menant vers la courbe Hederbach, une des parties les plus lentes du tracé. Juste derrière lui suivaient Revson, Amon, Rees, Beckwith et Ahrens, avec Maglia menant le peloton suivant.

 
Mais ce premier tour devait être un tour fatidique. Les six premiers arrivèrent pare-choc contre pare-choc dans l’ordre Taylor – Revson – Amon – Rees – Beckwith – Ahrens. Ensuite un peu derrière venait Mitter, suivi par Brian Hart dans une Lotus-B.R.M. pas mal amochée se dirigeant tout droit vers les stands. Apparemment Jacques Maglia avait perdu le contrôle d’une manière terrible et tapé très durement, projetant une botte de paille au milieu du circuit. Mitter l’évita, mais Hart fonça droit dessus, tandis que le reste du peloton était ralenti. Maglia était sérieusement blessé, souffrant de fractures aux jambes et à un bras mais aussi d’une perforation du poumon : il fut emmené à l’hôpital où son état fut jugé critique.
 
La Brabham de David Prophet perdit son huile, glissa dessus et heurta une clôture ; Peter Sutcliffe voyait le moteur de sa Brabham, la seconde voiture du team Prophet , tourner sur trois pattes, mais pour son malheur le cylindre récalcitrant se remit à fonctionner à un moment critique et il sortit de la route, démolissant pratiquement sa monoplace ; Alban Scheiber perdit le contrôle de sa Lotus et endommagea la suspension arrière ; Rolf Scheel aussi abandonna lors de ce premier tour mouvementé, mais sa Cooper semblait intacte.
 

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Pendant ce temps arrivait le peloton de furieux, réellement déchaîné. Rees avait grimpé à la seconde place après deux tours, juste derrière Taylor mais devant Amon, Beckwith, Revson, Ahrens et Mitter, ce dernier étant détaché des autres. Ensuite venaient Jo Schlesser, avec Paul Hawkins tenant à distance Silvio Moser derrière lui. Maring était dernier, une rupture d’embrayage causant finalement son abandon, bien qu’il se soit déclaré enchanté de son nouveau moteur.
 
Au troisième tour Rees et Amon firent le break, creusant l’écart avec Taylor, Beckwith, Revson, Mitter et Arhens, désormais dans cet ordre-là. Ce fut dans ce tour-là que Hawkins s’arrêta pour se plaindre d’une baisse de pression d’huile sur sa Lola M.R.P. ; il repartit encore mais ça n'était décidément pas son jour car sept tours plus tard  un coussinet de bielle de son moteur B.R.M. décida de filer vers de nouvelles aventures.
 

chris amon,jacques maglia,solitude

C’était le jour de Chris Amon : dès le quatrième tour le jeune Néo-Zélandais avait creusé l’écart sur Rees, qui se contentait de défendre sa position contre les attaques du quintet derrière lui. Cependant au sixième tour ce groupe se réduisit à un quartet quand Trevor Taylor - dont la malchance colle décidément à la peau où qu'il aille - s’arrêta sans pression d’huile avec un Cosworth émettant des bruits bizarres.
 
Avec Amon augmentant régulièrement son avance en tête et Rees sécurisant sa seconde position, l’intérêt se concentra sur la progression de Gerhard Mitter derrière. Comme ce garçon vit à seulement quelques kilomètres du circuit, on peut affirmer sans se tromper qu’il connait très bien les virages de Solitude : en effet, au septième des 18 tours il était troisième, devant Beckwith, Revson et Ahrens, pris dans une lutte entre eux, et visiblement il remontait sur son coéquipier Rees.
 
Les fréquences cardiaques teutonnes grimpèrent rapidement quand Mitter commença à rattraper Rees. Au onzième tour il était dans les roues de l’anglais, puis ce furent des cris de joie lorsque le commentateur annonça que Mitter l’avait doublé dans la portion du fond pour prendre la tête du duo Winkelmann dans la 12e boucle. Peu après Rees récupéra la seconde place, mais l’Allemand chris amon,jacques maglia,solituderiposta pour reprendre l’avantage au 14e tour. Cependant, en roulant devant, Mitter dévoila sans s'en rendre compte une ou deux de ses recettes secrètes et Rees fit bon usage de ces informations pour repasser et semer son rival allemand, établissant à l'occasion un record du tour en 4 mins. 1,5 secs., soit 105,76 m.p.h.
 
Mais il était alors trop tard pour tenter quoi que ce soit contre un Amon « volant » qui réalisa une performance vraiment très brillante et méritait largement sa victoire. Au baissé du drapeau Mitter arriva 9,6 derrière suivi par Mitter à 3,7 secs. Peter Revson terminait lui quatrième dans une Lotus-Cosworth Ron Harris en méforme, etc… (3)

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Mais que devint alors le circuit de Solitude (4) ? Il fut jugé vétuste et trop dangereux. Le Grand Prix de F2 1965 fut la dernière course internationale disputée sur ce tracé magnifique situé dans le berceau de l’automobile, là d’où provient l’ADN des Daimler-Benz et bien sûr des Porsche. C’est là, tout près de la ville industrielle de Stuttgart - le jardin de la jument - que se déroulèrent de nombreux Grand Prix Auto et Moto de 1924 à 1965. En catégorie moto, Mike « the Bike » Hailwood détient d'ailleurs le record absolu de la piste sur une MV Agusta 500cc, à une vitesse de 160km/h sous la pluie.  Hans Herrmann, pilote F1 Mercedes-Benz et vainqueur du Mans en 1970 pour Porsche habite non loin du circuit à Magstadt. Pour finir, les adeptes de GPL (Grand Prix Legends) connaissent fort bien le circuit de Solitude.
 
 
- Illustrations ©D.R.

(1) Jacques Maglia fut le « protégé » du poète Jean Genet, relisons ce dernier:

« Cela me paraissait bête au début, me paraît assez grave et assez beau aujourd'hui. il y a un côté dramatique et esthétique de la course bien faite. Le coureur est seul comme Oswald [l'assassin de Kennedy]. Il risque la mort. C'est beau quand il arrive premier. Il faut des qualités d'extrême délicatesse et Maglia est un très bon coureur. Les brutes se tuent. Maglia commence à être assez connu. il deviendra célèbre. »

(2) Jean Genet qui écrivit dans Sport-Auto un billet signé J.G. pour défendre Maglia pris à partie par les policiers de Monza et cependant vainqueur du 5e G.P. de la Loterie en 1963. Voir: A Monza les Italiens n'étaient pas à la fête

(3) Résultats: V Grosser Preis der Solitude 1965

(4) Pour en savoir davantage, un site superbe: solitude-revival.org

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